Le poppers est à nouveau légal depuis 2013. Mais ce vasodilatateur présente-t-il un risque pour la santé ? Comment bien le choisir, et le consommer en toute sécurité ? Voici un petit guide pratique à l'usage des néophytes... et des autres.
Il y en a eu, des gens qui voulaient la peau du poppers. En 2007 François Fillon, alors Premier ministre, s'était lancé dans une croisade contre le poppers et l'avait fait interdire. Mais le Syndicat national des entreprises gays (Sneg) a gagné devant le Conseil d'État pour annuler son interdiction. Résultat, depuis 2013, ce vasodilatateur est de nouveau légal et on peut en acheter dans tous les bons sex shops.
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Depuis son retour à la vente, la petite fiole semble gagner du terrain dans les clubs - même hétéros - et dans les chambres à coucher. Car si ce produit à inhaler est légèrement euphorisant, il a aussi une autre botte secrète : il faciliterait la pénétration, augmenterait la durée de l'érection, et retarderait l'éjaculation. Son effet est quasi immédiat et dure quelques minutes. Pas étonnant donc, que les gays le plébiscitent depuis 50 ans.
Poppers et maux de tête
Mais attention, les nitrites qui le composent ne sont pas inoffensifs. Le poppers ne provoque pas d'effet de dépendance mais il peut faire l'objet d'autres complications. La première d'entre elle, la plus fréquente, ce sont les maux de têtes qui peuvent être particulièrement violents, notamment lorsqu'il s'agit de produits bas de gamme. Ces céphalées peuvent même conduire à des vertiges et des étourdissements. Pour les éviter, il n'y a pas de secret, il faut éviter la surconsommation. Si c'est déjà trop tard, respirez quelques minutes à l'air frais, cela peut vous aider. Les plus gourmands risquent aussi une irritation des narines qui peut être particulièrement désagréable (croyez-moi, vous ne voulez pas vous frotter le nez et éternuer pendant deux semaines).
Pour vous éviter les risques, on ne peut que trop vous conseiller d'espacer vos inhalations. Le poppers doit être associé à un moment de détente et être évité lorsque l'environnement n'est pas rassurant. D'autant que comme il favorise l'excitation sexuelle, il peut conduire à une prise de risque et à oublier le préservatif.
VIH : le vasodilatateur n'augmente pas le risque
"Ce produit s’est trouvé surmédiatisé dans les années 1980 car des études épidémiologiques avaient incriminé le nitrite d’amyle dans la transmission du VIH. Des scientifiques ont d’ailleurs bien montré les raccourcis et les facteurs de confusion qui avaient conduit à cette mauvaise interprétation des données. Les nitrites utilisés par cette population sont en fait un marqueur des conduites sexuelles à risque, mais pas un facteur de risque en soi d’être infecté par le VIH", écrit François Beck de l'Observatoire français des drogues et toxicomanie, dans une étude parue en 2014.
Il poursuit : "Les poppers entraînent toutefois une augmentation du flux sanguin notamment dans les vaisseaux rectaux. Les parois des vaisseaux s’élargissent sous la pression, avec pour conséquence un affinement de leur surface, et donc une plus grande fragilité pouvant être accompagnée de ruptures, déchirures et saignements, qui facilitent l’entrée du VIH et d’autres pathogènes dans l’organisme. En facilitant mécaniquement la pénétration, les poppers augmentent aussi les frictions et les traumatismes".
Poppers + Viagra = dangereux
Attention, les personnes qui ont des problèmes cardiaques doivent particulièrement faire attention. En dilatant les vaisseaux sanguins, le poppers permet au sang d'arriver plus rapidement au cœur, ce qui peut conduire à une baisse de la pression artérielle ou au contraire à une tachycardie. Un surdosage peut entraîner une diarrhée ou des crampes abdominales. Dans de plus rares cas, trop de poppers peut entraîner une altération temporaire de la vue voire (mais là, c'est très rare) des convulsions. Surtout, les autorités déconseillent fortement l'association avec les médicaments destinés à renforcer l'érection, également vasodilatateurs, de type Viagra ou Cialis. Ce mélange, dangereux, peut provoquer un arrêt cardiaque.
On ne le dira jamais assez : le poppers ne se boit pas. Non seulement, son goût est probablement pire qu'un cocktail à base d'eau de javel, de pipi de votre grand-mère et de lubrifiant pour voiture mais en plus, c'est évidemment aussi très dangereux. En Écosse, une femme est ainsi morte après avoir avalé une bouteille entière (elle a pris la fiole pour une bouteille d'alcool). Autre chose, on vous interdit d'approcher une flamme de votre flacon de poppers, qui est très inflammable.
Quatre familles de poppers
Vous êtes dans un sex shop et devant vous, un mur entier de fioles différentes de poppers. Comment choisir ? D'abord, "on vérifie que le flacon stipule au moins une norme NF ou CE", prévient Julien, accompagnateur PrEP au Checkpoint à Paris. Il existe ensuite quatre principaux types de poppers : à base de nitrites d'amyle, d'isopropyles, d'isobutyle ou de Pentyl. Maintenant que vous pouvez faire les malins avec des mots compliqués, il faut savoir de quoi il s'agit.
Les Pentyl sont les plus vendus. Leur effet est immédiat et persistant. On dit que ce sont les plus sensuels car ils augmentent rapidement la libido et l'orgasme est prolongé. Surtout, ils s'évaporent deux à trois fois plus lentement que les autres modèles. Ils sont aussi vendus plus chers (une quinzaine d'euros).
Les poppers Amyle sont certainement les plus puissants. Leur montée est progressive avec des effets plus persistants. Leur utilisation doit être réservée aux personnes qui ont l'habitude de prendre du poppers. Autre défaut, il pue. En revanche, si vous êtes empoisonné au cyanure, il peut être utile pour vous sauver, mais la rédaction de TÊTU n'a pas fait l'expérience. Prenez garde toutefois à ne pas confondre nitrite d'amyle et nitrate d'amyle. Ce dernier est un additif au carburant et ne vous aidera pas sexuellement.
Le poppers isopropyle à éviter
L'isobutyle a l'avantage de provoquer moins de maux de tête que l'amyle et il se conserve plus facilement. Il permet une dilatation plus efficace, mais il est assez fort. Les combinaisons Amyles et isobutyle doivent être réservés aux initiés. Il est régulièrement utilisé lors de pratiques hard.
Le poppers à base d'isopropyle, c'est le retour aux origines. Ils sont parfois présenté comme des parfums d'intérieur (oui, oui). La molécule a été popularisée dans les années 80, depuis, on les trouve dans les bureaux de tabac. La documentation médicale montre qu'à forte dose, cette molécule peut provoquer une déficience visuelle avec un effacement du centre du champ visuel. En cas d'usage continu, ces effets oculaires peuvent devenir irréversibles. Classé cancérigène, il n'a pas notre préférence.
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Crédit photo : Samuel Howard Monell