Quand Indochine lui a écrit un mail, Kiddy Smile a cru que c’était une blague. Le chanteur, performeur et DJ revient pour TÊTU sur une rencontre hors-normes. (Et une chanson à écouter en fin d'article !)
On retrouve Kiddy Smile là où on ne l’attendait pas. Qu’est-ce qui a pu pousser Nicola Sirkis, le chanteur d’un des groupes les plus connus de France, à proposer un featuring à l’enfant du clubbing queer ? En creusant un peu, on repère quelques préoccupations communes. Dans le clip de "College boy", réalisé par Xavier Dolan sur leur précédent album Black City Parade en 2013, Indochine montrait les persécutions d’un étudiant gay jusqu’à sa crucifixion par ses bourreaux. Dans "Let a bitch know", le clip qui l’a fait connaitre d’un plus large public, Kiddy Smile représente cette même violence dans un environnement gris ; à la différence près que c’est lui et sa bande qui font peur aux hétéros…
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Particulièrement depuis l’album Alice & June en 2005, Indochine multiplie les références à l’homosexualité féminine et masculine, ainsi qu’à la transidentité. C’est ainsi qu’il propose "Tomboy" dans son nouvel album 13, terme qui entre évidemment en résonance avec le film à succès de Céline Sciamma, qui avait déclenché les foudres et la censure des conservateurs. C’est sur cette chanson que Kiddy intervient. Explications !
TÊTU. Comment s’est fait le rapprochement avec Indochine ? Est-ce une idée de Nicola Sirkis lui-même ?
Kiddy Smile. Oui, c’est lui qui m’a contacté, il m’a envoyé un mail et je n’ai pas répondu parce que je pensais que c’était une blague. Ensuite, il a envoyé un autre mail à mon manager qui m’a dit : "J’ai reçu une demande intéressante". Après, il m’a même envoyé un message sur Instagram !
Il voulait vraiment te rencontrer !
Moi j’ai un problème avec les moyens de communication, je remets tout à plus tard. En discutant avec lui, on a compris qu’il voulait qu’on fasse une chanson ensemble. Nicola Sirkis m’a invité chez lui pour me faire écouter trois titres et c’est "Tomboy" que je préférais. Il avait fait une ligne mélodique avec sa voix et moi j’ai écrit toutes les parties en anglais. J'ai été très bien reçu, c’était un peu bizarre de le voir.
Est-ce qu’il t’a expliqué les raisons de son choix ? Vos univers musicaux sont pour le moins éloignés.
Il se tient super au courant de ce qui se fait. C’est sa nièce qui lui a montré mes clips, il a bien aimé mon discours, il trouvait que c’était rafraîchissant. De mon côté j’étais un peu hésitant, je réfléchis trop, je me demande si ça colle à ce que je fais. Je me suis dit : "Si j’aime la musique, je le ferais". J’ai adoré. J'ai choisi la chanson que je préférais. J’ai écrit mon texte et il m’a laissé libre.
Bizarrement vos voix se ressemblent !
C'est vrai ! Pas mal de gens me disent qu’ils ne savent pas où je chante : ils me reconnaissent dans les passages en anglais, mais en fait je chante à plein de moments avec lui.
Quelle image avais-tu du groupe avant de les rencontrer ?
Je connaissais "3e sexe" et "J’ai demandé à la lune". C’est vraiment ce qui m’a fait les connaître. Indochine, à la base c’est pas mon truc musicalement, c'est plus par ce qu’ils représentent et les messages qu’ils transmettent que je me sens proche. J’aime bien leur musique mais ça n’a pas contribué à mon identité musicale.
Est-ce que ce mélange de gothique et de romantique te touche ?
C’est l’univers de quelqu’un qui a construit un monde alternatif. Quand tu n’es pas conforme à la masse, tu trouves des endroits où te replier. Ce genre de monde fait écho à ma vie.
"Ils veulent casser mon visage
Ma mère qui pleure mais laissera faire
From the outside I'm a girl
But I'd rather be a boy that I am deep inside
Je vais devenir ce dont je rêvais
Oui je serai libre de m'aimer moi
Je vais devenir un garçon
Oui je serai libre de t'aimer toi"
Extrait de "Tomboy" d'Indochine, 13
"Ma mère qui pleure mais laissera faire", ça évoque un peu ton clip "Teardrops in the box" tu ne trouves pas ?
Quand on a enregistré, ça m’a fait penser à mon clip c’est vrai ! Nicola Sirkis s’est inspiré de l'histoire d'un petit que ses parents ne veulent pas laisser vivre comme un garçon, et qui part vivre avec ses grands-parents...
On peut voir une parenté avec "Sans contrefaçon" de Mylène Farmer dans le texte… Si elle te proposait de collaborer ?
Je dirais : "Voyons-nous et parlons-en !" Avant la musique, si je te rencontre et que t’es pas sympa, on ne va pas travailler ensemble. Je ne connaissais pas la réputation de Nicola mais il était très prévoyant, ça pouvait marcher. Je suis parti enregistrer avec lui en Belgique dans un studio où toutes les stars ont enregistré. J’étais très impressionné. Il m’a passé des conseils pour faire certaines notes, et il m’a fait confiance. J’étais stressé car il ne m’avait pas du tout entendu chanter avant d'entrer dans le studio !
Quand on t’avait rencontré en mars dernier, tu travaillais à ton premier album. Il est toujours prévu pour début 2018 ?
C’est presque fini, on y arrive, on est au bout. C’est très dur de faire un album, on veut pas se tromper, c’est compliqué de ne pas tout dire, la balance entre parler à pas mal de gens alors que je fais une musique particulière. Est-ce qu’on va rentrer dans un format classique ou faire un truc barré ? Je suis encore tiraillé entre les deux. Je devrais en avoir rien à foutre. Je n’ai pas de label avec moi, mais cette fois j’écris des chansons avec l'aide de producteurs. Je fais toujours des choses club, mais la différence c’est que ça ressemblera plus à des chansons !
Album 13 d'Indochine disponible chez Sony Music. (sur Deezer ici)
Tomboy 1, sur Deezer :
Retrouvez Kiddy Smile au MAMA festival à Paris 18 octobre.
Photo couverture : Kiddy Smile et Nicola Sirkis en studio. Collection personnelle de Kiddy Smile.
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