musiqueLara Fabian nous parle de son retour pop-électro inspiré par Ed Sheeran et Sia (interview)

Par Jérémy Patinier le 06/10/2017
lara fabian

D’ascendance canado-américano-belgo-sicilienne Lara Fabian n’en finit plus d’étendre ses ailes. Ça tombe bien, c’est justement le titre du single Growings wings…  Elle a reçu un journaliste-fan de TÊTU qui a essayé de lui poser des questions un peu différentes, à partir des titres de Camouflage, sur ce nouvel album pop-électro !

C’est son 13e album studio, dont le succès viendra s’ajouter aux 20 millions d’albums vendus dans le monde… C’est le 3e album en anglais de sa carrière, auxquels il faut ajouter le projet multilingue Mademoiselle Zhivago et l’album de reprises en anglais Every Woman in me. Elle a fait des duos avec des chanteurs italiens, un Turc, avec une Néerlandaise, une Belge (Maurane), chanté dans plus de 12 langues…

 

Growing Wings

Vous travaillez désormais avec des Suédois… Comment s’est faite la rencontre avec Moh Denebi (Suède) and Sharon Vaughn (USA) ?
Et bien très simplement, mon manager Matt Ersin et moi-même on était à la recherche de quelqu’un qui pourrait nous aider à avoir un son moderne, électro-pop, et on a écouté plusieurs trucs… Je lui expliquais que je voulais faire quelque chose qui appartient vraiment à l’époque, tout en ayant le respect de mes origines bien-sûr. Je suis issue d’une période dans les années 90 où les chansons à grand déploiement étaient très aimées, je fais partie de cette famille de chanteuse… mais je voulais faire quelque chose qui corresponde plus à la musique que j’écoute aujourd’hui. C’était une volonté de raconter quelque chose de bien spécifique. Je me suis inspirée de quelques chansons plus confidentielles sur certains albums de chanteurs très connus, comme I see Fire de Ed Sheeran (du film Le Hobbit), de James Arthur, Adèle, Sia par exemple… Mais tout en restant dans une volonté quasi artisanale de faire de la grande musique. Et c’est vraiment ce que j’ai trouvé en Moh, qui a une façon très particulière de fabriquer la musique.
Il y a des sons très étonnants dans cet album, il y a même un remix de “Growing Wings” par Offer Nissim, une superstar de la musique électro dans le monde…
Cette chanson s’adaptait vraiment bien à un remix et c’est ma volonté de faire quelque chose vraiment en adéquation avec ce qui s’écoute… Être dans les clubs, je trouve ça assez chouette !
Ça risque d’étonner encore que vous chantiez en anglais, de vous couper de certaines personnes francophones…
Je l’ai pensé en anglais mais il est destiné à un public large. C’est vrai que c’est un peu imperméable si on ne comprend pas la langue. C’est vrai que ça peut étonner encore un peu mais quand on sait que c’est une langue que je parle, j’avais un grand-père américain, de Chicago, j’ai vécu 15 ans au Canada… Je l’ai fait naturellement et quand les gens me connaissent un peu, ça ne les étonne pas trop.
À quand cet album en italien que tous vos fans réclament ?
Si je le fais un jour, je voudrais le faire en collaborant avec un artiste particulier, qui écrit et qui chante, quelqu’un de très particulier que j’ai en tête…
 « Avez-vous déjà affronté un océan/ Alors que vous n'aviez aucune notion / De comment nager, mais vous avez sauté quand même » ? (Paroles de “Growings Wings)
Quand on le commet dans un acte de foi, en se disant ce n’est pas grave, je veux bien prendre le risque. Il arrive des miracles. Et c’est au moment où on se lance qu’on peut vraiment en comprendre la véritable ampleur…
À ÉCOUTER ICI

 

Perfect / I'm Breakable

Depuis quelques années, on a l’impression que vous ne cherchez plus à démontrer votre perfection vocale, mais davantage une originalité artistique, quitte à étonner ceux qui s’intéressent à votre univers. C’était l’idée avec ce nouvel album ?
Je voulais juste être dans une zone de confort, où je prends possession de ma voix comme d’un instrument plus mezzo, moins mezzo-soprano, dans un espace où c’est fluide, ou je suis juste moi.
 

Camouflage

Après avoir un peu « déchanté » pendant une période - où vous cachiez quelque peu la Lara Fabian que les gens aiment et que vous semblez être -, comment avez-vous retrouvé confiance en vous pour tendre vos ailes, à nouveau ?
Un entourage sain et serein. Mon mari a énormément contribué à cette reconstruction. Ma famille et mes deux ou trois amis très proches m’ont beaucoup aidé.
Pourquoi Camouflage ? Et pourquoi c'est votre chanson préférée de l'album ?
Pour cette dichotomie, cette fragilité. À la fois le récit du masque que l’on porte tous, et à la fin quand on ose l’enlever, ce qu’on découvre de merveilleux… Un mélange très aérien et très organique entre les violons et les sons plus électro.
Vous avez parfois évoqué vos problèmes de santé, mais pour certaines personnes, vos chansons et votre voix sont comme des remèdes, des béquilles… Comment vit-on cette responsabilité, cette relation souvent fusionnelle avec le public, des messages très forts des gens ?
La musique en général c’est ça, c’est sa vertu principale.  Je le vis avec une immense gratitude, j’ai beaucoup de chance. Je mesure vraiment le pouvoir de cet amour et comment il m’a porté au travers des années, belles et moins belles, comment ça a été capital pour moi, d’avoir cette force, cette puissance à travers le sentiment qu’ils dégagent pour moi. Je le vis à 100% comme un cadeau !
 

