Noël approche et vous ne savez pas comment vous faire plaisir ou quoi offrir à vos proches ? têtu· vous propose une sélection d’ouvrages queers et féministes sortis en 2022.
Si vous pensez avoir raté une partie des ouvrages queers sortis en 2022, alors voilà qui devrait vous être utile. Des mères sociales au mouvement MeToo, en passant par des récits personnels d'enfances queers ou des histoires amoureuses, on vous propose dix ouvrages à lire, à offrir, en fonction des intérêts de chacun·e.
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Terres frontalières : la Frontera, la nouvelle Mestiza
Une des premières autrices à avoir conceptualisé le mot "queer" s’appelle Gloria Anzaldùa (1942-2004). Et il aura fallu attendre 2022 pour que ses textes soient traduits dans leur intégralité en français. Terres frontalières : la Frontera, la nouvelle Mestiza est un ouvrage poétique qui contient également une biographie de l’autrice. On y découvre son combat au sein du milieu féministe et racisé aux États-Unis, mais aussi ses luttes contre son corps malade et son usage du mot "queer", dont elle va user pour se décrire avant de le politiser.
Gloria Anzaldùa a aussi beaucoup travaillé sur l’image des frontières, aussi bien dans la culture hispanique qu’autour des lesbiennes évoluant dans un monde hétéronormé. Pour elle, ces “terres frontalières” permettent de construire une identité nouvelle et de nouveaux territoires.
>> Terres frontalières : la Frontera, la nouvelle Mestiza, Gloria Anzaldùa. Éditions Cambourakis, 24 euros.
S’il suffisait qu’on s’aime, Chronique des années “PMA pour toutes”
Dans un autre univers mais avec cette même volonté de se battre pour exister, Daphné et Julie Guillot reviennent quant à elles sur leur désir de devenir mères. Cette histoire pourrait être celle de n’importe quel couple lesbien qui s’aime et qui veut un enfant. Au fil des pages, les deux femmes racontent leurs démarches médicales, leurs relations avec leurs familles et leurs amis, mais aussi leurs espoirs déçus et les échecs de leurs fécondations in vitro (FIV).
Daphné et Julie Guillot, respectivement autrice et dessinatrice de ce roman graphique, ont choisi de situer l’histoire pendant les années de lutte pour l'ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes. Elles racontent comment, pendant huit ans, alors que la société se déchirait pour savoir si les lesbiennes avaient ou non le droit d’être mères, elles se sont battues pour avoir un enfant.
Un ouvrage tendre, militant et féministe qu'on adore et qui rappelle à quel point le combat a été rude pour obtenir la PMA pour toutes – une loi qui, hélas, exclut toujours une partie des personnes trans et le don de gamètes entre conjoint·es.
>> S’il suffisait qu’on s’aime, Chronique des années “PMA pour toutes” de Daphné et Julie Guillot. Edition Steinkis, 25 euros
Le Cri des cœurs
Une fois leurs enfants nés, d’autres difficultés viennent parsemer la vie des couples lesbiens. Pour tenter de faire entendre les voix de celles qu’on appelle les “mères sociales”, l’association Les Enfants d’Arc en Ciel sort un livret de témoignages qui rappelle à quel point l'absence de droits pour ces mères lesbiennes rend vulnérables leurs enfants. L’intégralité des bénéfices générés par la vente du livre sera donc reversée à celles qui, privées des enfants qu'elles ont participé à élever, se battent pour les retrouver.
>> Le Cri des cœurs, édité par Les Enfants d’Arc en ciel, est disponible à la vente sur le site de l’association. 15 euros (expédition comprise) ou 10 euros en tarif solidaire.
L’Évaporée
Que faire et comment avancer quand, du jour au lendemain, la personne avec qui vous partagez votre vie part sans explication ? C’est le point de départ de L’Évaporée, un roman écrit à quatre mains par Wendy Delorme et Fanny Chiarello. L’histoire bouleversante de Jenny et Eve y est racontée à travers un processus littéraire original, qui donne les points de vue de chacune des protagonistes. Celui de celle qui est quittée : “La femme avec qui j’étais heureuse et pensais finir ma vie m’a abandonnée sans explication, il y a deux mois. J’invente chaque jour de nouveaux subterfuges pour tenir.”
Mais également celui de celle qui est partie. “Je n’ai jamais su quitter. Je n’ai jamais su partir. Je me suis fait miroiter des possibles infinis, j’ai eu des enthousiasmes, pour une ville, une peau, un sourire, un regard, une forêt, l’odeur particulière quelque part dans la Drôme d’un village tout penché au coteau d’une colline.”
>> L’Évaporée, de Wendy Delorme et Fanny Chiarello. Édition cambourakis, 18 euros.
Gender Flou
La binarité de genre est ancrée dans nos sociétés, y compris dans nos communautés LGBTQ+. De fait, accepter son coming in [l'acceptation par soi-même de sa propre sexualité] non-binaire s’accompagne souvent de flou.
