Barack Obama vient d'accorder une remise de peine à Chelsea Manning, lanceuse d'alerte pour WikiLeaks devenue héroïne de la cause des trans en prison...
C'est probablement l'une des dernières grandes décisions prises par le président des Etats-Unis avant la fin de son mandat, dans deux jours. En tout cas, elle revêt une dimension symbolique extrêmement forte. Barack Obama vient d'accorder une remise de peine à Chelsea Manning, condamnée à 35 ans de prison en 2013 pour avoir transmis des documents classés secret-défense au site lanceur d'alerte WikiLeaks. Après avoir passé plus de six ans en prison, la lanceuse d'alerte - âgée de 29 ans - sera libérée le 17 mai prochain.
Entre novembre 2009 et mai 2010, l'ancienne analyste du renseignement télécharge et envoie à WikiLeaks 700.000 documents, notamment relatifs aux guerres américaines en Afghanistan et en Irak. Les révélations créent une onde de choc mondiale et provoquent l'ire des Etats-Unis. Chelsea Manning est poursuivi pour espionnage puis incarcérée.
De lanceuse d'alerte à héroïne trans
Encore appelée Bradley Edward Manning sur ses papiers, la militaire a fait son coming out trans pendant sa détention et annoncé sa volonté d'entreprendre une procédure de changement de sexe, dont la prise d'un traitement hormonal. Cependant, l'administration militaire la lui refuse. Chelsea Manning se lance alors dans un bras de fer judiciaire pour faire reconnaître son droit. En 2015, l'armée annonce qu'elle lui fournira le traitement demandé. Son combat ne s'arrête pas là. Elle peine à être reconnue comme une femme alors qu'elle reste enfermée à la prison pour homme de Fort Leavenworth (Kansas), faisant d'elle un symbole de la cause des trans en prison, et l'une des personnes trans les plus célèbres de la planète.
Les conditions de détention de la militaire sont également dénoncées par ses avocats, notamment au regard de sa fragilité psychologique. En effet, Chelsea Manning est maintenue à l'isolement pour avoir tenté de se suicider une première fois en juillet 2016. Dans ces conditions, elle tente à nouveau de mettre fin à ses jours quelques mois après. Le rapporteur des Nations-Unies sur la torture sera saisi et jugera ses conditions de détention "cruelles, inhumaines et dégradantes, à la limite de la torture".
Remerciements de WikiLeaks et d'Edward Snowden
De nombreux lanceurs d'alerte se sont réjouis de la décision de Barack Obama. Edward Snowden - qui a révélé la surveillance de masse de la NSA - a tweeté, depuis la Russie où il est exilé, un message pour remercier et encourager Chelsea Manning.
In five more months, you will be free. Thank you for what you did for everyone, Chelsea. Stay strong a while longer! https://t.co/PaLvJDvDbl
— Edward Snowden (@Snowden) January 17, 2017
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De son côté, Julien Assange - fondateur de WikiLeaks, réfugié à l'ambassade d'Equateur à Londres - a "[salué] la décision du président Obama" et a qualifié Chelsea Manning d'"héroïne dont le courage aurait du être félicité, pas condamné". WikiLeaks avait également tweeté, il y a quelques jours, que Julien Assange accepterait d'être extradé aux Etats-Unis si Barack Obama accordait sa clémence à la lanceuse d'alerte.
If Obama grants Manning clemency Assange will agree to US extradition despite clear unconstitutionality of DoJ case https://t.co/MZU30SlfGK
— WikiLeaks (@wikileaks) January 12, 2017
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Pourtant, le fondateur de WikiLeaks risque la réclusion à vie voire la peine de mort s'il devait être jugé aux Etats-Unis, lesquels l'accuse également d'espionnage. De plus, il fait aussi l'objet de poursuites en Suède dans une affaire de viol présumé. Les Républicains qui arrivent au pouvoir en la personne de Donald Trump sont beaucoup moins enclins à gracier les lanceurs d'alerte, comme en témoigne les déclarations des sénateurs John McCain et Tom Cotton qui dénoncent respectivement "une grave erreur" et qualifient Chelsea Manning de "traître traitée comme une martyre".