Sidaction publie ce mercredi son sondage annuel qui met en lumière une dégradation de la prévention sur le VIH-sida auprès des jeunes. Près d'un quart n'a jamais reçu d'information spécifique sur le sujet au cours de sa scolarité.
"Le sentiment d'information des jeunes sur le VIH/sida se détériore à vitesse grand V, connaissances sur le VIH/sida, moyens de prévention et santé sexuelle, tous les indicateurs sont au rouge !" Comme chaque année, Sidaction a publié mercredi 24 juin un sondage conduit par l'institut Ifop en partenariat avec le groupe Bilendi, intitulé "Les jeunes, l’information et la prévention du virus du sida". Et le constat est alarmant. Ainsi, 29 % des jeunes Français d'entre 15 et 24 ans considèrent qu'il existe des médicaments pour guérir du sida, soit une augmentation de 6 points par rapport à l'an dernier - alors qu'il n'existe pour l'heure ni vaccin, ni cure.
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Peut-être plus inquiétant encore, plus d'un quart des jeunes Français (26 %) s'estiment mal informés sur le VIH et le sida, un chiffre qui a baissé de 15 points depuis une dizaines d'années. "Plus de dix ans après le premier sondage commandé par Sidaction, c'est le chiffre le plus bas jamais atteint, déplore Florence Thune, directrice générale de l'association de lutte contre le VIH. Depuis 2009, le sentiment d'information des jeunes a drastiquement diminué." Ainsi, seuls 15 % des sondés assimilent le VIH à un virus et non un maladie... 31 points de moins qu'il y a deux ans.
Baisse de la prévention à l'école
Comment expliquer cette détérioriation de l'information auprès des plus jeunes ? "Avec l’arrivée des traitements à la fin années 1990, on a eu une prévention à deux niveaux, explique Aurélien Beaucamp, président de l'association Aides, auprès de TÊTU. Une prévention à destination des jeunes, qui a baissé. Quand j’étais au lycée, on était matraqués d'informations sur le virus, la capote. J’ai commencé ma vie sexuelle avc ça. Avec l’arrivée des traitements, on a moins investi dans la prévention chez les jeunes. Les associations se sont dit qu'elles allaient faire davantage de prévention auprès des populations fragiles. Pour moi l’erreur est là. La prévention chez les jeunes n’est pas au niveau. Le gouvernement doit prendre ses responsabilités."
Le militant précise toutefois que "les jeunes ne sont pas un public vulnérable en particulier" face au VIH mais que, s'ils font partie des populations les plus fragiles (personnes LGBT+, migrants ou encore usagers de drogues), qui ont un moindre accès à la santé, le manque d'information devient problématique. D'après le sondage conduit par l'Ifop et Bilendi, 22 % des personnages interrogées disent n'avoir jamais bénéficié "d'un enseignement ou d'un moment d'information spécifique sur le VIH, le virus du sida, ses modes de transmission, ses traitements et sa prévention" au cours de leur scolarité. Un chiffre qui a accusé une hausse continue depuis dix ans et qui a doublé depuis 2012.
Et le manque des moyens des activistes qui se battent contre le VIH ne devrait pas arranger les choses. Ce mercredi, Florence Thune a publié dans Libération une tribune intitulée "La lutte contre le sida est en danger". Alors que le week-end de mobilisation de Sidaction prévu en avril, qui lui permet chaque année de rassembler plus de 4 millions de promesses de dons, a dû être annulé à cause du Covid-19. Pour tenter de rectifier le tir, l'association organise jeudi 25 juin une soirée "100 ans de comédies musicales : les stars chantent pour Sidaction", retransmise sur France 2.
"Syndrome du super-héros"
Déjà, dimanche 21 juin, Françoise Barré-Sinoussi, prix de Nobel de médecine, présidente du Sidaction et du Comité analyse recherche et expertise (Care) chargée de conseiller le gouvernement sur les traitements contre le coronavirus, s'inquiétait dans un entretien accordé au Journal du dimanche d'un relâchement dans la lutte contre le VIH : "De très nombreux jeunes pensent encore qu’on peut guérir du sida ! Et leur conscience du danger se relâche. L’Éducation nationale se désintéresse de cette question. Mon message, c’est : « Protégez-vous ! »"
La baisse du niveau de prévention a pour conséquence logique une moindre conscience des risques. En effet, le sondage Ifop-Bilendi pour Sidaction montre que 31 % des 15-24 ans considèrent être moins exposés que les autres à l'infection au VIH, soit 10 points de plus qu'en 2009. "Ils souffrent du syndrome du super-héros : ils se sentent invincibles face au virus du sida, analyse Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop. Cela peut s'expliquer par la raréfaction du VIH/sida dans l'espace médiatique et l'insuffisance de l'information auprès des jeunes. Cela pourrait s'aggraver avec l'omniprésence du coronavirus dans les médias actuellement." Seule bonne nouvelle du sondage, relève Sidaction : 27 % des jeunes se sont fait dépister au cours de l'année, soit cinq points de plus en un an.
Sondage Ifop-Bilendi réalisé par questionnaire auto-administré en ligne du 19 au 25 février 2020 auprès de 1.003 personnes, représentatives de la population française âgée de 15 à 24 ans.
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