sexoU=U : la "charge virale indétectable" peut changer la sexualité des gays

Par Jérémy Patinier le 15/03/2017
charge virale indétectable

Aujourd’hui, avoir un partenaire séropositif bien traité, dont la charge virale est indétectable, ne présente aucun risque de contamination. Et ça change tout !

 

Une charge virale ?

Lorsqu’une personne est séropositive (ou porteuse du virus du VIH), le virus se multiplie en plusieurs copies dans tout son corps (sang, sperme, muqueuses, etc.). Plus la charge virale d’une personne est élevée, plus cette personne risque d’avoir des complications liées à la présence du VIH : diminution de l’efficacité du système immunitaire et apparition de maladies opportunistes qui profitent de cette baisse d’efficacité. Une accumulation de tous ces facteurs peut mener à la phase SIDA.
On considère qu’une charge virale est :
- Élevée quand elle est supérieure à 100.000 copies de VIH par millilitres de sang, sperme, muqueuses;
- Plutôt faible quand elle est inférieure à 10.000 copies/ml.
Elle peut atteindre des valeurs très importantes, en particulier au cours de la primo-infection. On est alors souvent à plusieurs millions de copies/ml, voire 10 ou 15.000.000 copies/ml.
Les personnes séropositives font ce genre d'examens très régulièrement (en fonction de leur ancienneté de séro-conversion et de leur état de santé global). Enfin... ceux qui se sont dépistées bien sûr (25 000 ne seraient pas dépistés en France).
 

Indétectable ?

Sous traitement efficace (qui contrôle la réplication du virus), la charge virale peut devenir indétectable, c’est-à-dire inférieure à la plus petite charge virale mesurable par le laboratoire. Actuellement, le seuil habituel est de 40 copies/ml (et l’objectif est même de le stabiliser autour de 20 copies/ml).
A Paris en 2015, plus de 90 % des personnes qui se savaient séropositives avaient une charge virale indétectable grâce au principe de traitement universel (toutes les personnes dépistées positives doivent se voir proposer un traitement anti-rétroviral).

 

Intransmissible ?

Depuis 2008, on le sait, mais c’est une idée qui peine à faire son chemin : le traitement des personnes séropositives permet de devenir intransmissible. En 2016, l’étude Partner ne laisse plus aucun doute sur l’efficacité préventive du traitement chez les séropositifs : parmi 1166 couples sérodifférents gays et hétéros, et après 58000 rapports sans préservatif, il n’y a eu aucune transmission !
C’est lorsque la personne traitée est devenue indétectable qu’elle est intransmissible lors d’une relation sexuelle, même non protégée par un préservatif ou par la PreP.
Cependant, cela ne signifie pas l’élimination du VIH de l’organisme : avoir une charge virale indétectable n’est pas équivalent à un statut de séronégatif.
Ainsi, les traitements aident les personnes séropositives à mieux vivre, mais aussi protéger leurs amants/maris séronégatifs contre le VIH. C’est ce qu’on appelle dans le jargon médico-VIH, le TASP : Traitement as Prévention.
U = U, en anglais, veut dire que undetectable = untransmittable, c'est à dire indétectacle = intransmissible. Mais U=U c'est aussi You = You. Car séropo traité et indétectable = séronégatif avéré par un dépistage récent.
U=U : la "charge virale indétectable" peut changer la sexualité des gays

Comment ça marche ?

Il suffit juste qu’une personne séropositive prenne correctement son traitement antirétroviral. Cette méthode fonctionne à certaines conditions :
- Avoir une charge virale indétectable de façon continue depuis au moins six mois;
- Ne pas être porteur d’une autre IST. La survenue d’une IST peut augmenter la charge virale du VIH et donc amoindrir l’effet protecteur des traitements.
 

Est-ce efficace à 100% ?

Comme n’importe quel médicament ou vaccin, cet outil n’est pas efficace à 100% et son efficacité dépend fortement du fait de le prendre correctement et d’être bien suivi. Il est également impératif que la personne séropositive ait un suivi thérapeutique strict et régulier auprès d’un médecin, notamment pour veiller à l’absence d’autres IST, souvent invisibles et méconnues, qui peuvent faciliter la transmission du VIH et dont le TasP ne protège pas.
La charge virale d’une personne sous traitement peut parfois remonter, notamment dans les cas suivants :

> Lors de la survenue d’une IST : la remontée de la charge virale peut intervenir lors de la contamination, au cours du traitement ou après le traitement.

> Si le traitement pris par la personne séropositive perd en efficacité avec le temps, si le virus devient résistant au traitement, cela a pour effet de faire remonter la charge virale.

> Prendre très régulièrement un traitement est pour tout le monde une contrainte, et il peut y avoir des périodes où les oublis s’additionnent, ce qui fragilise le traitement et peut occasionner une remontée de la charge virale.

 

Se protéger davantage ?

En tant que personne séronégative, choisir comme partenaire une personne séropositive dont la charge virale est indétectable est en soi une façon de réduire ses risques. Mais utiliser un préservatif ou la PreP en complément peut être utile et rassurant. Surtout, un dépistage/traitement/suivi de vos IST permet de ne pas lui transmettre de maladies qui feraient remonter sa charge virale…
 

En quoi cela peut changer notre sexualité ?

Ne plus exclure des partenaires sur le principe - aujourd’hui un peu fallacieux - de leur séropositivité peut nous permettre de rencontrer des partenaires qui nous conviennent. Et voire même dont on peut tomber amoureux. C’est aussi être davantage «  séro-concerné » quand on est séronégatif : se dépister des IST plus régulièrement pour ne pas les transmettre, se renseigner sur le VIH, que ce ne soit plus un tabou. La baisse de cette sérophobie permet enfin à certaines personnes séropositives de retrouver confiance en elles et de créer ainsi un cercle vertueux de suivi du traitement, de maintenir une charge virale indétectable, de ne plus s’inquiéter de sa transmissibilité.
 
Plus d’infos sur SEXOSAFE.FR http://sexosafe.fr/le-tasp
 
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(c) Les visuels de la campagne "U=U" en couverture et "Undectable = Untransmitable" dans l'article appartiennent à l'association AIDES.