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histoireLa folle histoire de têtu·

Par Xavier Héraud le 05/02/2021
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À l'occasion de son 25e anniversaire, têtu· a retrouvé une partie de celles et ceux qui l'ont fait exister. Retour sur les combats, et les coulisses, portés par votre magazine LGBT.

Faites le test autour de vous, et vous verrez : tout le monde se souvient de son premier Têtu. De l'émotion en entrant chez le marchand de journaux, de la couverture qui nous avait attirés, de ce passage initiatique dans l'acceptation et la compréhension de son homosexualité. Commencée il y a vingt-cinq ans, en juin 1995, l'histoire de ce magazine n'a pas toujours été un long fleuve tranquille. Il s'en est fallu de peu pour qu'il disparaisse définitivement, et ce à plusieurs reprises.

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À l'origine, il y a un vide. Depuis la fin de Gai Pied en 1992, la France n'a plus de publication gay notable. Pascal Loubet et Didier Lestrade, deux des fondateurs d'Act Up-Paris et journalistes dans "le civil" (le second fut notam- ment salarié de Gai Pied), ambitionnent de créer un nouveau titre de presse gay payant, inspiré du mag anglais Attitude ou des américains Out et Poz. Ils espèrent ainsi donner de la visibilité à une communauté homosexuelle dont les médias ne parlent quasiment jamais, ou trop souvent de manière caricaturale. Pour y parvenir, il leur faut trouver quelqu'un souhaitant se lancer dans l'aventure, et capable de financer le lancement d'un magazine gay. Une gageure quelle que soit l'époque, mais peut-être encore davantage en ce début des années 1990, où la communauté gay est durement touchée par le sida.

Les fondateurs : Didier Lestrade et Pascal Loubet

Sans grand enthousiasme, Pascal Loubet et Didier Lestrade finissent par solliciter un rendez-vous avec Pierre Bergé, compagnon d'Yves Saint Laurent, qui finance déjà beaucoup la lutte contre le sida. "Après avoir négocié pendant deux ans avec ceux qui géraient les archives de Gai Pied sans parvenir à les convaincre, on s'est tournés vers la seule personne qui avait de l'argent, raconte Didier Lestrade. Ça m'a foutu en l'air, car je n'avais absolument pas envie de me rapprocher du monde de la mode." L'homme d'affaires se laisse toutefois convaincre. Le soutien de Cleews Vellay – successeur de Didier Lestrade à la tête d'Act Up, mort du sida en 1994, et pour qui Pierre Bergé nourrit une grande affection – au projet aurait fini de le decider, estime le journaliste. ...