mariageL'Australie jouera bien le mariage pour tous par vote postal

Par Julie Baret le 09/08/2017
Australie vote postal mariage pour tous

Mis à jour le 7 septembre 2017 à 12h26. La Cour suprême australienne a confirmé aujourd'hui la tenue d'un vote postal volontaire vis-à-vis du mariage pour tous en Australie. À partir du mardi 12 septembre 2017, chaque électeur inscrit sur les listes électorales recevra par la poste un nécessaire de vote afin de répondre à la question : "La loi doit-elle changer pour permettre aux couples de même sexe de se marier ?" Le Human Rights Center Law, qui milite pour l'égalité devant le mariage et qui s'oppose à ce vote postal "complètement inutile" selon lui, a appelé à "voter oui par amour". Le Premier ministre Malcolm Turnbull a confirmé que sa femme et lui-même voteront également pour l'ouverture du mariage et encourage autrui à faire de même. Les formulaires pourront être renvoyés jusqu'au 7 novembre et les résultats - décidant si la question sera portée ou non devant le Parlement avant la fin de l'année - seront dévoilés le 15 novembre 2017.

Une nouvelle couche de fumée vient entourer l'hypothétique égalité devant le mariage en Australie. Le Premier ministre propose désormais un vote postal.

Ce matin, le Sénat australien, dominé par les partis d'opposition, a de nouveau refusé l'organisation d'un plébiscite concernant la légalisation nationale du mariage pour tous. L'idée de cette consultation populaire et obligatoire avait été avancée par le gouvernement en septembre 2016 pour échapper à un vote direct au Parlement. Mais les travaillistes et les écologistes, favorables à cette dernière option, lui reprochèrent immédiatement son coût (estimé à 138 millions de dollars australiens) et les préjudices qu'elle causerait à la population LGBT ainsi qu’aux enfants de familles homoparentales qui « n’ont pas besoin d’aller à l’école dans le climat d’un plébiscite où la relation qui unit leurs parents est contestée », comme le soulevait alors le leader de l'opposition Bill Shorten.
Anticipant ce nouveau refus, le Premier ministre australien, Malcolm Turnbull, a donc avancé un nouveau pion en annonçant hier l'organisation d'un vote par voie postale en cas de vote défavorable au Sénat : chaque citoyen·ne recevrait un nécessaire de vote à son domicile à partir du 12 septembre et pourrait envoyer son intention avant le 15 novembre.

Une nouvelle étape incertaine

Or ce "plan B" apparaît surtout comme un nouveau croche-patte sur le chemin de l'ouverture du mariage, car si une majorité de lettres favorables au mariage est reçue, la loi ne sera pas adoptée. Le gouvernement s'engage simplement à porter un projet de loi devant les députés australiens, comme cela est déjà réclamé par l'opposition; il n'entreprendra rien si, à l'inverse, le non l'emporte par courrier. En outre, ce vote par voie postale, qui exclut de facto toute personne sans domicile fixe, est aussi restreint aux limites du volontariat.
"Les votes de nombreux jeunes et personnes d'outre-mer ne seront pas comptés", ajoute George Williams, doyen des facultés de droits de l'Université de New South Wales au Guardian Australia, qui craint de ne pouvoir mobiliser la génération internet à travers un procédé postal.

Ménager la chèvre et le chou

Surtout, une phrase du Premier ministre inquiète les rangs militants. Indiquant aux journalistes qu'il soutiendrait "certainement un vote du oui", Malcolm Turnbull a cependant ajouté qu'il ne se chargerait pas lui-même de la campagne de ce vote postal car il est trop occupé. Les associations LGBT australiennes dénoncent une irresponsabilité gouvernementale, le Premier ministre ayant fait du mariage pour tous une promesse de campagne en 2015, et envisagent déjà de boycotter le processus.
Cette nouvelle invention pourrait également être retoquée par le Parlement; plusieurs experts interrogent la constitutionnalité d'un tel vote qui non seulement nécessiterait plus de 120 millions de dollars australiens mais serait réalisé par l'Australian Bureau of Statistics (ABC), dont le domaine de compétence concerne les données factuelles (le recensement de la population, le taux de chômage...) et non les opinions.
L'été dernier, Gallop avait déjà publié un tel sondage, avançant que la majorité du pays (61%) serait favorable à la légalisation du mariage pour les couples homos.
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Couverture : L'acteur australien Dan Ewing milite pour l'ouverture du mariage - crédit photo @_danewing/Instagram