égliseGuyane : des militants du Refuge agressés en marge d'une conférence évangélique

Par Youen Tanguy le 03/05/2019
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Des militants du Refuge Guyane ont été agressés jeudi 2 mai à Cayenne alors qu'ils manifestaient contre la tenue d'une conférence évangélique animée par un pasteur pratiquant des "thérapies de conversion" contre l'homosexualité.

"Il a tenté de nous frapper dans une furie sans nom." Ce jeudi 2 mai, plusieurs militants du Refuge Guyane ont été agressés devant la salle culturelle Le Zephir à Cayenne, a-t-on appris auprès de l'association.

Le délégué régional Steven Kuzan raconte sur Twitter qu'ils ont été pris à partie par un homme pendant "près de 30 minutes". "Il nous a agressé, menacé et tenté de nous frapper". Le militant a aussi posté une vidéo dans laquelle on peut voir l'agresseur présumé attraper une de leurs pancartes et la plier en deux.

Si ces militants étaient devant le Zephir jeudi soir, c'est parce qu'ils manifestaient contre la tenue d'une conférence évangélique, organisée par l'Assemblée du ministère de l'Evangile (EEAME). "Nous sommes très inquiets car sur les neufs intervenants, sept ont déjà tenu des propos homophobes (...) C'est quelque chose qu'on ne peut pas tolérer", a détaillé Steven Kuzan à Guyane la 1ère.

En effet, parmi les participants, on retrouve notamment le pasteur Michaël Lebeau, originaire de la Réunion et résidant actuellement au Canada. Ce dernier est un fervent adepte des "thérapies de conversion" contre l'homosexualité.

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"Esprit d'homosexualité, tu es vaincu"

En novembre 2018, Le Journal de Montréal avait publié une longue enquête sur les "thérapies de conversion" dans laquelle apparaissait le pasteur qui officie pour l’église de la Victoire à Granby. Dans une vidéo exhumée par le média, Michaël Lebeau expliquait "comment vaincre l'homosexualité" et "se libérer des désir homosexuels". Un journaliste avait aussi pu s'entretenir avec lui par téléphone sous prétexte de vouloir subir une "thérapie de conversion".

On entend le pasteur lui dire : "Satan, tu es vaincu. Esprit d'homosexualité, tu es vaincu. Je libère Philippe par l'autorité du nom de Jésus Christ. Je libère son âme maintenant. Maintenant il est libéré de l'attirance par les hommes, il est libéré de ce mensonge." 

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Dans le programme de la conférence, qui se tient du 2 au 5 mai à Cayenne, le pasteur promet d'ailleurs aux invités un "toucher surnaturel de Dieu" avec au programme, des "guérisons", des "miracles", ou des "délivrances".

Parmi les autres invités présents, on retrouve également le pasteur canadien Marcel Kouamenan. Dans un message Facebook daté du 18 mai 2015, il avait tenu des propos pour le moins étranges où il condamnait "l'abomination de bénédiction des homosexuels par l'Église protestante unie de France". Avant de s'essayer à une justification hasardeuse : "C'est pour avertir et non pour juger".

Guyane : des militants du Refuge agressés en marge d'une conférence évangélique

Mise en garde de deux députés

Les députés Raphaël Gérard et Laurence Vanceunebrock-Mialon ont alerté le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner et la ministre des Outre-mer Annick Girardin au sujet de cet événement dans un courrier daté du 29 avril dernier,

"Nous souhaitons que vous soyez particulièrement attentif à la tenue de cette 'Conférence' et que vous preniez, le cas échéant, toute mesure de nature à limiter les risques que l'on peut imaginer", écrivent-ils.

Le Refuge a assuré sur Twitter avoir saisi la préfecture de Guyane et le procureur de Cayenne pour "demander l'interdiction de ce congrès". L'association SOS Homophobie s'est également alarmée dès le 30 avril dernier du "silence" de la préfecture.

Un suspect interpellé

Le procureur de la République de Cayenne Samuel Finielz a confirmé à TÊTU avoir été saisi par l'association Le Refuge le 31 mai dernier pour "faire interdire la manifestation religieuse". Il leur a répondu ne pas avoir d'éléments permettant de dire que les participants à cet événement, qui se tiendra donc jusqu'à dimanche 5 mai, tiennent des propos homophobes.

Concernant l'agression des militants du Refuge, il a assuré qu'une personne se trouvait en garde à vue depuis jeudi soir. "Elle a été déféré vendredi devant le parquet de Cayenne en vue de sa comparution immédiate mardi 7 mai", nous a-t-il indiqué. L'agresseur présumé, défavorablement connu des services de police, conteste les faits. Il a pourtant tenu des propos ouvertement homophobes devant les enquêteurs et la victime présumée.

Article mis à jour le samedi 4 mai à 18h48

Crédit photo : Compte Twitter @StevenKuzan.