Depuis plusieurs années, Nelson Morales photographie des communautés trans d’Amérique latine. Il nous raconte cette aventure.
Photographe mexicain et homosexuel, Nelson Morales arpente l’Amérique latine pour saisir la présence d'une culture queer dans les communautés autochtones du Mexique et de Colombie. Son objectif sur l’épaule, il capture les visages de transgenres male to female du Mexique et d’Amazonie depuis six ans :
J’ai commencé par de la photographie documentaire dans ma région, capturant les personnes et la culture pour raconter des histoires (…), montrer notre richesse. Durant ce processus je suis tombé sur un sujet ayant une résonnance toute particulière pour moi : les Muxes.
Les Muxes, communauté transgenre du Mexique
Les Muxes (ou Muxhes, transcription zapothèque de mujer, femme en espagnol) forment la communauté homosexuelle zapothèque d’Oaxaca au sud du Mexique. Comme l'explique le photographe, les Muxes vivent dans un corps masculin mais se sentent comme des femmes, et sont davantage acceptées et tolérées que dans le reste du pays. Déjà dans les années 1980, la photographe Graciela Iturbide les mettait en lumière à travers une série de portraits consacrée à Magnolia, une des premières Muxes connue. Pour Nelson Morales, la reprise de ce travail sur les Muxes s'inscrit alors comme un défi artistique, technique, mais aussi personnel :
Quand j’ai découvert mes préférences (homosexuelles), j’ai refusé d’être l’un d’entre eux (les Muxes) car je ne voulais pas me travestir ou changer mon identité. Grâce à la photographie, j’ai pu trouver une place particulière dans ce groupe, devenant un complice, un ami.
Un nouvel éclairage sur le genre et la sexualité
Dans plusieurs séries photographiques, le photographe rend hommages à la communauté autochtone singulière des Muxes, mais aussi aux Ticunas, population colombienne manifestant également une expression libérée de la féminité. Tantôt camp, tantôt baroque, le travail de l’artiste signe ainsi une ôde à la diversité sexuelle aux allures de voyage onirique, comme il s’en confiait aux médias espagnols en 2015 :
Mon thème est la sexualité. Dans le cas des Muxes, je suis entré dans leurs rêves et leurs fantasmes pendant cinq ans, et je tiens à le montrer ouvertement, selon une mise en scène à la fois libre, érotique et sensuelle.
Après s’être intéressé aux communautés transgenres du Mexique et de Colombie, Nelson Morales travaille désormais sur une série d’autoportraits. Sur le marché de l’art, ses photographies de Muxes se vendent à plusieurs milliers de dollars, et l’artiste s’apprête à publier son premier ouvrage.
Pour suivre son travail, rendez-vous sur son site web et son compte Instagram.