"PD" n'est pas une insulte homophobe pour le Conseil de prud'hommes

Par Jérémie Lacroix le 08/04/2016
Insulte homophobe prud'hommes

Le Conseil de prud'hommes de Paris considère que traiter un employé de "PD" dans un salon de coiffure n'est pas une insulte homophobe.

Mis à jour le 21 février 2018 : La Cour d'appel de Paris a condamné le salon de coiffure ce 21 février 2018, réformant ainsi le jugement du Conseil de prud'hommes qui avait considéré que l'emploi du terme "pd" dans l'affaire du licenciement d'un coiffeur ne constituait pas une discrimination. Pour la Cour d'appel, au contraire, "l'employeur ne justifie pas [...] que sa décision de mettre fin à la période d'essai repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination en lien avec la santé et l'orientation ou l'identité sexuelle supposée du salarié. La rupture de la période d'essai est dans ces conditions nulle comme reposant sur des motifs discriminatoires." L'avocat de l'association Mousse, qui s'était portée partie civile auprès du coiffeur licencié, rappelle que "aucun salarié, coiffeur ou non, ne peut être sanctionné ou licencié en raison de son homosexualité."
 
La décision du Conseil de prud'hommes de Paris est tellement ahurissante qu'on à peine à y croire. En effet, la juridiction a estimé que :

En se plaçant dans le contexte du milieu de la coiffure, le Conseil considère que le terme "PD" employé par la manager ne peut être retenu comme propos homophobe, car il est reconnu que les salons de coiffure emploient régulièrement des personnes homosexuelles notamment dans les salons de coiffure féminins, sans que cela ne pose de problèmes.

Le Conseil avait été saisi par un coiffeur parisien dans le cadre d'un licenciement abusif. En effet, ce dernier avait été licencié car il ne s'était pas présenté à son travail un jour où il était malade. Le patronne du salon lui ayant annoncé le lendemain la rupture de sa période d'essai pour "insuffisance professionnelle".
Cependant, lors de son absence, l'employé avait reçu un sms de sa patronne qui ne lui était pas destiné. Celle-ci s'exprimait en ces termes :

Je ne (le) garde pas. Je ne le sens pas ce mec. C’est un PD, ils font tous des coups de pute.

Le caractère homophobe des propos non-retenu

Le Conseil de prud'hommes avait donc également été saisi pour propos discriminatoire à caractère homophobe. Cependant, dans cette affaire, les conseillers prud'homaux n'ont pas retenu le caractère homophobe des propos tenus par la patronne mais seulement le caractère abusif du licenciement, condamnant l'employeur à 5000 euros de dommages et intérêts sur ce seul motif.
Dès le début de l'affaire, le Défenseur des droits avait été saisi par l'employé abusivement licencié afin d'enquêter sur la discrimination dont il avait fait l'objet par son employeur. Ce dernier avait assuré que ce licenciement n'était pas lié à l'homosexualité de l'employé.
En somme, le Conseil considère que l'homophobie peut être justifiée à l'encontre d'un individu suivant l'emploi qu'il exerce. "Vous êtes coiffeur donc vous êtes homosexuel" ou encore "vous êtes homosexuel donc on peut vous traiter de 'PD'"... Avec ces syllogismes douteux dignes d'Eugène Ionesco, on ose imaginer ce qu'un employeur se permettrait de dire à des employés noirs, arabes, trans, handicapés...
La victime a fait appel de la décision du Conseil de prud'hommes et a de nouveau saisi le Défenseur des droits.