télévisionQui est Ezra, le chanteur gitan ouvertement gay qui a séduit "La France a un incroyable talent" ?

Par Florian Ques le 28/10/2020
Ezra

Lors du deuxième prime de la saison, sa voix subtilement éraillée et sa composition originale engagée ont ému les juges de l'émission. Rencontre avec Ezra, le jeune artiste qui veut rendre à la communauté LGBTQ+ tout ce qu'elle lui a apporté.

Un trémolo sincère et maîtrisé. Un sourire authentique. Et, surtout, une volonté imparable de soutenir une communauté trop longtemps bridée. Voilà les armes avec lesquelles s'est pointé Ezra, ce mardi 27 octobre sur le plateau de La France a un incroyable talent. Sur scène, guitare sous le bras, ce jeune musicien marseillais a touché les juges en interprétant "Je m'appelle courage". Une chanson écrite par ses soins, conçue comme un hymne d'empouvoirement pour les personnes victimes de LGBTphobies.

"C'était interdit"

Après deux tentatives pour rejoindre un autre télé-crochet bien connu appelé The Voice, Ezra finit par se replier sur l'émission de M6. Une bénédiction pour le chanteur en herbe. "J'ai voulu faire cette émission parce que c'est un rêve depuis tout petit, nous confie-t-il par téléphone. Puis, grâce à elle, j'ai pu interpréter ma propre chanson et faire passer un message d'aide aux personnes qui sont dans la même situation que moi quelques années plus tôt". Car s'il est tout sourire durant son prime, ça n'a pas toujours été le cas.

Durant sa vidéo de présentation, Ezra se remémore le moment où il a pris conscience de son attirance pour la gent masculine. Il s'agissait de son premier coup de cœur : Thierry Amiel, finaliste de la première édition de Nouvelle Star. Mais sa prise de conscience est vite ternie par son entourage. "J'avais demandé s'il était possible de trouver un garçon beau, se souvient-il. Et on m'avait dit qu'il ne fallait pas dire ça, que c'était interdit. Toute ma vie, j'ai grandi avec un tas de réactions homophobes qui me faisaient me renfermer sur moi-même". Il évoque ensuite des années collège délicates, où il se comportait lui-même de façon homophobe, "même si je savais que j'étais comme eux". Désormais, le plus difficile est derrière lui.

Ancien du Refuge

En septembre 2017, Ezra passe un coup de fil à l'association Le Refuge. "Parce que j'étais à bout, nous détaille-t-il. J'en avais marre de rester chez moi tout seul, de ne plus sortir, d'avoir pris 50 kilos et d'avoir honte de moi". Avant de commettre l'irréparable, il décide de tendre la main une dernière fois. Un acte salvateur pour ce jeune musicien. "On m'a redirigé vers l'antenne marseillaise du Refuge, décrit-il. Là-bas, un jeune m'a ouvert la porte et m'a accueilli. Il y avait un clip qui passait à la télé. Il m'a demandé si je trouvais le chanteur mignon. Et là, j'ai eu un déclic. J'ai enfin pu être qui je suis depuis le début".

Désormais, Ezra ne cache plus son homosexualité et est pleinement soutenue par sa mère, avec qui il entretient une relation fusionnelle. "On a seize ans d'écart, c'est comme une grande sœur, assure le chanteur de 25 ans. Ma mère m'a donné la vie une première fois, puis une deuxième fois quand elle m'a accepté après mon coming out".

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La musique dès la naissance

Même si la situation n'est pas encore au beau fixe, Ezra ne désespère pas. Au contraire, il est convaincu que les mentalités vont évoluer, à leur rythme. "Je pense qu'il y a surtout un gros manque de connaissance, fait-il remarquer. On ne leur a pas expliqué ce qu'était l'homosexualité. Si on leur explique au fur et à mesure des générations, ça peut évoluer". Constat similaire à l'égard de Marseille, la ville qui l'a vu grandir tout au long de sa vie. "C'est la ville de la diversité parce qu'il y a beaucoup de communautés qui se mélangent, reconnaît-il. Et malheureusement oui, il y a beaucoup d'homophobie ambiante mais je pense que ces mentalités sont en train de changer".

En attendant, Ezra, lui, sait bien s'entourer. Et trouve du plaisir dans sa passion de toujours : la musique. "Je chante depuis que je suis tout gamin à la maison, confirme le jeune musicien. Dans ma communauté gitane, on chante beaucoup. C'est l'amour de la musique dès la naissance". Autodidacte, il s'est formé à la guitare comme au piano grâce à YouTube. Mais aujourd'hui, il est prêt à prendre du galon et à passer à l'étape supérieure. "J'attends de voir si l'émission va m'ouvrir de nouvelles portes", espère-t-il. On ne peut que lui souhaiter.

Crédit photo : Lou Breton/M6