Ce premier film renouvelle le genre de la découverte des sentiments. Heartstone, un été islandais envoûte par sa peinture de paysages sublimes, aussi bien extérieurs qu’intérieurs.
Christian et Thor passent l’été à traîner dans leur village de pêcheurs natal, entre les ragots des adultes, les camarades désœuvrés et la bande de caïds qui les terrorisent. Il ne fait presque jamais nuit, à peine la lumière baisse-t-elle quelques heures. Christian, le beau blond, un peu plus délicat que les autres, ne semble pas à sa place mais cache bien son jeu. Le petit Thor, qui n’a pas encore connu la puberté, évolue lui comme un poisson dans l’eau – mis à part qu’il aimerait bien sortir avec la mystérieuse Beth, mais il faudrait pour cela que ses poils poussent et que sa voix mue… Le décor est planté. L’été va tout changer.
Intensité dramatique et érotique
Encore un film d’ados qui découvrent leur sexualité ? Oui. Mais celui-là, réalisé par l’Islandais Guðmundur Arnar Guðmundsson, 35 ans, sort largement du lot. Tout au long de ses 2h09, la tension ne cesse de grandir, la beauté de se dévoiler, les destins de s’entremêler. La naissance et l’expression progressive des sentiments de Christian pour Thor sont montrées tout en finesse. Contrairement à certains films qui promettent et ne montrent rien, Heartstone réussit le pari de suggérer beaucoup tout en proposant des scènes d’une intensité dramatique ou érotique remarquable.
Aucun personnage secondaire n’est bâclé : les parents, les amis, et surtout les deux grandes sœurs de Thor. D’un côté la rebelle, de l’autre l’artiste, qui s’amuse à faire poser son frère et le christique Christian dans des postures dignes du Pierre et Gilles le plus kitsch. Les deux ados se retrouvent torse nu, maquillés, collés l’un à l’autre… avec interdiction de bouger tant que l’ingénue, qui sait très bien ce qu’elle fait, n’a pas terminé sa toile.
Pluie de récompenses
Par-dessus tout, Heartstone, un été islandais nous transporte dans des paysages à couper le souffle. A des kilomètres de la capitale, Reykjavik, la nature est sauvage, rose, verte, l’eau est partout, et dès la fin de l’été il neige à gros flocons. Loin de se reposer sur son décor, Guðmundur Arnar Guðmundsson surprend toujours en promenant sa caméra de manière virtuose.
Le réalisateur raconte qu’il est parti de sa propre histoire, la tentative de suicide de son meilleur ami à l’adolescence, pour réaliser Heartstone. Le film a déjà reçu une trentaine de prix dans presque autant de festivals. Il a raflé la mise aux Edda Awards, les Césars islandais, avec 9 prix sur 16 nominations ! Gageons que sa sortie un peu inaperçue, au beau milieu des fêtes de fin d’année, ne l’empêchera pas de s’inscrire au panthéon des films sur l'adolescence et la découverte de la sexualité.
Heartstone, un été islandais de Guðmundur Arnar Guðmundsson. Avec Baldur Einarsson, Blær Hinriksson. Durée : 2h09
Sortie le 27 décembre 2017