Huit jours avant la Marche des fiertés de Paris, le gouvernement a proposé aux associations de reporter le défilé ; une suggestion refusée à l'immense majorité, comme nous l’explique le conseiller régional Pierre Serne (EELV).
Hier soir, l’inter-LGBT était convoquée en urgence par le ministère de l’Intérieur pour discuter d’un éventuel report de la Marche des fiertés parisienne. Deux membres du cabinet de Bernard Cazeneuve ont expliqué aux associations LGBT que, la menace terroriste n’ayant jamais été aussi forte sur la capitale et sur les rassemblements LGBT, le gouvernement n’était pas en mesure d’assurer la sécurité des participants de la marche du 2 juillet, d’autant que les forces de l’ordre étaient déjà mobilisées sur tous les fronts dont l’Euro 2016.
La proposition – qui repousserait de fait la célébration des fiertés lesbiennes, gays, bis et trans au mois de septembre pour ne pas empiéter sur l’Euro 2016 et les vacances scolaires – a été immédiatement balayée par les associations LGBT. Celles-ci rejoignent en effet l’opinion défendue par Pierre Serne, élu à la commission LGBT d’Europe Écologie Les Verts et présent à la réunion : aux vues de l’intensité de la menace et après la tragédie d’Orlando, la Marche des fiertés de Paris ne doit pas passer au second plan derrière l’Euro 2016, et l’État ne peut se destituer de sa mission de protection des manifestants.
La sécurité : un argument récurrent contre les Marches des fiertés
D'autant que les explications sécuritaires invoquées par le ministère de l’Intérieur ne peuvent qu'entrer en résonance avec les prétextes évoqués par de nombreux gouvernements étrangers pour empêcher le maintien des manifestations LGBT sur leur sol. Récemment, la Turquie a ainsi vu la Pride d’Istanbul annulée pour une raison similaire, alors même que la manifestation s’était imposée comme l’une des plus importantes du genre dans le monde musulman. En 2007, comme nous le rappelle Pierre Serne, la Pologne fut d'ailleurs condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour avoir annulé la Gay Pride de Varsovie en 2005, sous couvert d’une raison sécuritaire. L’instance européenne avait conclu que le gouvernement polonais avait violé les articles 11, 13 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme garantissant la liberté de réunion et d’association, le droit à un recours effectif et l’interdiction de la discrimination.
En outre, reporter la Marche des fiertés de Paris de plusieurs mois serait une première en Europe occidentale ces dernières années. Cela serait également une catastrophe financière pour les associations organisatrices de la parade, ainsi que pour les participants qui ont déjà organisé leur venue à Paris depuis le reste de la France ou du monde. Sans compter que la date du 2 juillet retenue pour la Marche des fiertés avait déjà été proposée par la préfecture de police suite à un report imposé par le ministère ; cette nouvelle date ne faisait plus coïncider le défilé avec les commémorations des émeutes de Stonewall survenues en 1969 et augurant la naissance du militantisme homosexuel aux Etats-Unis.
Un signal négatif après la tragédie d'Orlando
Surtout, quelques jours après la fusillade du Pulse à Orlando, cette proposition de report apparaît comme un message de sédition à la menace terroriste. Pour autant, les associations sont tout à fait disposées à adapter le parcours et la durée de la Marche des fiertés aux exigences de sécurité qui seront émises par les autorités afin de garantir la sécurité des participants. Cette année, ces derniers joindront la célébration des fiertés LGBT à la commémoration des victimes d'Orlando. Une tragédie qui rappelle douloureusement l'importance de faire entendre sa voix contre la haine et les discriminations, comme le souligne Pierre Serne :
Plus que jamais nous devons montrer notre engagement, notre motivation et notre visibilité. Et a fortiori après Orlando : ce n’est pas l’heure de rentrer dans les placards et de se cacher, car ce serait envoyé un très mauvais message aux personnes LGBT et aux terroristes que de montrer que la terreur l’emporte.
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Crédit photo couverture À Nous Paris