In bed with… Andrew Grey, youtubeur libéré

Par Jérémy Patinier le 02/11/2016
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« Andrew is gay », au moins c’est clair comme nom de chaîne Youtube. C’est d’ailleurs l’un des seuls Français aujourd’hui à assumer : leather, sodomie ou «être une pornstar». Avec Andrew Grey, au moins, on est tout de suite dans le vif du sujet.

Andrew me donne rendez-vous chez son mec. Chez lui, c’est trop petit, et il s’en sert principalement pour tourner ses vidéos maintenant. Il faut garder l’ambiance intimiste des chambres d’ado sur Youtube, rapport au public jeune qui doit s’identifier.
Rien à voir ici : des tableaux sanguinolents sur dix mètres de long dans une pièce, des fauteuils arty dans les couloirs, une salle de bain plus grande que mon studio. Et certainement le sien. Mais Andrew ne se perd pas dans les méandres du luxe. Il est amoureux, déjà. Il a 22 ans, alors il se concentre sur ses vidéos qui commencent à le rendre "célèbre" dans la communauté. Génération connectée.
Après une licence en photographie, il découvre vite comment faire des vidéos en regardant des tutos sur Youtube. On doit certainement y apprendre à peu près tout aujourd’hui, tourner, monter, faire du buzz… Il remarque vite qu’en France, contrairement aux Etats-Unis, très peu de gays assument, et encore moins de parler clairement de sexualité. C’est son naturel qui ressort, qui plait aux internautes, son ton léger et décomplexé. Parce qu’il aborde tout, et va souvent très loin, dans son "émission" Parlons cul : mon expérience en tant que passif, le dog training, baiser sans capote... Génération sans tabou.

Il m’explique qu’il a été élevé par une mère très cool, qui travaille dans les cosmétiques, a le souvenir d’avoir été entouré de gays. On parle de tout avec simplicité. D’ailleurs il lui fait lire ses messages Grindr, et filme le tout bien sûr : Ma mère lit mes messages grindr !. Génération "out of the closet".
Sur Youtube, il faut faire du marketing alors les sujets un peu hot arrivent au fur et à mesure. En même temps que ses découvertes personnelles. Il parle assez vite de son penchant pour les hommes mûrs, de 40 à 49 ans, comme son copain aujourd’hui. Il veut déconstruire les préjugés, il ne cherche pas un papa, ni à se faire entretenir. Une question de maturité, on apprend plus avec un aîné, ça pousse à s’intéresser à tout, à s’enrichir pour ne pas lasser l’autre. Jusqu’à ce que lui se lasse. Mais il revoit son ex parfois, qui est devenu très pote avec sa mère. Parfois il arrive chez elle, ils prennent le café. Une relation basée sur l'échange donc : il leur apprend ce qu’est la vie d’un jeune de 22 ans aujourd’hui, les nouveaux comportements et la technologie, Youtube forcément. Génération Z.
Andrew parle Youtube, vit de Youtube, pense Youtube. Et quand il ne pense pas à ça, il pense cuir. L’odeur le rend fou, autant que le poppers me confie t-il. Autant que la vue d’un homme en cuir. Il s’intéresse assez vite à la diversité des sexualités, rencontre des gens au COX (un bar parisien sévèrement burné) qui l’intègrent à la communauté leather. Il a récemment intégré la famille "Bluf", une communauté de fan de cuir. Loin des clichés de parties fines SM, on fait des restos et on boit des verres en respectant le dress code. Mais interdiction d’avoir du sexe en public. On cherche à donner une bonne image des fétichistes de la peau animale. Génération explicite.

Grâce à Youtube, il a maintenant une voix dans la communauté, on l’accoste dans la rue, mais aussi chez les jeunes, LGBT ou non. Il s’ouvre à des sujets plus "politiques" : son FUCK LA MANIF' POUR TOUS !!! a été multi-liké. Multi-sharé. Méga buzz. Il a bien envie de poursuivre en envoyant une lettre ouverte à Marine Le Pen. Mais c’est sensible, il veut le faire bien. On lui réclame d’aller plus loin, de parler uro, il a pourtant poussé jusqu’à montrer un plug monstrueux Mais avec les thèmes trop sexuellement explicites, il a peur de perdre sa monétisation. La censure du géant veille. Et les commentaires un peu trop virulents l’ont parfois refroidi. Il a dû enlever une vidéo sur les escorts : originaire de Cannes, il en a bien connus, les décrivant comme superficiels et prêts à tout pour réussir; il disait alors malencontreusement les "tolérer". Bronca. On ne touche pas simplement à tous les sujets avec légèreté. Génération censure ?
Génération perdue, surtout. Ses followers sont assez jeunes et sont en demande d’infos, de réflexion, de "grand frère" dont Andrew endosse le rôle avec plaisir. Mais il apprend d’eux aussi : il se met parfois dans les fumoirs, il écoute les jeunes de 18 ans et se rend compte qu’ils ont encore beaucoup à apprendre sur le sexe gay...
Il en fera certainement d’autres vidéos, et en parlera probablement avec son mec.
Générations en miroir.

 
 
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