Dans sa décision, le juge Rabih Maalouf a refusé de criminaliser l'homosexualité des prévenus considérant qu'il s'agissait d'"un choix personnel, pas un délit".
Au Liban, neuf hommes comparaissaient jeudi 26 janvier 2017 devant le tribunal du Metn, un district à l'est de Beyrouth. Ils étaient accusés de prostitution, de trouble à l'ordre publique et d'homosexualité. Sur ce dernier point, le juge unique du Metn - Rabih Maalouf - a considéré que "l'homosexualité est un choix personnel, pas un délit", dans une décision qui fera jurisprudence. Au Liban, l'article 534 du code pénal stipule en effet que "les relations sexuelles contre nature sont punies d'emprisonnement pour une durée d'un mois à un an, et d'une amende entre 200 000 et un million de livres libanaises". Bien que l'homosexualité ne soit pas explicitement nommée, cet article est traditionnellement utilisé pour criminaliser les relations entre personnes du même sexe.
Un sentiment pas un délit
Pour rendre sa décision, le juge Rabih Maalouf s'est basé sur l'article 183 relatif au droit à la vie privée. Et de déclarer que le code pénal libanais ne peut s'appliquer dans cette affaire car "l'homosexualité est exercée comme un droit et de manière non abusive". En somme, l'homosexualité serait un sentiment et non un délit ou un crime comme le vol ou le meurtre et, de fait, ne peut être jugée à la lumière du code pénal, tant qu'elle se fait dans le respect d'autrui. C'est la quatrième fois qu'un juge libanais refuse de criminaliser l'homosexualité, laissant espérer une future dépénalisation.
La situation des personnes LGBT est très disparate au Liban. Bien que relativement acceptées à Beyrouth, elles restent stigmatisées dans le reste du pays voire au sein de leur propre famille. Il est encore impensable pour nombre d'entre-elles de s'ouvrir à leur parents et au travail. De fait, cette décision juridique sonne pour certains comme un pas de plus vers une reconnaissance sociale de l'homosexualité au Liban. La prochaine phase dans ce processus serait de voir abrogé l'article 534 du code pénal et ainsi dépénaliser l'homosexualité (laquelle a pourtant été retirée des maladies mentales par le Liban en 1990 suite aux recommandations de l'OMS). Dans un pays où la religion revêt une grande importance (18 confessions sont reconnues par l'Etat et sont représentées à l'Assemblée nationale), le mariage pour tous et l'adoption resteront encore longtemps des vœux pieux.
Photo de couverture : manifestation dans les rues de Beyrouth, le 15 mai 2016, pour réclamer la dépénalisation de l'homosexualité