Théo & Hugo sont Geoffrey & François : retour sur un film à succès

Par Adrien Naselli le 28/11/2016
theo & hugo dans le meme bateau

Geoffrey Couët et François Nambot, les deux acteurs de Théo & Hugo dans le même bateau, le dernier film de Jacques Martineau et Olivier Ducastel, ont beaucoup voyagé. Le film sort en DVD.

Ce fut une année un peu folle pour Geoffrey et François, que beaucoup confondent désormais avec leurs personnages de Théo et Hugo. En avril dernier Théo & Hugo dans le même bateau sortait en salles, film radical tant dans la forme que dans le fond : une rencontre sexuelle et amoureuse en temps réel qui se déroule entre 4h30 et 6h du matin, un été dans Paris; on passe d'un club de rencontre gay à une course folle dans les rues; le troisième protagoniste du film, c'est le VIH. Il guide et poursuit les deux garçons dans leur parade nuptiale. Décideront-ils de faire le chemin ensemble ? Ce film d'amour est un thriller pour les garçons de l'an 2000.
Après les deux réalisateurs Jacques Martineau et Olivier Ducastel pour la sortie du film en salles, rencontre avec les deux héros dans un café à l'occasion de la sortie DVD, dans leur quartier, là où s'est déroulé le tournage du film voilà plus d'un an.
TÊTU | Geoffrey, tu connaissais bien l'oeuvre de Ducastel et Martineau; tu avais même figuré dans Nés en 68. Comment te sentais-tu à l'idée de tourner dans l'un de leurs films ? Et toi François ?
Geoffrey Couët | C'était très excitant. Mais ça ne me paraissait pas incohérent vu le chemin qui se dessine entre ce que eux font et l'acteur que je suis. Ce n'est pas comme si Spielperg m'appelait; Ducastel et Martineau, il y avait quelque chose de cohérent. La figuration sur Nés en 68, ce devait être ma première année au Cours Florent pour me faire de l'argent.
François Nambot | J'étais content. C'est plus intéressant de travailler avec des cinéastes de leur trempe. La scène du casting était si bien écrite que je n'ai même pas trop stressé. Pourtant ils ont dû voir au moins 30 garçons.
Le film a eu un grand succès critique et public. Vous vous attendiez à cela ?
Geoffrey | Jacques et Olivier nous protégeaient et on n'a plus 18 ans donc on ne s'emballe pas trop vite... Mais on a été surpris d'avoir autant de beaux retours. Honnêtement, on ne s'attendait pas à grand chose !
Taïwan, Tel-Aviv, Toronto, Mexique... Le film est sorti un peu partout, au moins dans des festivals.
François | Je crois que le film a véritablement été porté par la norotiété de Jacques et Olivier.
Geoffrey | Et par le discours sur le VIH qui est très intéressant. Au Mexique ils demandaient : mais vous ne payez pas à l'hôpital ?
Vous aviez eu peur, comme tous les homos dans tous les domaines, d'être cantonné à un rôle gay ?
Geoffrey | Les gens qui veulent nous mettre dans une case nous y mettront très bien. Ceux qui cataloguent ne sont pas vraiment en contact avec nous...
François | Oui, nous serons plutôt catalogués dans un certain type de cinéma indé. Ce qui nous convient très bien.
Il y a des parcours intéressants d'acteurs de films indépendants qui accèdent à des films mainstream, et inversement des Virginie Efira qui passent de La Nouvelle star à du cinéma d'auteur comme avec Victoria de Justine Triet. Vous avez eu des propositions depuis le film ?
François | Ca n'arrête pas ! (rires) Au théâtre, un peu... J'attaque une autre pièce en janvier - j'ai créé une compagnie, on est six. On joue Le Jeu de l'amour et du hasard en ce moment au Lucernaire.
Geoffrey | Moi je prépare des trucs en tant qu'auteur et metteur en scène. Quasiment que du contemporain. Sauf ce que j'adapte moi-même pour un seul en scène : une pièce de Victor Hugo.
Le film a un scénario très écrit, notamment pour la longue scène de sexe. C'est une première expérience de grand rôle un peu particulière à jouer ?
François | On savait tout. C'était rassurant, cadré. A l'hôpital, en revanche, on a eu un peu d'improvisation.
Geoffrey | On n'aurait pas été à l'aise si ça avait été : allez-y, niquez ! Le fait que ce soit écrit à ce point là nous protège complètement. Ce sont les mouvements de Jacques, le lieu qu'ils ont choisi...
Jacques me disait qu'il s'agissait d'un film romantique. Vous le voyez comme cela aussi ?
François | Oui, clairement. C'est bienvenu que des choses plus légères viennent tempérer la gravité de la situation qu'ils traversent.
Geoffrey | Ils jouent au chat et à la souris pendant tout le film; peut-être que ça va durer cinq ans, vingt ans ?

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François Nambot et Geoffrey Couët, le 22 novembre à Paris. Crédit photo : Julien Fleurence

Les gens vous confondent avec vos personnages; vous vous en rendez compte ?
Geoffrey | Les gens pensent qu'on est proches des personnages. C'est pour ça qu'on nous pose des questions sur nous, si on est gays, etc. Mais ce serait tellement bien qu'ils fassent un numéro 2 !
François | On raconterait quoi ? Théo & Hugo à la montagne ?
A la mer ?
Geoffrey | (rires) La revanche de Théo... Le retour de Hugo...
Il y a beaucoup de personnages séropos dans les films de Martineau et Ducastel. La très jeune génération est en général peu renseignée sur la prévention. Et vous, avant le tournage, vous connaissiez ces sujets ?
Goeffrey | Oui. A nos âges, on a encore été vachement informés à l'école. Je crois que le film propose des solutions. Ca arrive d'avoir un accident et le film vous montre qu'il existe des solutions.
François | Au-delà de la base au lycée, je n'étais quand même pas très pointu. Je savais que la trithérapie existait mais je ne savais pas du tout comment ça marchait. On a appris plein de choses tout de même. Comme on joue des types plutôt normaux, qui ont une sexualité assez commune...
Quand vous sortez de l'hôpital, Théo dit à Hugo : "La nuit appartient aux femmes et aux pédés". 
Geoffrey | J'adore Jacques et Olivier pour leur engagement politique. Ils font de beaux pieds de nez.
Dans votre vie quotidienne, vous manifestez ?
François | La Manif pour tous me désespère mais je ne vais surtout pas me déplacer pour aller voir ces gens-là.
Geoffrey | J'ai l'impression que faire ce film est en soi une forme de militantisme.
Et vous pourriez vous engager plus, si on touchait aux droits LGBT ?
Geoffrey | Le problème c'est que nous vivons dans un milieu un peu déconnecté, parisien, une élite intellectuelle. Je me dis : on organise des débats mais on ne touche personne en restant entre nous.
Vous lisiez TÊTU ?
François | Oui, de temps en temps ! Mais je pense que je me suis plus planqué pour l'acheter la première fois.
Geoffrey | Dans le premier TÊTU que j'ai lu, en 2002, il y avait un article sur la sortie de Ma Vraie vie à Rouen [de Martineau et Ducastel, NDLR].
Il n'y a pas de hasards ! Merci à tous les deux.
 
Théo & Hugo dans le même bateau
DVD Epicentre films, 19,90€
Sortie le 22/11/2016
 
François Nambot dans Le Jeu de l'amour et du hasard de Marivaux
Au Lucernaire jusqu'à la fin de l'année
 
Photo couverture : François Nambot et Geoffrey Couët, le 22 novembre à Paris. Crédit photo : Julien Fleurence