La série norvégienne Le monde est à moi, à retrouver sur Arte, suit le parcours d'Odile, une femme métisse lesbienne qui espère percer dans le rap. À elle de trouver le courage de faire du rêve une réalité.
Odile a tout pour réussir : son rap dépote, dénonce le racisme et l'hypocrisie. Tous ses amis lui disent : il faut qu'elle publie ses titres. Mais Odile reste bloquée sur la ligne de départ. La mini-série norvégienne Le monde est à moi, diffusée sur Arte, suit pendant six épisodes cette trentenaire métisse partagée entre un art où elle exprime son amour des femmes et une vie dans le placard. Ça lance de grands "je préfère lutter plutôt que capituler", mais lorsqu'elle fait face à une micro-agression raciste, elle baisse la tête et passe son chemin. À la croisée d'enjeux intersectionnels, il lui faudra prendre position et oser embrasser l'ensemble de ses identités. La réalisatrice et scénariste Amy Black Ndiaye tient aussi le premier rôle, délivrant le portrait d'une femme complexe en prise avec ses contradictions.
Alors oui, elle se promène en tee-shirt/basket et casquette à l'envers, dans une attitude de rappeuse très masc, mais sortir un single à base de "je carbure au cunni, mais jamais au salami", c'est une autre histoire. Elle a une copine, qui lui propose d'ailleurs de prendre un appart ensemble, mais Odile est incapable de s'engager ou de lui montrer le moindre signe d'attachement. Coincée dans son placard, elle peine à se projeter, terrifiée qu'elle est à l'idée de faire son coming out à son père, musulman pieux, par crainte de le décevoir et d'être rejetée. "Je ne trouve pas le sommeil, mais j'ai la sensation d'être endormie, tourmentée par une chose que j'aurais dû t'avouer. Ça déborde. Paralysée par la peur, c'est game over", scande-t-elle dans l'intimité du studio.
Sans coming out, pas d'EP
Le milieu lesbien de sa ville n'est pas de grand secours : Odile ne se sent pas non plus pleinement à l'aise dans cet entourage très blanc où personne ne semble comprendre ce qu'elle vit. Car ce qui manque à la rappeuse, c'est bien d'être comprise sans avoir besoin de faire de la pédagogie. Alors elle se déchaîne au studio sur un flow percutant, politique et combatif. Ses textes viennent de ses tripes, touchent à l'intime et parlent de son vécu de femme noire lesbienne, de ses idylles, de ses coups d'un soir… Mais pas encore d'EP, pas d'album, rien.
Tout l'enjeu de la série repose sur la conciliation des différentes identités d'Odile. Mais comment réussir à être en phase avec soi-même si elle n'associe pas l'acte aux mots ? Bien qu'il ne s'agisse pas d'un récit de passage à l'âge adulte, on voit la protagoniste grandir et s'affirmer tout au long des épisodes, portée par sa passion.
>> Le monde est à moi, d'Amy Black Ndiaye. Déjà disponible sur Arte.
Crédit photo : Arte