Jérémy, 32 ans, est l'un de "celles et ceux que l'on entend peu ou que l'on écoute mal" et à qui le journaliste Axel Santoni donne la parole dans un portrait court mais bouleversant.
"J'ai enquêté, et j'ai mis un mois à trouver Jérémy grâce à l'association Aides", se remémore Axel Santoni face aux questions de Konbini. Ce journaliste parisien de 25 ans s'est lancé depuis peu dans un projet "qui lui ressemble" : raconter douze personnes au parcours atypiques. I Am prend la forme de portraits vidéo de seulement 3 minutes chacun afin de rendre accessibles des sujets qui le sont moins.
Après Emeric, animateur radio, et Elina, enfant de la DDASS devenue femme de la rue devenue comédienne et écrivain, Axel a rencontré Jérémy, de deux ans son cadet lorsqu'il a appris sa séropositivité :
Face caméra, le jeune homme se confie sur cet appel de son ex, sur sa mère qui a eu "un pas de recul" en apprenant sa sérologie, sur sa nièce qu'il n'osait plus toucher par peur de lui transmettre le virus, sur le rejet des autres homos qui lui ont donné l'impression "d'être la mort en personne". Au fil du portrait, on comprend finalement que l'ennemi n'est pas uniquement le virus. L'ennemi c'est aussi la sérophobie.
Car on le sait depuis 2008, mais c'est une idée qui peine à faire son chemin, une personne séropositive bien traitée et dont la charge virale est indétectable ne présente aucun risque de contamination pour autrui. Ce qui est malheureusement partagé, c'est le poids social, la culpabilisation - la sienne comme celle des autres - et globalement la discrimination, qui accompagne encore le quotidien des séropos.
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Jérémy a depuis accepté sa sérologie. Il est aussi devenu militant. À Aides il participe à des actions de prévention, de dépistage, et il accompagne d'autres personnes séropo. Le jeune homme emprunte pourtant la rhétorique d'une autre association, celle qui choisit le triangle rose pour logo, lorsqu'on lui demande quel message il a à faire passer : "Le savoir, c'est le pouvoir."
"Je voulais quelqu'un qui soit capable de nous parler du VIH au quotidien, du regard des autres, de la difficulté de construire des relations, chose que l'on entend trop peu", souligne Axel Santoni. Lui-même, qui a plusieurs amis séropotifs, a confié à Konbini avoir été "franchement touché par le courage de Jérémy et son envie de libérer la parole sur un sujet encore tabou." Il envisage de soumettre ses portraits aux festivals de court-métrage.
Couverture : crédit photo Axel Santoni/Facebook