Caster Semenya, l'athlète hyperandrogène, sera obligée de suivre un traitement médical pour concourir

Par Nicolas Scheffer le 10/09/2020
Caster Semenya

Le tribunal fédéral de Lausanne a confirmé une décision du tribunal arbitral du sport. Il oblige Caster Semenya à prendre un traitement hormonal pour concourir au 800 mètres. Une "violation de ma dignité humaine", pour l'intéressée.

C'est une défaite. La justice suisse a confirmé, mardi 8 septembre que Caster Semenya devra prendre un traitement hormonal pour concourir le 800 mètres d'athlétisme. L'athlète Sud-Africaine de 29 ans est dans un bras de fer avec la Fédération internationale d'athlétisme depuis plus de 10 ans. Elle a annoncé qu'elle comptait envisager "tous les recours internationaux et nationaux".

"Pour les droits humains des femmes"

"Je refuse de laisser World Athletics me droguer ou m'empêcher d'être qui je suis", a-t-elle déclarée dans un communiqué. Elle veut se battre "pour les droits humains des femmes athlètes sur la piste et en dehors, jusqu'à ce que nous puissions courir aussi libres que nous sommes nées".

Depuis qu'elle a été remarquée en 2009, l'athlète a obtenu deux titres olympiques et trois titres mondiaux. Elle est devenue le symbole des athlètes hyperandrogènes, qui ont notamment un taux élevé de testostérone. La Fédération d'athlétisme a défini un seuil maximal de testostérone pour concourir avec les femmes, entre le 400 mètres et le mile (1609 mètres). Sauf que l'athlète, qui excelle au 800 mètres, le dépasse.

Une "violation de la dignité humaine"

Selon la Fédération, à qui la justice a donc donné raison, les femmes hyperandrogènes doivent donc faire baisser leur taux de testostérone par un traitement médical pour s'aligner sur les épreuves internationales. Caster Semenya y a vu une "discrimination" ainsi qu'une "violation de sa dignité humaine". Elle a dû subir des "tests de féminité" secrets après des débats sur son apparence physique. "Exclure les femmes athlètes ou mettre notre santé en danger simplement en raison de nos aptitudes naturelles place World Athletics du mauvais côté de l'histoire", a déclaré l'athlète.

"Il est communément admis qu'il est contraire à l'éthique de prescrire un traitement contre l'hyperandrogénisme si cet état de santé n'est pas reconnu comme pathologique", a souligné l'Association médicale mondiale (WMA). Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU est même intervenu en apportant un soutien unanime à Caster Semenya. Mais le tribunal fédéral de Lausane a fait prévaloir "l'équité des compétitions" comme "principal cardinal du sport".

Un "avantage insurmontable"

Il a considéré qu'un niveau élevé de testostérone, comparable à celui des hommes, donnait à l'athlète féminine un "avantage insurmontable". Certes, le tribunal a considéré qu'obliger une athlète de prendre un traitement hormonal constitue "sérieusement une atteinte au droit à l'intégrité physique". Mais selon les juges, les athlètes peuvent "librement refuser" le traitement, à condition de se retirer des compétitions. En attendant les recours, la championne envisage de basculer sur 200 mètres qui n'est pas concerné par ce règlement. Notamment en vue des Jeux Olympiques de Tokyo.

 

Crédit photo : Yann Caradec / Creative Commons