homosexualitéLutte contre le sida : malgré quelques progrès, l'ONUSIDA tire la sonnette d'alarme

Par Youen Tanguy le 18/07/2018
sida

Dans son rapport annuel publié ce mercredi 18 juillet, l’ONUSIDA tire la sonnette d’alarme. L'ONG dénonce notamment l’insuffisance des financements et le retard pris dans de nombreuses régions dans la lutte contre le sida.

« Nous tirons la sonnette d'alarme. » Le rapport annuel de l'instance de l'ONU chargée de la lutte contre le sida (ONUSIDA), publié ce mercredi dénonce la hausse des nouvelles infections dans plusieurs pays, les décès liés au sida qui ne diminuent pas assez vite et la stagnation des moyens qui risque d’enrayer les résultats.
« Il manque 7 milliards de dollars par an (...) pour nous permettre de maintenir nos résultats », a déclaré à l'AFP le directeur exécutif de l'ONUSIDA, Michel Sidibé. Dans ces conditions, l'organisme estime qu'il sera difficile d'atteindre les objectifs qu'il s'était fixés pour 2020. TÊTU a pu consulter le rapport et en résume les axes principaux.
Parmi, les principaux enseignements de ce rapport, on retiendra ces quelques points :

  • Un accès au traitement qui reste difficile dans certaines régions du monde

En 2017, ils étaient 21,7 millions à avoir accès aux traitements antirétroviraux qui préviennent le développement du virus (contre 19,4 millions en 2016). « Un succès considérable », pour l'ONUSIDA, qui craint toutefois de ne pas atteindre l'objectif de 2020 fixé à 30 millions de personnes sous traitement. « Tout indique que le taux d’expansion (des traitements, ndr) ralentit », regrette l'organisme qui estime que ces résultats globaux cachent de fortes disparités. En Afrique de l'Ouest et centrale notamment, seuls 40% des porteurs du virus ont accès aux traitements et 50% des enfants dans le monde.

  • Une baisse des décès liés au sida trop lente

L'an dernier, 940 000 personnes dans le monde sont mortes de maladies liées au VIH/Sida (990.000 en 2016). À titre de comparaison, au pic de l'épidémie en 2005, 1,9 million de décès dans le monde étaient liés au sida. « Cependant, la régression n’est pas suffisamment rapide pour atteindre l’objectif de moins de 500 000 décès liés au SIDA d’ici 2020 », note l'ONUSIDA.

  • Lente diminution des nouvelles infections au VIH

Les nouvelles infections au VIH sont passées de 2,2 millions en 2010 à 1,8 million en 2017. Un chiffre encourageant, mais une baisse trop lente pour espérer atteindre l’objectif de moins de 500 000 nouvelles infections au VIH d’ici 2020, fixé par le programme de l'ONU. « Les nouvelles infections sont en augmentation dans une cinquantaine de pays, et, à l’échelle mondiale, n’ont diminué que de 18% au cours des sept dernières années », regrette l'organisme. « Certains pays continuent à nous inquiéter, comme le Nigeria, qui représente à lui seul environ la moitié de toutes les nouvelles infections d'Afrique de l'Ouest. »

  • La PrEP est efficace... mais rare

Les nouvelles techniques de prévention jouent également un rôle important dans la baisse des infections, ajoute le rapport. « La prophylaxie orale pré-exposition (PrEP) a un impact, en particulier pour les populations clés. » A titre d'exemple, l’augmentation de l’accès à la PrEP et l’accélération de la suppression virale chez les personnes vivant avec le VIH à San Francisco ont eu pour effet une baisse de 43% des nouveaux diagnostics en seulement trois ans.
« Malheureusement, les exemples de programmes intensifs de prévention sont rares et limités presque exclusivement à une poignée de villes à revenu élevé », déplore le rapport.

  • Des discriminations qui perdurent

Pour expliquer ces baisses encore trop lentes, l'ONUSIDA pointe du doigt « la discrimination exercée par le personnel de santé, les forces de l'ordre, les enseignants, les parents ou encore les chefs religieux », qui empêche les personnes séropositives d'accéder à « la prévention au traitement et à d'autres services de santé sexuelle et reproductive ». Dans son rapport, l'organisme assure que dans 19 pays - non cités -, une personne séropositive sur cinq déclare s'être déjà vue refuser des soins de santé en raison de sa séropositivité.

  • Manque de ressources financières

Après les succès remportés ces dernières années, « nous nous endormons sur nos lauriers et nous faisons face à une crise de la prévention », a estimé le patron malien de l'ONUSIDA, en insistant sur l'importance du financement. Aujourd'hui, au moins 44 pays dépendent à 75% de l'aide internationale pour combattre l'épidémie. Et de conclure : « Si l'on ne dispose pas de ces ressources, il y a un risque important de rebond de l'épidémie, avec un risque de résistance grandissante et d'augmentation de la mortalité due au sida ».
Crédit photo : Flickr 2012