pornoIndonésie : Les homosexuels victimes de raids et de coups de bâton

Par Julie Baret le 24/05/2017
Indonésie coups de bâton

Hier, pour la première fois en Indonésie, deux hommes ont reçu plusieurs coups de bâton en public. Pourtant, ce qu'on leur reproche n'est même pas inscrit dans le Code pénal indonésien.

Contrairement à d'autres pays, l'archipel n'a jamais adopté de sombre législation combattant les rapports homosexuels à coups d'amende et de peine de prison. Sur le papier, l'homosexualité a toujours été légale en Indonésie. Dans les faits, elle est de plus en plus réprimée, du cercle familial - où il est préférable de se cacher sous un mariage de convenance, nous apprenait The Guardian - aux cours de Justice de ce pays à majorité musulmane.

Une escalade de violence

Depuis janvier 2016, les associations de défense des droits humain s'inquiètent d'une accélération des violences encouragée par les commentaires politiques : "contraires aux valeurs et morales", "grave menace", "guerre par procuration", "maladie chromosomique"... C'est en ces termes que plusieurs ministres indonésiens qualifient l'homosexualité ces derniers mois. La police, en réprimant avec violence les manifestations LGBT, et les médias publics, en fournissant des directives contre toute représentation "normale" (sic.) des LGBT, suivent la cadence. L'Association psychiatrique indonésienne recommande même la "rééducation" de ces "maladies mentales".
La province d'Aceh, sur les trente-trois que compte l'archipel, a cela de particulier qu'elle est la seule du pays à être régie par la charia. Dans cette province située à l'extrémité nord de l'île de Sumatra,"sodomie" et "actes lesbiens" sont interdits et la délation est encouragée.

Torture sur la place publique

Mardi 23 mai, plusieurs centaines d'âmes s'étaient réunies pour regarder, filmer et huer deux homosexuels d'une vingtaine d'années, frappés plus de quatre-vingt fois par des cannes en rotin sur une estrade devant la mosquée de la capitale provinciale, Banda Aceh. The Straits Times a publié une vidéo de la scène (ATTENTION : images difficiles). L'objectif n'était pas de blesser profondément les accusés que de l'humilier et de donner "une leçon au public" (sic.), s'est enquéri un membre du conseil religieux local cité par l'AFP.
Les deux hommes ont été surpris le 28 mars par un groupe d'individus alors qu'ils étaient à l'abri, dans une résidence privée de la province, puis livrés au commissariat islamique de Banda Aceh. Une vidéo de l'interpellation capturée avec un téléphone portable montrait de jeunes gens apeurés appelant leurs familles à l'aide.

Des arrestations massives à répétition

Pas plus tard que dimanche dernier, c'est plus d'une centaine d'hommes qui a été arrêté dans un immeuble de Jakarta abritant une salle de gym et un sauna, sous prétexte qu'il s'y déroulait une "fête gay". Sur les 141 hommes arrêtés, 126 ont été libérés. Les gérants  et les organisateurs présumés de cette "fête" sont soupçonnés de prostitution et de strip-tease.
Cette fois-ci, aucune charia pour justifier l'arrestation; les autorités plaident la violation de la "loi contre la pornographie" qui interdit tout ce qui est "contraire à la morale" sans en définir les contours.
Le mois dernier, huit hommes ont été interpellés à Surabaya car ils étaient soupçonnés d'organiser une "orgie homosexuelle." Ils pourraient également tomber sous le coup de la loi antipornographie.
 
Couverture : The Straits Times/Facebook
 

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