Dans sa série intitulée "Bodyscape", le photographe français Ludovic Seth capture le corps masculin comme un paysage en cinquante nuances de peau.
Est-ce une cuisse ? Un bras ? Peut-être une chute de rein, qui sait. Les vignettes carrées de Ludovic Seth invitent à l'égarement, et aiguisent l'imagination, "car elles ne privilégient aucune direction de composition ou de lecture. N'induisant ni haut, ni bas".
Une exploration à fleur de peau qui s'aventure sur la courbe d'un Julien, dans la nuque d'un Paul. A flirter d'aussi près avec l'épiderme d'un inconnu, on se sentirait même un petit peu voyeur...
Qu'on y voie les méandres d'une rivière à sec, les sillons creusés par le vent sur des dunes, des gorges escarpées, de profondes vallées, des falaises abruptes ou de mornes plaines, m'intéresse bien plus que d'y voir d'emblée une épaule, une clavicule ou le creux d'un genou...
Bodyscape est une "série ouverte" née de la rencontre avec "un modèle qui n'appréciait pas particulièrement son physique" et pour lequel Ludovic Seth a voulu sortir des représentations classiques du nu pour "(re)faire connaissance avec ces parties du corps." Alimentée au gré des collaborations, la série se compose à ce jour d'une cinquantaine de photographies, pour laquelle une trentaine de modèles se sont glissés devant l'objectif de Ludovic.
Lui parle de "paysages du corps". Et ce n'est pas pour rien. Architecte de formation, c'est avec une approche plasticienne non dénuée de poésie qu'il décrit son travail :
Puissance, fragilité… force, douceur… tension, abandon… le corps masculin est un territoire d'expressions inépuisables. A chaque modèle, sa personnalité, sa sensibilité… à chaque corps, une part de beauté à révéler, une histoire à raconter. Mais si chacun est unique, ce voyage entrepris au coeur de la nudité de tous les corps, de tous les âges, est l’occasion de mesurer combien, au-delà des différences, nous sommes tous susceptibles d’être émus, et capables d’être interpellés dans notre rapport au corps, à notre propre corps, à travers la découverte du corps de l’autre…
Entre les cambrures et les plis, la peau reste le seul dénominateur commun qui permet à l'oeil agard de se repérer. En dissimulant volontairement le visage de ses modèles, Ludovic Seth a voulu "abollir la notion d'identité" pour offrir une "représentation intimement universelle du corps de chacun et de tous les hommes à la fois. On ne s'interroge pas sur le modèle, mais sur le corps."
Des clichés si sensibles qu'on s'attendrait presque à leur donner la chair de poule en soufflant délicatement sur leur surface.
J'aime à croire qu'on perçoit la réalité de la vie affleurant sous la peau, la tension ou le relâchement animant les mouvements et les formes... même si je n'en livre parcimonieusement que quelques fragments, comme autant de fenêtres ouvertes sur de précieux paysages.
Mi-fort, mi-fragile, le corps masculin y libère mille expressions, et flirte même avec l'abstraction.
Être gay a sans aucun doute été déterminant dans le fait de me consacrer quasi-exclusivement au nu masculin, étant plus particulièrement sensible au corps des hommes, aux émotions qu'il suggère, aux pulsions qu'il éveille.
Retrouvez les œuvres de Ludovic Seth sur son site internet, sa page Facebook ou son compte Instagram.
Pour en savoir plus :
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Couverture : © Ludovic Seth - Bodyscape