Loi bioéthique : voici ce qu'il s'est passé pendant la première nuit de débat

Par Antoine Patinet le 25/09/2019
Loi Bioéthique

La première nuit de débats sur le projet de loi bioéthique et l'ouverture de la PMA pour toutes les femmes a eu lieu. Le climat était plutôt calme, même si quelques membres de l'opposition n'avaient apparemment pas compris la consigne...

Le marathon parlementaire sur le projet de loi bioéthique a démarré mardi à l'Assemblée, la ministre de la Santé vantant une "chance" pour la société face à une droite majoritairement hostile à la PMA pour toutes les femmes, mesure phare qui a suscité quelques expressions véhémentes.

Cette première réforme sociétale du quinquennat est "une chance et même un privilège pour notre société", a affirmé Agnès Buzyn au coup d'envoi des échanges sur ce texte très attendu. Pour la ministre, qui porte ce projet de loi avec Nicole Belloubet (Justice) et Frédérique Vidal (Recherche), il permet d'"adapter notre droit non pas à une société post-moderne (...) souvent fantasmée, mais à la société telle qu'elle est". Les "familles monoparentales et homoparentales existent déjà", a-t-elle souligné, repoussant cependant comme une "idée fausse" celle d'un "droit à l'enfant".

Outre l'extension de la PMA aux couples de lesbiennes et aux femmes célibataires, dès l'article 1er, le projet de loi aborde nombre d'autres sujets hautement sensibles: réforme de la filiation et de l'accès aux origines des enfants nés par don, autoconservation des ovocytes, recherche sur les cellules souches embryonnaires... La liberté de vote est de mise pour les députés.

"Une promesse d'égalité" 

Gouvernement comme majorité se défendent de faire de l'ouverture de la PMA un "combat", six ans après les débats enflammés sur le mariage des couples de même sexe.  Il s'agit de "concrétiser une promesse d'égalité", a promu Raphaël Gérard (LREM) quand des "marcheurs" ont fait part de leur propre expérience de recours à la PMA, tel Jacques Marilossian avec sa femme, dans un parcours de "plusieurs années".

 

Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, et avant lui de François Hollande - qui avait finalement renoncé pour ne pas mettre en danger le texte sur le mariage pour tous - la PMA pour toutes, que le gouvernement espère voir adoptée "avant l'été", a le soutien de la gauche. Mais à droite, ce n'est pas la même histoire...

Les Républicains veulent éviter de rejouer 2013

Une grande partie des députés LR sont vent debout contre une "PMA sans père". Ils estiment que le texte ouvre une "voie inéluctable" vers la légalisation de la gestation pour autrui (GPA), le gouvernement martelant qu'elle "demeure un interdit absolu en France". Ne voulant pas "refaire le match" du mariage pour tous, ils n'ont pas défendu de motion de rejet.

Seul élu LR favorable à l'ouverture de la PMA à avoir pris la parole mardi, Maxime Minot a dit s'être "senti pointé du doigt voire marginalisé". "Je me refuse de rester les yeux fermés devant ces situations complexes" de femmes "s'expatriant" pour des PMA, a-t-il lancé sous les applaudissements de la majorité.

 

Agnès Thill égale à elle-même

Si le patron des députés LR Christian Jacob a affirmé que l'état d'esprit dans ses rangs est que "le débat se passe correctement", ce n'était apparemment pas l'état d'esprit d'Agnès Thill. L'ex-LREM s'est lancée en soirée dans une diatribe contre une "loi criminelle" où sera inscrit "le père facultatif". "Qui êtes-vous pour vous permettre une telle mutilation?", a-t-elle lancé à Mme Buzyn.

"C'est souffrance contre souffrance", a-t-elle continué, "vous avez choisi d'apaiser une France en jetant de l'acide sur l'autre", croyant probablement que la loi bioéthique allait supprimer, à la manière de Thanos dans les Avengers, tous les papas de l'Hexagone.

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Marine Le Pen sort du silence

Longtemps silencieuse sur le sujet de la PMA pour toutes, Marine Le Pen (RN) était sortie de son mutisme la semaine dernière, assurant qu'elle était "opposée au texte" en l'état. Elle est donc montée à la tribune pour le faire savoir, et rassurer l'électorat hérité de son papa, Jean-Marie Le Pen. Ce dernier s'était lui même étonnamment déclaré favorable à l'ouverture de la PMA pour toutes... pour éviter le grand remplacement.

L'intervention à la tribune de Marine Le Pen a provoqué un moment de tension dans l'hémicycle, la députée du Pas-de-Calais répétant son opposition à une PMA ouvrant "la boîte de Pandore". "Un enfant a le droit d'avoir un père, même s'il ne le connaît pas", a-t-elle assuré, reprochant de graver "un mensonge légal" avec l'absence de père.

La majorité a fait "le pari" de débats sereins et estimé que ceux qui voudraient "enflammer l'hémicycle" seraient "à côté de la plaque". Apparemment, certains n'ont pas compris la consigne...

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(Avec AFP) 

 

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