LGBTphobieCanular homophobe : le CSA sanctionne TPMP de 3 millions d'euros

Par Ambre Philouze-Rousseau le 26/07/2017
Cyril Hanouna canular Touche pas à mon poste

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a prononcé une sanction contre l'émission de C8 présentée par Cyril Hanouna pour ses canulars homophobes.

L'émission Touche pas à mon poste écope de 3 millions d'euros de sanction à la site des canulars téléphoniques homophobes diffusés dans l'émission du 18 mai dernier. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel a prononcé ce mercredi 26 juillet cette sanction à l’encontre de la chaîne C8.
Dans un communiqué, le CSA revient sur les raisons de cette sanction :

Cette sanction fait suite à la diffusion d’une séquence, le 18 mai dernier, durant laquelle l’animateur a mis en scène des conversations téléphoniques en direct avec des personnes ayant répondu à une fausse petite annonce qu’il avait publiée sur un site de rencontres. Ces personnes, principalement des hommes homosexuels, n’étaient pas informées de l’identité de leur interlocuteur et, croyant être dans le cadre d’une conversation privée, ont pour certaines d’entre elles dévoilé publiquement des informations relevant de leur vie intime et sexuelle. En outre, l’animateur a, tout au long de cette séquence, eu recours à de nombreux clichés et attitudes stéréotypées sur les personnes homosexuelles. Le CSA a estimé qu’en diffusant cette séquence, la société C8 a gravement méconnu le principe de respect de la vie privée, ainsi que son obligation de lutter contre les discriminations.

Lors de cette séquence, Cyril Hanouna s’était inscrit sur un site de rencontre sous un faux profil et avait reçu, au cours de l’émission, plusieurs appels d’hommes. Pour leur répondre, il prenait à chaque fois une voix suraiguë alimentant les stéréotypes sur l’homosexualité. Le tout dans le but de se moquer ouvertement de ses interlocuteurs. Cyril Hanouna posait notamment des questions sur les pratiques sexuelles de ses interlocuteurs. Quand un certain Mika lui avait répondu qu’il voulait « lui bouffer le cul », l’animateur avait eu des éclats de rires l'obligeant à raccrocher.
Après la diffusion de cette séquence, les internautes avaient vivement réagi. Le CSA avait alors reçu près de 40 000 plaintes.
L’association SOS homophobie avait également saisi le CSA. Joint par TÊTU, son président Joël Deumier avait affirmé : "Ce n’est pas parce que Cyril Hanouna finance Le Refuge qu’il peut s’acheter bonne conscience."

La troisième sanction contre TPMP

Le CSA rappelle que cette sanction constitue la troisième prononcée en lien avec des séquences diffusées dans Touche pas à mon poste.

Depuis 2015, il a traité près de 16 dossiers et a répondu aux plaignants qu’il n’y avait pas eu de manquement pour 4 séquences, prenant notamment en compte le caractère qui se voulait humoristique de l’émission. Par ailleurs, il a prononcé 3 mises en garde et 2 mises en demeure, outre des courriers d’observation adressés à la chaîne. Il a donc privilégié le dialogue et multiplié les avertissements, sans manifestement être entendu, comme l’atteste la troisième sanction prononcée ce jour.

Le mercredi 7 juin, deux sanctions avaient été prononcées contre des séquences datant de plus de six mois. La première, diffusée le 3 novembre 2016, voyait Cyril Hanouna agresser un homme – soi-disant l’agent de Tom Cruise – en présence de Matthieu Delormeau, puis tenter par tous les moyens de dissimuler ce crime accidentel en empêchant son chroniqueur d’appeler les secours et en proposant même de laisser le corps inanimé devant l’hôtel.  Affolé, ce dernier avait fini par appeler la police, coupant court au piège morbide : le complice se relève, fait mine d’aller bien et affirmer qu’il veut oublier cette histoire. Matthieu Delormeau, régulièrement humilié par « Baba » en direct, n’avait appris le subterfuge que le lendemain et parlait plus tard de « la pire expérience de sa vie ». Le Conseil supérieur de l’audiovisuel a jugé que la chaîne avait « gravement méconnu son obligation de faire preuve de retenue dans la diffusion d’images susceptibles d’humilier des personnes ».
La chaîne C8 avait été interdite de publicités pendant l’émission (ainsi que 15 minutes avant et 15 minutes après sa diffusion) pendant une semaine du mois de juin. Une sanction qui avait été gonflée de deux semaines supplémentaires en raison d’une seconde séquence diffusée le 7 décembre 2016 où Cyril Hanouna attrape la main de Capucine Anav tandis que celle-ci a les yeux fermés, pour la poser sur son sexe.
Depuis le moi de mai, les grandes enseignes avaient boycottées une à une les antennes de C8, entraînant un manque à gagner faramineux de quelques millions d'euros. Buzzfeed, qui mettait régulièrement à jour le positionnement des marques, a résumé cette désolidarisation massive par ce graphique :

Cyril Hanouna canular Touche pas à mon poste
©Buzzfeed

Hanouna "obsédé par l'homosexualité"

Pour rappel, en décembre dernier, l'AJL (Association des jounalistes LGBT) publiait un étude intitulée « Un mois d'homophobie ordinaire ». Pendant tout le mois de novembre, l'association a relevé les occurrences LGBT et en a conclu que le dit Baba est « obsédé par l’homosexualité » : sur 20 émissions, 42 mentions, dont « la grande majorité (28) l’est sous couvert de la « blague » de mauvais goût ». TPMP roule donc à plus d’une blague homophobe par jour en moyenne.
Selon l’association, Touche pas à mon poste dessine le cadre de « ce qu’il est possible de faire chez soi, avec ses ami-e-s, au travail, au lycée : se moquer des personnes LGBT pour ce qu’elles sont, les transformer en animaux de foire sous couvert d’humour, les accepter (un peu) pour les humilier (beaucoup). » Or par « son audience (importante) et son public (jeune), » TPMP a « une responsabilité particulière dans l’imaginaire qu’elle offre » car elle « donne à voir les comportements de harceleurs de cour de récré », pouvant avoir des « conséquences dévastatrices ».
La chaîne C8 a fait appel de cette décision et entend déposer plusieurs recours. C8 a de plus fait savoir dans un communiqué, publié dans Le Monde, que : " la décision du CSA fragilisera, de nouveau, l'équilibre économique du groupe Canal qui est le principal soutien financier de la création française et du sport notamment."