musiqueOn a parlé d'amour, de Trump et de capsules temporelles avec Chris Garneau

Par Alexis Patri le 25/11/2018
Chris Garneau

Chris Garneau est de retour. Le chanteur américain explore son univers éthéré, mêlant spleen et belles éclaircies, sur un nouvel album, "Yours" paru ce mois-ci. L'occasion d'interviewer le musicien ouvertement gay qui débute sa tournée internationale par Paris la semaine prochaine. Interview.

Habituellement, tu clos toutes tes tournées par la France. Cette fois, tu y commences ta tournée de "Yours" à Paris. Pourquoi est-ce important pour toi ?

Absolument ! Quand j'ai commencé à tourner en Europe, mon label et mon manager étaient à Paris. La France sont devenus un lieu-pivot. Certains de mes amis les plus proches vivent ici. Et j'ai grandi en France ! C'est l'endroit d'Europe où je me sens le plus à la maison.

Chacun de tes albums épouse un concept. Quelle histoire as-tu voulu raconter avec "Yours" ?

L'idée était d'évoquer l'état effrayant du monde dans lequel on vit. Je voulais décrire la férocité et la violence de ce monde contre les humains, les animaux et la nature. Mais je voulais aussi en célébrer la beauté. J'ai commencé à écrire ce disque en 2016. Au début, je n'étais pas totalement sûr de la direction que j'allais prendre. J'ai commencé par travailler sur "Gentry", qui parle d'incarcération de masse, des gens mais aussi des animaux. Le titre suivant, "Torpedo", décrit plus précisément un monde post-apocalyptique. C'est lui qui m'a dicté la direction qu'allait prendre tout l'album.

Cet état d'esprit était-il lié à l'élection de Donald Trump, en novembre 2016 ?

J'ai écrit environ 80% des titres de l'album avant l'élection. Et je suis entré en studio à Lyon (en France) pour l'enregistrement dans la foulée. Mais je trouvais mes premières démos trop sombres. Puis Trump a été élu... J'ai abandonné l'idée de tenter d'en faire quelque chose de plus positif... Ça n'aurait pas correspondu à ce que je ressentais alors.

Chris Garneau

 

"Yours", le titre qui a donné le nom à l'album, parle de la fin d'une histoire d'amour. C'est un regard plus intime sur ta vie...

C'est vrai. Mais cette chanson décrit aussi mon sentiment que le monde appartient davantage à quelqu'un d'autre qu'à soi. Dans cette chanson, j'offre le monde entier à cet amant. Je vois des gens utiliser le monde à leur avantage et s'en tirer bien mieux que d'autres.

 

"Quand j'ai emménagé à la campagne avec mon copain, nous étions très prudents."

 

On a parlé d'amour, de Trump et de capsules temporelles avec Chris Garneau

Il y a quelques années, tu vivais dans une ferme dans l'Etat de New-York. Tu n'y vis plus ?

J'ai quitté la ferme pour Los Angeles. Je suis revenu l'été dernier dans l'Etat de New York. Je vis maintenant dans une petite maison, dans une petite ville calme, Hudson, le long de la rivière du même nom...

En France, il est souvent considéré comme difficile d'être ouvertement gay dans une commune rurale. Comment cela s'est passé pour toi pour avoir une vie amoureuse ?

Quand j'ai emménagé dans la ferme, c'était nouveau pour moi : j'ai vécu à New York pendant plus de 10 ans ! J'habitais avec mon mec, à l'époque. Au début, nous étions très prudents. Je n'étais vraiment pas à l'aise. Nous ne savions pas si nous pouvions être affectueux l'un envers l'autre en public.

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Et aujourd'hui ?

Si tu venais à Hudson maintenant, tu te dirais "Wow, cette ville est vraiment gay !" La ville est théoriquement en pleine campagne et entourée de fermes. Mais beaucoup d'artistes queer commencent à emménager. Ils fuient les loyers exorbitants de New York, qui continuent d'augmenter. La région compte de plus en plus de galeries et d'espaces la musique. J'aime cette évolution, je me sens plus en sécurité.

 

"Je devrais acheter une pelle et aller creuser dans le parc. Je ne veux pas me faire arrêter !"

 

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Tu as grandi à Saint-Nom-La-Bretèche, dans les Yvelines. Vas-tu y repasser quand tu seras en France fin novembre ?

J'y ai vécu enfant, je n'y connais plus personne. J'adorerais montrer à mes amis d'aujourd'hui où j'ai grandi, mais ce n'est pas très pratique d'y aller. Je n'y suis retourné que deux fois ces 15 dernières années.

Tu expliquais dans une interview y avoir enterré des capsules temporelles. Tu as eu l'occasion de les récupérer depuis ?

Non, mais je sais exactement où elles sont ! J'avais envisagé de les ouvrir quand je suis retourné là-bas en 2008. Mais je devrais acheter une pelle et aller creuser dans le parc. Je ne veux me faire arrêter (rires) ! C'est marrant, je ne me souvenais pas en avoir parlé à qui que ce soit ! Ce serait une bonne idée de faire ça de nuit... Merci de me l'avoir rappelé ! Tu sais quoi ? Je vais le faire la prochaine fois que je viendrai en France ! J'adorerais savoir ce que j'avais caché dedans avec mon frère.

Chris Garneau sera en concert le 28 novembre au Badaboum, à Paris. TÊTU fait gagner deux places chacune aux deux premières personnes à envoyer un mail à [email protected]

Crédit photo : Matthew Placek