Quelque part entre le récit d'apprentissage sexuel et le drame romantique, le premier long-métrage de Harry Lighton, présenté au Festival de Cannes 2025 dans la section Un Certain Regard, séduit avec une plongée sans artifices dans l'univers du BDSM gay chez les amateurs de moto et de cuir.
Fort de plusieurs de courts-métrages, Harry Lighton inaugure sa trentaine avec un premier format long garanti d'en surprendre, voire d'en instruire, plus d'un. En lice dans la section Un Certain Regard du Festival de Cannes 2025, Pillion dépeint la rencontre décisive entre Colin, un jeune homme affable au quotidien plan-plan, et Ray, le leader taciturne mais envoûtant d'un groupe de motards gays. Au gré de moments passés ensemble, ce dernier va former son cadet à la soumission, lui ouvrant les portes d'un monde SM dont il ne soupçonnait pas l'existence.
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"C'est un film qui sera perçu comme provocateur uniquement pour ceux qui trouvent ça provoquant de montrer explicitement la sexualité gay, estime le jeune réalisateur britannique, qui pour ce projet s'est entouré de véritables motards homosexuels – présents dans le film dans des seconds rôles. Beaucoup de films ont voulu parler du BDSM avec ironie ou bien avec une sévérité qui enlève tout l'amusement et la tendresse qui font partie intégrante de cette communauté. Il fallait que Colin y trouve de la joie et que le public la ressente également."
Montrer le vrai, lutter contre les préjugés
Impeccablement interprété par Harry Melling (Dudley Dursley dans la saga Harry Potter), le novice Colin part donc à la découverte, scène après scène, de ses nouveaux kinks. Or Pillion se situe aux antipodes d'un Cinquante Nuances de Grey, optant pour une vision crue et peu érotisante des rapports sexuels entre ses deux protagonistes – et ce, en dépit du sex-appeal évident d'Alexander Skarsgård, inoubliable Eric dans True Blood, sous les traits de Ray.
"Mon intention était moins de rendre l'histoire sexy que d'explorer la façon dont le désir d'une personne peut émerger et être façonné lorsqu'elle entre en contact avec une autre personne et que leurs envies mutuelles s'entrechoquent, détaille Harry Lighton. On peut trouver des éléments excitants dans le film, mais je ne m'attarde pas sur des aspects érotiques comme dans d'autres films. Pas de plans serrés sur des mains qui se serrent fort ou ce genre de détails. Je voulais que ça semble authentique, sans vernis."
Bien que le jeune cinéaste estime s'être contenté d'une étude de personnages, impossible de ne pas y voir un joli message, à peine dissimulé dans une réplique : dans une scène-clé du film, Ray est convié à dîner chez les parents de Colin. Face à la mère de ce dernier, inquiète de leur dynamique domi-soumis, le motard lui lâche sans bégayer : "Ce n'est pas parce que ça vous met mal à l'aise que ce n'est pas bon pour votre fils. C'est une façon arriérée de penser." Et toc, les fermés d'esprit !
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Crédit photo : Memento