[Interview] Son rôle de taularde attachante dans Orange is the new black a fait de Laverne Cox l’une des personnalités transgenres les plus célèbres de la planète. À l’arrivée de la saison 5 de la série sur Netflix, rencontre avec une femme puissante.
Quel genre de rôles aimeriez-vous jouer ?
Laverne Cox : Pendant des années je voulais jouer une avocate. Et je l’ai fait dans Doubt [série déprogrammée après deux épisodes, ndlr]. La loi me fascine, sûrement parce que je suis politiquement engagée. J’aime à penser que je suis une petite futée, pouvoir démontrer ma force intellectuelle m’excite. Je viens de tourner un pilote pour ABC, The Trustee, et mon personnage, Amanda Jones, est drôle, intelligente, irrévérencieuse et décomplexée. J’adorerais être comme ça dans la vie, n’en avoir rien à foutre de rien ! (rires) Les gens pensent que je suis comme ça mais c’est faux.
Le rôle de porte-étendard de la cause trans vous pèse-t-il parfois ?
Si je dois faire une réponse spirituelle, je dirais que ce que les autres pensent de moi, ce n’est pas mon affaire. Que ce soit positif ou négatif, je refuse que cela me définisse. J’ai besoin d’être libre. En tant qu’artiste. En tant qu’actrice. En tant qu’être humain. Mais je suis consciente que lorsque je prends la parole sur des problèmes qui me tiennent à cœur, comme la violence envers les personnes trans ou les problèmes raciaux, certaines personnes sont mal à l’aise.
Orange is the new black a changé le regard du public sur les personnes trans. Et peut-être aussi celui des homos, car il y avait beaucoup de transphobie au sein même de la communauté gay…
Et il y en a encore beaucoup ! En 2002, une loi a été votée pour protéger les homosexuels contre les discrimination dans l’État de New York. À l’origine, elle incluait aussi les personnes trans. Mais on nous a enlevé de la proposition de loi pour qu’elle passe ! C’est symptomatique : nous sommes systématiquement laissés derrière, même par les assos LGBT. Sylvia Rivera était une des activistes à l’origine des émeutes de Stonewall en 1969. Lors de la Gay Pride de 1973, elle a rappelé que nous ne devrions pas devenir un mouvement uniquement composé de personnes blanches et issues de la classe moyenne. Elle a littéralement dû se battre pour monter à la tribune d’un mouvement qu’elle avait fondé ! En tant que femme trans, elle n’était plus la bienvenue. J’ai la chair de poule rien que d’en parler... Nous devons rester vigilants ! Chacun d’entre nous doit examiner sa transphobie, son racisme, son classisme. En tant que femme transgenre, j’ai moi-même intériorisé certaines idées transphobes que la société m’avait transmises, notamment à travers les représentations stéréotypées des personnes trans à la télé.