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buzzMacron gay, le retour d'une rumeur homophobe derrière l'affaire Benalla

Par Youen Tanguy le 23/07/2018
macron gay

Avec l'affaire Benalla, du nom de l'ex-chargé de mission d'Emmanuel Macron accusé de violences, commentateurs et politiques n'hésitent pas à propager la rumeur d'une romance gay entre les deux hommes. Des "allusions clairement homophobes", pointe le président de SOS homophobie.

"Voilà pourquoi Benalla bénéficie de tels privilèges et d'une telle protection ?", s'interroge ouvertement Nadine Morano sur Twitter. Samedi, la députée européenne a partagé un prétendu article du Monde prêtant une relation gay à Emmanuel Macron et son ancien chargé de mission, au coeur d'une polémique depuis mercredi. Alexandre Benalla est soupçonné de s'être livré à des violences en marge d'une opération de police lors des manifestations du 1er mai.

Problème : l'article partagé par madame Morano n'a jamais existé. Le journaliste dont le nom apparaît dans le papier – Cédric Pietralunga – a d'ailleurs passé une partie de son week-end, et de son lundi, à répondre aux internautes qui le partageaient. La députée européenne a depuis supprimé son tweet.

Macron-Gallet, Macron-Benalla…

Si on n'attendait pas forcément mieux de Nadine Morano, d'autres commentateurs politiques, autrement plus sérieux, y sont eux aussi allés de leur petite remarque. C'est le cas du rédacteur en chef du service politique de Paris Match, Bruno Jeudy. Interrogé sur l'affaire, vendredi au micro de RMC, il lâche : "Sauf à découvrir que M. Benalla était plus qu’un proche du Président de la République, mais ça on n’en sait rien…" Réaction immédiate sur le plateau  d'un invité : "Plus qu’un proche, c’est tendancieux comme expression !". Et le journaliste de reprendre, sans terminer sa phrase : "J’ai dit : 'on ne sait pas'. On verra si c’est plus qu’un proche... On ne connaît pas exactement les liens de M. Benalla avec…".

https://twitter.com/GG_RMC/status/1020231007822327813

Outre les fake news et les sous-entendus hasardeux, plusieurs dessins circulent sur les réseaux sociaux depuis vendredi, l'un d'eux montrant Emmanuel Macron allongé sur un lit, à moitié nu, lancer à un Alexandre Benalla debout en caleçon : "Tu ne mets pas ton costume de policier ce soir ?". Une caricature signée Samaritain a elle aussi été largement partagée sur les réseaux sociaux, notamment par un élu (ex-FN) de la mairie de Montpellier.

La caricature homophobe, outil politique

"Ce sont des allusions clairement homophobes, s'agace le président de SOS homophobie, Joël Deumier, auprès de TÊTU. On condamne non seulement celles et ceux qui tiennent ces propos, mais aussi ceux qui les diffusent, jusque dans la communauté LGBT. Cela cultive et perpétue les clichés sur les homosexuels." Et de dénoncer une pratique malheureusement trop courante : "Dans l'histoire, ça s'est toujours fait pour dénigrer publiquement les hommes politiques. On utilise des figures moquées ou caricaturées comme celles de la prostituée ou de l'homosexuel, des figures perçues comme risibles".

La caricature homophobe est en effet régulièrement utilisée comme outil de critique politique. Dans le cas du dessin de Samaritain, Emmanuel Macron est représenté dans une posture de soumission, de femme ou de gay passif donc, ramenant à la trop populaire question : "Qui fait l'homme et qui fait la femme ?". Un propos tant homophobe que misogyne.

C'est aussi une façon de dépeindre un président déloyal, puisqu'il mentirait sur son orientation sexuelle. C'est bien connu, le mensonge est l'apanage des gays ou des bi. Mais au-delà des attaques à l'égard d'un homme politique, ce sont les clichés sur les homosexuels qui s'en trouvent renforcés. Car cette rumeur sur l'homosexualité du président, d'où qu'elle vienne, n'est répandue qu'à des fins de nuisance. Sociale ou, ici, politique. Ainsi, dire d'un homme politique qu'il est gay est trop souvent un moyen pour ses opposants de le discréditer politiquement, comme cela avait déjà été le cas pour Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017.

À l'époque, le candidat à la présidence de la République avait été la cible d'insistantes rumeurs lui prêtant une relation amoureuse avec l'ancien patron de Radio France, Mathieu Gallet. Des rumeurs auxquelles avait réagi le candidat sur la scène du théâtre Bobino le 6 février 2017 : "Pour mettre les pieds dans le plat, si dans les dîners en ville, si dans les boucles de mails, on vous dit que j'ai une double vie avec Mathieu Gallet ou qui que ce soit d'autre, c'est mon hologramme qui soudain m'a échappé mais ça ne peut pas être moi !".

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