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histoireJean Le Bitoux : le premier d'entre nous

Par Xavier Héraud le 08/10/2020
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Un jardin porte son nom à Montreuil. Paris réfléchit à lui dédier une plaque. Aujourd'hui, il ne reste plus grand-chose de Jean Le Bitoux, ce Harvey Milk français à qui nous devons tant, cofondateur de Gai Pied de la première marche des Fiertés parisienne.

Nice, un soir de 1971. Jean est un jeune homosexuel (on ne dit pas encore gay) qui n'a jamais tenu un homme nu dans ses bras. Depuis son arrivée sur la Côte d'Azur, il lui arrive régulièrement de longer le jardin Albert-Ier, qui jouxte la promenade des Anglais. Et ce pour une raison précise : c'est un lieu de drague bien connu des hommes. La nuit venue, des hommes de tous âges et de tous milieux déambulent dans les allées étroites qui serpentent au milieu des arbres et des bosquets. Du haut de leur ci· 1.e, les palmiers ont un point de vue imprenable sur cet étrange ballet. Les silhouettes se matent, se frôlent, s'isolent parfois pour un peu de sexe ou repartent ensemble.

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Jusqu'ici, Jean n'avait jamais osé s'aventurer plus loin que la bordure du jardin. Mais, ce soir-là, il prend enfin son courage à deux mains. On le repère vite. Malgré l'obscurité,'un petit nouveau de 23 ans passe rarement inaperçu. Intimidé, il évite alors les œillades trop appuyées des hommes qu'il croise. Au bout de quelques minutes, son regard se pose sur une paire de chaussures jaunes, très élégantes, sans doute achetées en Italie. Il lève les yeux, et le mec lui plaît, ce qui est manifestement réciproque. Jean lui emboîte le pas à travers les allées. "On va chez un ami", lui souffle l'homme. Jean ne demande pas mieux. Ils finissent au lit. "Je me suis aperçu que non seulement je n'avais pas joui, mais que lui m'avait enculé trois fois dans la nuit. Ce qui fait un baptême du feu assez hard !" racontera-t-il plus tard....