Avec ce roman graphique, l’auteurice Tamos le Thermos revient sur son cheminement personnel et fait part de la difficulté d'exister dans un monde binaire – comme ce moment à la piscine où iel souligne que les “maillots non-binaires, ça n’existe pas”, ou lors d’un verre avec des amis où iel prend pleinement conscience de son corps : “Tout le monde le voit comme un corps de femme (...) C’est mon corps. Le corps de Tam. Pas un corps de femme.”
>> Gender Flou, Tamos le Thermos. Édition exemplaire, 19 euros.
Assignée garçon : Ambiance trans de feu
Autre difficulté dans une société de plus en plus crispée sur nos combats, grandir en se sachant trans. Le personnage de Stéphie, elle, a décidé d’en rire. À travers une succession d’aventures, cette jeune enfant trans "née pour anéantir les transphobes” s’amuse ainsi à déconstruire l’hétéronormativité.
Avec humour et pédagogie, l’autrice Sophie Labelle dédramatise et s’amuse des clichés qui collent à la peau des enfants trans, comme dans ce dialogue entre deux enfants : “ – Mais comment tu connais tout ça ? Tous ces trucs de fille. T’es pas née un garçon ? – Non je suis née avec certains organes qui ont fait croire au docteur que j’étais un garçon. Il y a une différence. – Oh pardon. – Dis-le à personne. J’ai tout appris sur Youtube.”
>> Assignée garçon : Ambiance trans de feu, Sophie Labelle. Edition Dent-de-lion, 45 euros.
Moi aussi MeToo, au-delà du hashtag
Autre combat mené ces dernières années : la lutte contre les violences de genre. Cinq ans après Metoo, quels sont les avancées, les retours en arrière et les angles morts ? .
L'essai Moi aussi MeToo au-delà du hashtag, est un ouvrage collectif écrit sous la direction de Rose Lamy, où neuf auteurices – parmi lesquelles Angèle, Rokhaya Diallo, Louz ou encore Lexie – racontent leur rapport à ce mouvement.
>> Moi aussi MeToo, au-delà du hashtag, ouvrage collectif. Éditions JC Lattès, 19 euros.
Amours silenciées, Repenser la révolution romantique depuis les marges
Second livre concernant Metoo et cette fois signé Christelle Murhula, Amours silenciées, qui invite à repenser les révolutions romantiques depuis les marges, s'interroge aussi sur la manière dont le racisme est souvent laissé de côté par les féministes.
“Dans le schéma de la théorie du lesbianisme politique, les femmes noires en particulier et les femmes racisées en général n'existent pas. (...) Si cette comparaison femmes/esclaves est possible, c’est parce que ces femmes, garantes de la théorie du lesbianisme politique, sont confrontées à deux systèmes d’oppression : le patriarcat et le capitalisme. La race, pour elles, n’existe pas.”
>> Amours silenciées, Repenser la révolution romantique depuis les marges, Christelle Murhala. Éditions Daronnes, 18 euros.
Virginia Woolf
Liuba Gabriele s’est intéressée à Virginia Woolf, une des principales figures de la littérature anglaise et féministe. À travers une succession de scènes de vie, l’autrice nous guide dans les œuvres de cette femme de lettres exceptionnelle, mais aussi dans son intimité en évoquant, entre autres, son histoire d’amour avec Vita Sackville-West. Un roman graphique doux et poétique qui souligne aussi la difficulté à ne pas rentrer dans les normes hétérosexuelles.
>> Virginia Woolf, Liuba Gabriele. Editions Des ronds dans l’O, 20 euros.
Mère Lachaise
On continue avec les livres mettant en lumière des femmes lesbiennes avec l’ouvrage Mère Lachaise, qui comporte cents portraits de femmes dont la sépulture se trouve au Père Lachaise. L’autrice Camille Paix mentionne des femmes souvent méconnues, comme la poétesse Nella Nobili (1926 – 1985) ou encore Marie Souvestre (1835 - 1905), qui, ouvertement lesbienne et en couple avec Caroline Dussaut, a lancé un établissement d’enseignement non confessionnel pour les femmes, à une époque où ce dernier n’était pas ouvert aux filles.
>> Mère Lachaise. 100 portraits pour déterrer le matrimoine funéraire, Camille Paix. Edition Cambourakis, 19 euros.
Bonus et coup de cœur spécial pour Azadi
Comment proposer une sélection de Noël cette année sans penser aux Iranien·nes en lutte pour leurs droits ?
Azadi – "Liberté" en persan – est un ouvrage sorti en 2015 qui revient sur la révolution verte de 2009. Saïdeh Pakravan y décrit, à travers le regard de plusieurs personnages, comment la République islamique d'Iran broie une jeunesse rêvant de liberté et d’une vie ordinaire. Un livre essentiel, militant et fort qui résonne fortement avec la révolution féministe en cours, au slogan de “zan zendegi azadi” – "femme, vie, liberté". Attention toutefois, ce livre comprend des scènes de violences, dont des violences sexuelles.
>> Azadi, Saïdeh Pakravan. Edition Belfond, 19 euros.
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