coming outLe premier nigérian à avoir fait publiquement son coming-out raconte son histoire dans une émouvante vidéo

Par Louise Guibert le 17/08/2018
Le seul gay au Nigéria

Bisi Alimi est un célèbre activiste des droits LGBT+ au Nigéria. Dans une vidéo, "Le seul gay au Nigéria", il raconte comment il est passé de jeune homme homophobe à premier nigérian à faire publiquement son coming-out.

« Le président nigérian a dit sur une chaîne nationale qu'il n'y avait pas de gay au Nigéria. Et je me suis senti insulté. Si vous pensez qu'il n'y a aucun gay au Nigéria, détrompez-vous : il y en a un. C'est moi ». C'est par ces mots que Bisi Alimi, 43 ans, prend la parole dans "Le seul gay au Nigéria", une courte animation de quatre minutes à peine retraçant son expérience d'homme gay en Afrique. Les couleurs pastel de la vidéo tranche avec le récit difficile que livre Bisi Alimi.

En 2004, il fut le premier Nigérian à annoncer publiquement son homosexualité. Mais dans son pays, très pieux, les relations entre personnes de même sexe sont punissables de lapidation dans les douze états ayant adopté la charia, et de quatorze ans de prison dans l'ensemble du pays.

"Je suis devenu un réfugié à cause de mon orientation sexuelle"

Élevé par une famille profondément attachée à la religion, Bisi Alimi n'a pas toujours accepté son orientation sexuelle. Enfermé dans l'idée que l'homosexualité était un pêché, il refoule qui est il est jusqu'à devenir ouvertement homophobe.

À 17 ans, il se fait exorciser, dans l'espoir d'éloigner ses désirs. Mais une tentative de suicide lui fait prendre conscience qu'il n'a pas d'autre choix que de laisser s'exprimer la personne qu'il a toujours été.  "En tant que jeune gay à Lagos, la vie était marrante. Mais elle était aussi dangereuse". Dans les soirées underground de la capitale, Bisi Alimi ne se cache pas, même s'il doit prétendre aimer les femmes "du lundi au vendredi".

À LIRE AUSSI : Arrestation massive d'hommes soupçonnés "d'actes homosexuels" au Nigéria

En 2003, il obtient un rôle principal dans le soap opera, Roses and Thorns. Propulsé au rang d'acteur superstar dans tout le pays, sa vie change du jour au lendemain. À l'époque, il coupe les ponts avec ses amis gay et vit en couple avec une femme, pour ne rien dévoiler de son orientation sexuelle. Jusqu'à ce qu'un tabloïd national commence à enquêter sur sa vie amoureuse. Quand il apprend la nouvelle, le jeune homme décide que personne d'autre que lui ne révèlera son histoire : il fera donc publiquement son coming-out. Alors, Bisi Alimi contacte Funmi Iyanda, productrice d'un célèbre talk show. Il y confirme être homosexuel et porteur du virus du VIH.

Tout quitter pour tout recommencer

"Je savais que les gens allaient réagir. Mais je ne savais pas que ça allait être aussi violent", confie-t-il dans la vidéo. Le talk show, diffusé depuis près de dix ans, a été subitement arrêté. En vingt-quatre heures, Bisi Alimi passe de coqueluche nationale à persona non grata. Rester au Nigéria s'avère dangereux, mais il n'est pas encore prêt à tout quitter : sa maison est alors saccagée, et lui est torturé. Alors il fait le choix de quitter le pays : "J'ai perdu beaucoup de choses, j'ai perdu beaucoup d'amis. Je suis devenu un réfugié à cause de mon orientation sexuelle".

Aujourd'hui, Bisi Alimi est un célèbre activiste pour les droits homosexuels. Il réside à Londres où il poursuit son action auprès des communautés africaines migrantes. Quatorze ans après avoir effectué son coming-out, il espère maintenant donner espoir aux jeunes africains LGBT+.

À LIRE AUSSI : Cette série photo célèbre l'alliance vibrante des identités queer et africaines

 

Crédit photo : Capture d'écran/Youtube