LGBTphobieBarnabé, Camerounais gay réfugié à Toulouse, est menacé d'expulsion : "J’étais persécuté par ma famille"

Par Clément Boutin le 13/07/2018
réfugié

Barnabé, jeune camerounais gay de 23 ans, est arrivé illégalement sur le territoire français en septembre 2018. A Toulouse, où il a trouvé refuge, il a été placé en rétention le lundi 9 juillet, dont il est sorti deux jours plus tard. Il attend désormais une audience du tribunal administratif qui doit statuer de son expulsion, ou non, du territoire français.

A 23 ans, Barnabé a quitté son pays d'origine, le Cameroun, pour venir vivre en France et ne plus subir l'homophobie dont il était victime. Arrivé en Italie dans un premier temps, le jeune homme a ensuite trouvé refuge à Toulouse. Sa demande d'asile n'a cependant pas pu être prise en compte, dans la mesure où l'Hexagone n'est pas le premier pays européen dans lequel il s'est rendu. Il est ainsi victime de la procédure « Dublin », qui l'oblige à retourner en Italie.
Mis en rétention le lundi 9 juillet, il a pu en sortir deux jours après. Il est aujourd'hui dans l'attente d'une audience devant le tribunal administratif de Toulouse qui décidera si, oui ou non, il pourra déposer un dossier de demande d'asile en France. Sa date d'expulsion est fixée au 23 juillet. Il a accepté de témoigner auprès de TÊTU.

« J’étais persécuté par ma famille »

« J’ai quitté le Cameroun en mars 2017. Je suis d’abord arrivé en Italie, pendant l’été, puis je suis allé en France en septembre 2017. Je suis parti parce que c'était difficile à cause de mon orientation sexuelle : je suis homosexuel. J’étais persécuté tant par ma famille que par d’autres personnes, car l’homosexualité n’est pas reconnue dans mon pays d’origine. J’ai dû faire face à de l’homophobie, à des moqueries, à des injures… J’ai subi des attaques de ma famille, car il fallait que je sois un homme hétérosexuel, pour eux.

Je suis arrivé par bateau en Italie. La police italienne m’a contrôlé, m’a pris mes empreintes digitales et j’ai été transporté dans un centre d’accueil. Je ne parle pas italien et j’ai signé des documents sans vraiment tout comprendre. Après trois semaines, je suis parti pour la France. Le 5 janvier 2018, je me suis présenté à la préfecture pour faire ma demande d’asile. On m’a de nouveau pris mes empreintes et, à ce moment-là, on a vu que j’étais déjà passé par l’Italie. On m’a alors placé en procédure Dublin. L’Italie avait six mois pour trouver un accord avec la France, mais elle n’a donné aucune réponse. Mon accompagnante sociale, qui fait partie d'Act Up Sud-Ouest, m’a expliqué que, passé ce délai, la France peut considérer que c’est un accord implicite. Mais elle ne l’a pas fait.

« Je pensais être soutenu »

Je ne veux pas retourner en Italie car j’ai retrouvé là-bas, auprès des autres migrants du centre d'accueil, ce que j'avais vécu en Afrique. C'est-à-dire des mots durs, des moqueries, du rejet… J’ai également manqué de soins de santé. Je suis arrivé malade en Europe. J’avais besoin ne serait-ce que d’un soutien psychologique. Ça n’a pas été le cas. Ce qui m’a le plus choqué, c’est que j’étais dans un pays où je pensais être soutenu. Je me plaignais, j’appelais au secours. J’aurais aimé trouver des endroits LGBT où être aidé... Mais non.

Mercredi 11 juillet, je suis passé devant la juge des libertés et de la détention, après avoir été mis en rétention le 9 juillet. La justice a suspendu ma rétention et ne m’a pas assigné à résidence. Maintenant, j’attends une audience du tribunal administratif pour savoir si j’ai le droit de déposer un dossier auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).  

Je me sens un peu soulagé d’être sorti du centre de rétention, mais je reste inquiet car tout n’est pas joué. On attend la décision du tribunal administratif, sinon je suis censé repartir en Italie le 23 juillet… »

Une nouvelle manifestation est organisée à Toulouse le lundi 16 juillet, en soutien à Barnabé.
 
Propos recueillis et retranscris par Clément Boutin.
Crédit photo : capture d'écran Facebook.