GrindrEgypte : La police continue de traquer les gays sur Grindr

Par Julie Baret le 30/08/2016
Egypte police Grindr

En Egypte, les autorités emploient depuis plusieurs années l'application Grindr comme terrain de chasse pour traquer les homosexuels. Explications avec l'organisme Solidarity with Egypt LGBTQ.

En 2014, les révélations d'un webzine cairois attestaient que la police égyptienne employait Grindr et d'autres applications de rencontre pour identifier leurs utilisateurs et les arrêter. Deux ans plus tard, nous avons contacté Solidarity with Egypt LGBTQ, un organisme qui s'emploie à dénoncer les exactions commises contre la communauté gay en Egypte, afin de connaître l'évolution de la situation.
"La police tend des embuscades aux personnes gays, bis et trans sur des applications de rencontre comme Grindr depuis 2014, et cela continue. Avant cela, les autorités utilisaient déjà les plateformes des réseaux sociaux et les autres outils numériques de rencontre plus anciens, comme les chat" explique Dalia Alfarghal, l'une des fondatrices de Solidarity with Egypt LGBTQ.
Alors qu'en Egypte, aucune loi ne criminalise l'homosexualité, les homosexuels sont tout de même réprimés et inculpés selon d'autres motifs, comme l'immoralité, la débauche ou la prostitution.

Internet et les réseaux sociaux utilisés pour la moitié des arrestations

Dans une vidéo publiée au mois de mai, Solidarity with Egypt LGBTQ révèle ainsi qu'entre 2013 et 2015, 125 gays et 47 personnes trans ont été inculpés suite à des affaires d'"immoralité" et condamnés à des peines allant d'1 à 12 ans de prison ; dans 53% des affaires, internet et les réseaux sociaux ont été utilisés pour localiser et arrêter les accusés.
Dans certains cas, les autorités prendraient même l'avantage de la situation en recommandant aux accusés ou à leur famille un avocat pour leur défense. Or, d'après les enquêtes réalisés par Solidarity with Egypt LGBTQ, cette entremise aboutit généralement à des peines de trois ans d'emprisonnement. En revanche "plus vite notre organisation ou une autre intervient, et plus le détenu a des chances d'être acquitté".
Désormais, Grindr alerte ses utilisateurs résidant en Egypte, leur déconseillant de donner des informations personnelles - ou permettant de les identifier - à des inconnus, souligne Solidarity with Egypt LGBTQ. En 2014, Le Point soulevait en outre qu'en Egypte et dans d'autres pays d'Afrique et du Moyen-Orient, l'application dissimulait automatiquement la localisation des utilisateurs pour assurer leur sécurité.

"Ici, il est moins probable et plus dangereux de faire son coming-out"

Aujourd'hui, d'après l'organisme, "certaines personnes y réfléchiront vraiment à deux fois avant d'utiliser l'appli, d'autres seront plus prudentes, et certains continueront de l'utiliser comme avant, en suivant leur intuition". Une précaution qui conditionne également la vie quotidienne des LGBT en Egypte d'après l'organisme :

En Egypte, c'est comme partout. Sauf qu'ici, il est moins probable et plus dangereux de faire son coming-out. C'est évidemment plus dangereux que dans d'autres endroits du monde. Et cela dépend de tant d'autres facteurs, comme la position sociale et économique, le bagage éducatif et la couleur de peau. S'ajoutent à cela d'autres intersections comme l'identité de genre, la sexualité, le comportement sexuel et l'expression de genre, le tout relevant d'une combinaison assez complexe en tenant compte de la situation économique et politique qui se détériore, de même que la liberté d'expression. Pour faire simple, l'ensemble du tissu social, y compris la tradition, la religion et la misogynie profondément enracinée contribuent à cela.

En avril dernier, onze hommes gays ont été condamnés à des peines allant de 3 à 12 ans d'emprisonnement. Ils avaient été arrêtés en septembre 2015 pour "débauche" suite à des rapports sexuels consentis. Cumulées, ces peines s'élèvent à 101 années de prison.

Pour en savoir plus :

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Crédit photo thedailybest.com