internetLa "LGBTech" à l'abordage des bureaux de Google, Facebook et consorts

Par têtu· le 24/11/2017
LGBTech Google Facebook

Et puis, vers la fin du cortège de la Marche des fiertés parisienne, un char surprend. Un char de dernière génération, grand et beau, avec une kisscam géante et du bon son, un char qui a clairement du budget. Sur la bannière, on peut lire "LGBTech"...

Par Aline Mayard
Mais qui est ce groupe que personne ne semble connaître et qui s’est fait sponsoriser par Facebook, Google, Hornet et JVweb ? Dans la foule, on repère quelques femmes avec des t-shirts « Lesbians Who Tech ». Pourquoi la tech s’immisce-t-elle à la Pride ?
Tout est parti de l’envie de quelques employé·e·s d’entreprises gay-friendly de créer des espaces pour les personnes LGBT de la tech en France, pour se rencontrer, échanger, s’inspirer et apprendre. Après un voyage dans la Silicon Valley, Marine Rome décide d’importer le groupe Lesbians Who Tech (LWT) en France. En septembre 2015, elle réserve une table pour douze dans un bar, en parle dans la presse LGBT et poste quelques statuts Facebook. Le jour J, 120 personnes débarquent. « C’était la validation qu’il y avait un besoin » explique-t-elle. Depuis, cinq fois par an, c’est la même chose : la soirée commence dans un bar par une conférence d’une heure pendant laquelle trois femmes partagent leur expertise, et continue autour de bières. Tout cela se fait de façon très spontanée. LWT France n’a ni structure juridique ni équipe clairement définie, seulement un groupe Facebook. Damien Traclet, lui, s’est inspiré de groupes existant en Irlande et en Angleterre pour créer LGBTech. Au printemps 2016, le commercial et porte-parole LGBT de Google demande, par email, aux grandes entreprises parisiennes du web si elles ont des employé·e·s out. Trente personnes LGBT le rejoignent pour un verre et trois décident de créer LGBTech France avec lui. Néophytes de l’associatif, ils apprennent des conseils de Marine Rome. Ils ont organisé cinq rencontres, une par trimestre, hébergées dans les bureaux des uns et des autres. Le groupe Facebook compte plus de 250 membres.
« Ça marche très bien, il y a des personnes qui ont monté des projets ensemble, qui ont commencé des formations » explique Marine. Damien abonde, certaines personnes ont même trouvé un emploi grâce à LGBTech, « comme dans n’importe quel groupe d’intérêt ». Sauf que ce ne sont pas n’importe quels groupes d’intérêt. Derrière les verres réside un vrai projet militant. « J’ai la chance de travailler dans une entreprise et une industrie plutôt libérales et plutôt progressistes sur ces enjeux, estime Antoine-Benjamin Lequertier, directeur marketing Europe du Sud chez Facebook et cofondateur de LGBTech France. « Quelque part, je trouve que c’est notre rôle de porter cette parole LGBT-friendly dans le monde de l’entreprise ». À commencer par le monde de la tech.
« La tech » est un secteur aux frontières floues qui englobe startups, géants du web, mais aussi agences web, SSII et départements tech d’entreprises non tech. Si les employé·e·s LGBT de Facebook se disent épanoui·e·s, ce n’est pas le cas de tout le monde dans la tech. « J’ai eu des expériences extrêmement mauvaises dans des boites de dév, vraiment terribles » se souvient Alix Mougenot, développeur web et cofondateur de LGBTech France. « Il ne faut pas se leurrer, le milieu de la tech, c’est un milieu hyper macho ». Pour lui, le problème, c’est la surconcentration d’hommes. Dans certaines entreprises et selon les fonctions, cela créé une ambiance toxique. « Ce n’est pas facile d’être out quand 98% des employés sont des gars ». Et puis il y a aussi « l’injonction au placard » qui reste très forte dans la vie professionnelle française, estime Marine Rome. « On a fait une séance sur le coming out en entreprise, se rappelle-t-elle. Le micro a tourné. Moi j’ai expliqué que j’avais mis mes activités militantes sur mon CV. J’ai le souvenir de personnes, dans des grands groupes français, qui étaient dans une véritable détresse psychologique et morale. Et puis entre ces deux extrêmes, il y a toute une palette de gens ».

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Couverture : ©Yannick Mittelette