Frida Kahlo au cœur de l'expo mexicaine du Grand Palais

Par Adrien Naselli le 19/01/2017
frida kahlo

Derniers jours pour voir l'exposition Mexique 1900-1950 au Grand Palais. L'artiste Frida Kahlo se retrouve au centre d'une partie consacrée aux "femmes fortes".

L'exposition se concentre sur les avant-gardes mexicaines et tente de contourner l'idée qu'elles avaient pour unique ambition de reproduire les avant-gardes européennes du début de siècle. Beaucoup d'artistes mexicains s'étaient certes installés à Paris - toute une partie de l'exposition retrace ce parcours de Diego Rivera (époux de Frida Kahlo), Nahui Olin, Angel Zarraga et Roberto Montenegro notamment - et l'on peut constater plusieurs influences européennes dans leur travail, comme le futurisme et le cubisme, mais la plupart d'entre eux sont retournés au Mexique après la Révolution dans l'affirmation d'un style propre.

Roberto Montenegro (1885-1968), Portrait de Gabriel Fernández Ledesma, 1921, Huile sur toile, Collection FEMSA © FEMSA Collection / Photo Roberto Ortiz
Roberto Montenegro (1885-1968), Portrait de Gabriel Fernández Ledesma, 1921, Huile sur toile, Collection FEMSA © FEMSA Collection / Photo Roberto Ortiz

"L'arbre Frida Kahlo"

L'une des ambitions du Grand Palais était de réhabiliter un certain nombre d'artistes inconnus du grand public :

L’arbre Frida Kahlo ne doit pas cacher une forêt de personnalités extraordinaires comme Nahui Olin, Rosa Rolanda ou les photographes Tina Modotti et Lola Álvarez Bravo.

L'effort est louable et les 70 artistes exposés représentent de belles découvertes; mais malgré les efforts du commissaire, c'est bien cette racine Kahlo qui conduit le visiteur impatient des premières salles jusqu'à la partie consacrée aux "femmes fortes". En témoigne le nombre de produits dérivés estampillés Frida Kahlo dans la boutique qui clôt le parcours, mais aussi la densité de visiteurs devant les œuvres de l'icône.

La révolution mexicaine modifia profondément la structure de la société : puisque les hommes étaient partis à la guerre ou à la recherche de travail et de moyens de subsistance, les femmes assumèrent de nouvelles tâches, d’abord dans la lutte armée puis dans la reconstruction de la culture et de l’éducation au sein de la société. Ainsi, l’image des soldaderas, ces femmes qui suivaient les troupes révolutionnaires, acquit une signification particulière et fut comparée symboliquement aux « femmes fortes » de la Bible. Dans le domaine artistique, les femmes jouèrent aussi un rôle déterminant, qualifié parfois de « protoféminisme » : mécènes d’artistes de valeur ou artistes elles-mêmes, elles participèrent à la quête d’un langage esthétique capable d’exprimer leurs doutes et leurs interrogations.

Frida Kahlo (1907-1954), Le Cadre, 1938, Fixé sur verre (plaque de verre), Paris, Centre Pompidou, musée national d’art moderne, Centre de création industrielle, Achat de l’État en 1939 © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Jean-Claude Planchet © [2016] Banco de México Diego Rivera Frida Kahlo, Museums Trust, Mexico, D.F. / Adagp, Paris
Frida Kahlo (1907-1954), Le Cadre, 1938, Fixé sur verre (plaque de verre), Paris, Centre Pompidou, musée national d’art moderne, Centre de création industrielle, Achat de l’État en 1939 © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Jean-Claude Planchet © [2016] Banco de México Diego Rivera Frida Kahlo, Museums Trust, Mexico, D.F. / Adagp, Paris

Protoféminisme

Dans la mise en scène perpétuelle d'elle-même, Frida Kahlo s'est érigée en référence culturelle. En plus d'une maladie rare qui empêche son pied de grandir, la petite fille issue de la bourgeoisie mexicaine est prise dans un grave accident de bus à l'âge de 18 ans qui endommage considérablement son abdomen, sa jambe droite et sa colonne vertébrale.
Dès ses débuts dans la peinture, la jeune Kahlo met en scène ses souffrances dans de resplendissants autoportraits et se construit elle-même une figure iconique grâce à trois éléments récurrents : un sourcil unique et épais, une légère moustache et une couronne de fleurs. La représentation de ses poils faciaux, considérés comme des attributs masculins, est fortement liée à son intérêt pour l'émancipation des femmes dans la société mexicaine, pour laquelle elle milite au sein du Parti communiste. Après son mariage avec Diego Rivera, qui la trompe, elle vit de nombreuses aventures extraconjugales avec des hommes et des femmes.
 
Crédits photo couverture : Frida Kahlo (1907-1954), Les deux Frida, 1939, Huile sur toile, 173 x 173 cm, México, INBA, Collection Museo de Arte Moderno © INBA, Museo de Arte Moderno © 2016 Banco de México Diego Rivera Frida Kahlo Museums Trust, Mexico,, D.F. / Adagp, Paris