Le Comité national pour les élections en Hongrie a condamné seize ONG à une amende pour avoir appelé à voter blanc dans leur campagne d'opposition au référendum par lequel le Premier ministre a tenté, début avril, de faire valider sa loi LGBTphobe adoptée l'an dernier.
Après la victoire contre le référendum de Viktor Orbán, la douloureuse. À la suite de l'échec début avril de la consultation du Premier ministre de Hongrie visant à légitimer sa loi homophobe adoptée l'été dernier, le Comité national pour les élections (NEC) a infligé à seize ONG hongroises une amende pour leur campagne d'opposition. Raison avancée : elle aurait été à l'encontre "de la finalité constitutionnelle de l'exercice du pouvoir et de la volonté législative afférente" ! Les associations visées, notamment Amnesty International et Háttér Society, sont ainsi condamnées à débourser 9 millions de forint chacune, soit environ 24.000 euros. Elles comptent faire appel de cette décision qu'elels qualifient de "procédure-bâillon".
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C'est la stratégie – gagnante – des associations pour faire invalider le référendum qui leur est reprochée. Afin de s'opposer aux questions spécieuses posées par l'exécutif, les organisations invitaient en effet à voter blanc car, pour être valide, le scrutin devait mobiliser au moins 50% du corps électoral. Au total, seuls 44% des votants du 3 avril ont exprimé un vote valide et 20% des électeurs ont invalidé leur vote : comme en 2016 sur la question migratoire, le référendum de Viktor Orbán est donc tombé à l'eau.
"Le référendum a redonné espoir"
Le NEC reproche aux associations d'avoir freiné l'expression populaire. Mais "le référendum a redonné espoir à de nombreuses personnes. Nous continuerons à travailler pour une Hongrie sûre et libre pour tous", pointe Luca Dudits, directrice de Háttér Society. "Cette amende vise à réduire au silence l'énorme communauté de personnes qui ont utilisé leur doit de libre expression pour vaincre démocratiquement contre le référendum anti-LGBTQI+ du gouvernement", pointe dans un communiqué Amnesty International. Les associations ont intention de faire appel de la décision. "Nous irons jusqu'à la Curia [l'équivalent hongrois de la Cour de cassation], cette amende illégale sera annulée", assure Dávid Vig, le directeur de l'antenne hongroise d'Amnesty.
"Ces tentatives d'étouffer la participation des électeurs par l'intimidation sont une tactique pour créer un effet dissuasif sur la liberté d'association."
Pierre Karleskind
Les ONG pourront compter sur le soutien du parlement européen. "Cela souligne à quel point les valeurs démocratiques de l'Union européenne sont mises à mal en Hongrie", regrette Maria Walsh, vice-présidente de l'Intergroupe LGBTI au Parlement européen (PPE, droite). Dans une lettre à la Commission européenne, le vice-président de l'Intergroupe LGBTI Pierre Karleskind (Renaissance, affilié En Marche) appelle à enclencher une nouvelle procédure d'infraction contre la Hongrie. "Ces tentatives d'étouffer la participation des électeurs par l'intimidation sont une tactique pour créer un effet dissuasif sur la liberté d'association. Une raison supplémentaire de travailler rapidement sur une législation pour protéger les activistes LGBTQI+ des procédures-bâillons", développe Pierre Karleskind, également vice-président de l'Intergroupe LGBTI (Renew, affilié En Marche). La mesure vise en effet à mieux protéger les militants, les journalistes et les lanceurs d'alerte en définissant ces procédures-bâillon à l'échelle de l'UE et en finançant au sein de l'Union des équivalents au Défenseur des droits français. La Commissaire aux valeurs doit présenter les contours de cette législation autour du 27 avril prochain.
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