Un peu plus de six ans après le sacre de La La Land, son réalisateur Damien Chazelle signe une nouvelle déclaration d'amour au cinéma américain avec son nouveau film, Babylon, à l'image de la démesure du Hollywood des années 1920.
Pour son cinquième long-métrage, le réalisateur américano-français Damien Chazelle a décidé de remonter le temps et de nous transporter au coeur des années 1920, à Los Angeles (États-Unis). Les grands studios hollywoodiens s'apprêtent alors à révolutionner l'industrie du cinéma avec l'apparition des premiers films parlants. Une révolution technique, mais aussi économique et humaine. Telle est l'odyssée qu'entreprend de nous conter le cinéaste avec Babylon, au cinéma ce mercredi 18 janvier.
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Ce film choral de plus de trois heures entrelace les destins de plusieurs personnages : Nellie (Margot Robbie), actrice en herbe pugnace et rebelle, Jack (Brad Pitt), bourreau des cœurs et star au sommet, Manny (Diego Calva), petite main du business qui rêve d'en prendre le contrôle... Autant de protagonistes dont l'ambition, démesurée, menace de les dévorer.
La Babylon du cinéma mondial
Avec son budget d'environ 80 millions de dollars, Babylon s'impose comme l'un des rares longs-métrages originaux contemporains – comprendre : qui ne fait pas partie d'une franchise existante à la Avatar ou Marvel – à être aussi grassement financé. Et ça se ressent ! Dès le premier acte, le film donne le ton avec une fête privée décadente, sorte d'orgie grandiose sans limite ni pudeur. C'est opulent, démesuré, effréné, radical. En bref : spectaculaire. Pour autant, et malgré sa grandeur vertigineuse, Babylon est un film personnel et sensible dans lequel Damien Chazelle interroge son obsession du cinéma.
Nouveau visage enjôleur du Hollywood d'aujourd'hui, Margot Robbie livre une interprétation remarquable du personnage de Nellie, de ses débuts ahurissants à son déclin bouleversant. Qui permet au passage une juste critique de la politique des studios envers les acteurs. À la fois sombre et lumineux, le Babylon de Damien Chazelle explore de l'intérieur et sans concessions la machine à rêves et à broyer qu'est l'industrie du cinéma hollywoodien de cette époque.
Une actrice lesbienne iconique
À l'écran, la comédienne Li Jun Li (Wu Assassins) endosse le rôle de Lady Fay Zhu, une chanteuse de cabaret sino-américaine inspirée d'une véritable personnalité des années folles : Anna May Wong, la première actrice d'origine chinoise à avoir connu la notoriété aux États-Unis, mais dont la carrière fut marquée par le racisme dont elle fut victime. "En me renseignant sur tout ce qu'elle a enduré cent ans plus tôt, puisqu'elle était la seule actrice d'origine chinoise dans cette industrie, j'ai eu le cœur brisé, confie son interprète à têtu·. En tant que personne racisée et concernée, je vois bien que cette discrimination existe encore en sous-texte aujourd'hui. C'est un combat encore d'actualité."
Le personnage de Lady Fay Zhu, comme Anna May Wong, est attiré par la gent féminine. Dès la scène d'ouverture, elle interprète d'ailleurs une chanson aux paroles équivoques avant d'embrasser une inconnue présente dans la foule et d'être vivement applaudie. "Sa sexualité n'est acceptable que si elle est de l'ordre du divertissement, fait remarquer Li Jun Li. En vérité, elle est totalement fétichisée, que ce soit pour ses origines ou pour son orientation sexuelle. Elle est toujours cataloguée comme la Chinoise, alors qu'elle est née en Amérique, et elle a dû jouer sur cette fascination pour bâtir sa carrière et rencontrer le succès."
Bien plus qu'un récit scabreux et généreux – peut-être trop pour certains –, Babylon est une réussite dans son exploration sans fard d'un âge d'or révolu, qui permet de mesurer les changements et les évolutions d'Hollywood – bien qu'il reste de nombreux efforts à faire en termes de diversité. "Je pense qu'il y a encore un tas de comédiens et de comédiennes qui refusent de sortir du placard par peur d'obtenir moins de rôles, estime Li Jun Li. Mais en parallèle de ça, je pense aussi que beaucoup de progrès ont été accomplis, surtout durant ces dix dernières années."
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Crédit photo : Paramount Pictures
