En sélection officielle du Festival de Cannes 2025, Fuori ressuscite la figure de Goliarda Sapienza, l'autrice italienne du célèbre L'Art de la joie, en revenant sur sa relation avec une certaine Roberta, rencontrée en prison, entre amitié et désir.
Si La Petite Dernière et The History of Sound s'érigent comme les deux films queers immanquables de la sélection officielle du Festival de Cannes 2025, il serait dommage de passer à côté du très bon Fuori. Avec une bonne trentaine de films à son actif, le réalisateur italien Mario Martone trouve le moyen de surprendre grâce à cette chronique intime à l'écho féministe où il ressuscite la comédienne et écrivaine italienne Goliarda Sapienza, connue pour L'Art de la joie, immense succès littéraire publié de façon posthume en 1998.
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Pour autant, ce n'est pas sur ce roman que Fuori s'attarde mais plutôt sur L'Université de Rebbibia et Les Certitudes du doute, deux autres livres moins connus et plus autobiographiques où feu l'autrice couche sur papier une période-clé de sa trajectoire singulière. Le film débute ainsi sur son incarcération pendant cinq jours après qu'elle a dérobé des bijoux à une connaissance – nous sommes en 1980 et Goliarda Sapienza est alors ruinée. Jamais voyeuriste, la caméra de Mario Martone nous montre alors des scènes de vie au sein du pénitencier pour femmes où elle est enfermée.
Une femme libre à tous les niveaux
Mais le film s'attarde surtout sur l'après-prison – "fuori" signifie "dehors" en italien –, alors que Goliarda reprend contact avec Roberta (Matilda De Angelis), une jeune détenue héroïnomane, électron libre au passé trouble. Entre les deux femmes se noue une relation aux couches multiples : on y distingue du respect, de la fascination, parfois une amitié très forte, d'autres fois un potentiel amoureux… Là où sa cadette semble être taraudée par la naissance d'un désir lesbien qu'elle peine à apprivoiser, Goliarda, elle, apparaît comme ouverte, prête à expérimenter.
C'est à travers elle que Fuori prend tout son sens. Interprété avec maestria par Valeria Golino (Portrait de la jeune fille en feu), le personnage devient vite source d'inspiration dans sa manière de jouir d'une liberté que son époque n'encourage pas. Passée de comédienne à écrivaine, associée au mouvement socialiste anarchiste de son pays, un temps coupée du monde pour se consacrer à son art, Goliarda Sapienza apparaît comme une figure insaisissable, indéniablement queer, qui se laisse porter par ses envies et ses instincts.
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Crédit photos : Le Pacte