The Pirouettes, génération carrément désenchantée

Par Adrien Naselli le 07/10/2016
The Pirouettes (photo: Adrien Naselli)

Les petits gymnastes de la pop française sortent leur premier disque, Carrément Carrément. Planant et bourré d'autodérision.

"C'est l'aboutissement de plusieurs années de travail" après les EP, synthétise Vicky non sans fierté. Carrément carrément représente presque deux ans dans la vie de The Pirouettes. Les premiers clips pour annoncer l'album ont été postés sur leur page YouTube il y a un an déjà. Le temps passe vite quand on a 23 ans et qu'on écrit des chansons.
Vicky, encore étudiante aux Arts Décoratifs, a réalisé elle-même le clip de "L'Escalier", le single de la sortie du disque. Tout en images de synthèses et en chorégraphies un peu cheap. "On a recréé un décor d'émission télévisée pour donner l'impression d'un playback du futur", décrit la chanteuse-réalisatrice.
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"J'ai compris qu'il n'y avait rien à comprendre"

Léo et Vicky sont en couple. Ils se sont rencontrés dans leurs toutes jeunes années à Annecy. Ils chantent leurs textes indifféremment au masculin et au féminin. Dans la chanson "Amoureux", le fait qu'ils sortent ensemble ne transparaît pas particulièrement : tout le monde peut s'identifier indifféremment à l'un ou à l'autre. Ils portent des vêtements neutres, se les prêtent parfois. Une génération dégenrée - et non pas "dégénérée" comme le suggère mon correcteur orthographique - chez qui les rôles ne sont plus répartis.
Dans leurs chansons virevolte toute une communauté "Remplie de garçons et des filles / Agités comme des ouistitis / Dans leur forêt d'Amazonie". Quand on leur dit que tout ce petit monde pourrait bien ne pas être hétérosexuel, Léo sourit : "On aime bien l'idée". "C'est très inconscient, renchérit Vicky, on ne se prend pas la tête sur la sexualité". Dans le clip de "Je nous vois", Léo porte une veste Saint Laurent à paillettes tandis que Vicky est habillée très simplement; ce n'est plus forcément la fille, l'objet du désir vers qui les regards se tournent.
Autre phénomène propre à leur génération : les textes sont un peu désabusés. "J'ai compris qu'il n'y avait rien à comprendre", chantent-ils dans le refrain de "L'Escalier". Où aller après la fac ? The Pirouettes, malgré leur petite notoriété, n'échappe pas à la règle : "C'est la débrouille ! On compose une petite communauté avec les groupes actuels comme Bagarre, La Femme... Mais l'idée de précarité est partout, jusque dans nos vidéos parodiques." The Pirouettes incarne parfaitement ce milieu issu de la classe moyenne aisée, montée à Paris pour tenter l'aventure artistique.
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"C'est ta victoire / C'est ma Victoria"

Léo et Vicky écrivent à quatre main. Les musiques sont composées sur l'ordinateur : "C'est pas très compliqué de faire une chanson", avance modestement Léo.

Sur les couvertures de nos disques, on se starifie. Mais on joue sur les deux tableaux : on envoie nous-mêmes nos disques, on se prend en photo à La Poste, on joue sur les deux tableaux. En revanche il est vrai qu'on est fasciné par les stars. On peut écouter des trucs très connus comme des trucs très underground. Notre idole absolue chez les grosses stars, ce serait Justin Bieber. Son dernier album est impeccable du début à la fin.

Leur fantasme : que Kate Bush n'ait jamais chanté "Wuthering Heights" et la lui piquer. "On adore aussi Mylène Farmer. Quand les artistes glissent leur nom dans les paroles. C'est une sorte d'ego trip second degré, un clin d'oeil pour faire rire les gens." Et The Pirouettes de terminer par une acrobatie, comme gênés par leur propre modestie :

On n'est pas vraiment des chanteurs. En fait, on n'aime pas trop les gens qui chantent de manière trop investie. On se dit toujours que ce qu'on chante, il faut qu'on puisse aussi le dire en parlant.

 
Pour en savoir plus :
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Crédit photo couverture : Adrien Naselli