We Are The Storm / Communify

Vous avez souvent évoqué des sujets de société dans vos chansons : vous avez évoqué l’homosexualité dans La différence et Deux îles deux elles, le sida également,  « ce mal du sang qui court et tue, si librement », qui touche particulièrement les gays, milité pour le mariage pour tous, chanté des hymnes à la liberté d’être soi (Humana, Imagine, La vie est là…)…
Au-delà des orientations sexuelles, au respect de l’identité, au respect de l’intégrité de chacun, surtout…
Vous avez également écrit des chansons féministes (Le roi est une femme,Toutes les femmes en moi)… parlé des femmes battues (Llora), de l’anorexie, l’écologie aussi…
Et dire qu’on croit que je ne parle que d’amour ! Mais oui, en fait, de l’amour au sens absolu. Il est l’ADN de tous les sujets qu’on traite, même si on l’a rendu obsolète…
Est-ce que vous écrivez aussi bien quand vous êtes en colère, qu’heureuse ou triste ?
Pour moi la colère c’est le refus de la réalité. Ce n’est pas très constructif, c’est un peu venimeux… Je peux écrire triste, c’est un exutoire fabuleux, j’ai déjà écrit en plein vol aussi, en étant très heureuse.
Qu’est ce qui vous horripile aujourd’hui, sur quel sujet vous pourriez écrire ?
La mauvaise foi, la connerie, l’injustice, qui fomente les guerres intérieures…

 

Choose What You Love Most

Vous avez écrit presque toutes les chansons de votre carrière, composé presque toutes les musiques, produit vos albums, vos spectacles, toujours choisi vos projets… Est-ce que vous avez cherché cette liberté, ou vous a-t-elle été quelque part imposée par le marché de la musique ?
Au départ, à 22-23 ans, personne ne voulait me signer. Donc par la force des choses, comme personne n'y croyait, j’ai fait mes choix. Et à partir de là c’était tellement savoureux que je n’ai jamais voulu concéder de cette liberté, tout simplement. C’est très précieux d’être artisan et artiste, créateur et producteur.


 

Keep The Animals Away

Vous avez été sous le feu des critiques et des moqueries, êtes parfois encore un peu victime de sarcasmes… souvent de la part de personnes qui ne vous connaissent pas. Avec le recul, c’est d’être populaire, une femme, une passionnée qui déchaîne ces réactions ?
Les trois mon général ! On est toujours soumis, quand on est dans la lumière, à son opposé. C’est comme ça. Mais le plus important dans tout ça : on ne fait pas ce métier pour ces gens-là, mais pour les fans dont on vient de parler. C’est vrai que parfois la bourrasque est violente, mais elle est aussi vide que violente…
 

Painting In The Rain

Bien avant Jean-Luc Mélenchon, vous avez utilisé la technique des hologrammes dans un show (Tournée TLFM)… À quoi ressemblera le show que nous verrons dans le monde en 2018 ? Un orchestre, une ambiance électro à l’américaine, des danseurs comme dans la précédente tournée, de la magie enfin (son mari est magicien, ndlr) ?
Une adéquation parfaite entre le son et ce que vous verrez… C’est tout ce que je peux vous dire !

 

Chameleons

Vous avez fait quelques incursions au cinéma et surtout étonné avec Mademoiselle Zhivago, plusieurs projets de théâtre n’ont pas abouti. Est-ce que vous avez toujours cette envie/des projets de « jouer les caméléons » ?
Je serai sur l'un des quatre fauteuils rouges dans The Voice Canada, c’est une nouvelle aventure qui commence. Je vais être au plus près de ce qui me tient à cœur : la transmission, au-delà du talent, partager une pédagogie, une force de résilience, aborder notre métier pour qu’un artiste puisse se déployer… Et une école, peut-être un jour, pour transmettre ce que j’ai pu apprendre en 30 ans de métier…
 
Lara Fabian sera au Zénith de Paris le 16 juin 2018 et à Forest National à Bruxelles le 9 Juin. La tournée passe par Berlin, Montréal,  Moscou, New York, Rio, Kiev, Vienne, Sofia, Bucarest, Prague, Barcelone...
Camouflage sort le 6 octobre sur les plateformes de téléchargement comme iTunes, ici.
 
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Couverture : ©FilipVanRoe