Avec l’album, le spectacle et le livre No(s) dames, le contre-ténor Théophile Alexandre interroge la place des femmes, éternelles victimes des désirs masculins dans les récits d’opéra. [Article à retrouver dans le nouveau têtu· actuellement en kiosques]
C’est l’histoire de Carmen, bohémienne au tempérament volcanique, qui éconduit un homme ; à la fin, elle meurt. C’est celle de Violetta, courtisane qui refuse un grand amour au nom des conventions sociales ; à la fin, elle meurt. C’est celle d’Eurydice, jeune femme que son homme tente en vain de sauver des Enfers ; à la fin, elle meurt (une deuxième fois). “Poignardées, empoisonnées, éventrées, brûlées, étranglées, défenestrées… En quatre siècles d’opéras masculins, le sort des héroïnes est aussi tragique que leurs airs sont sublimes”, résume, avec le sens de la formule, le contre-ténor Théophile Alexandre. Afin de dénoncer ce “fatalisme de genre” (ici dans les exemples de Carmen de Georges Bizet, de La Traviata de Guiseppe Verdi et d’Orphée et Eurydice de Christoph Gluck), il a imaginé le projet No(s) dames, “hommage dégenré aux tragédiennes d’opéra”. Accompagné du quatuor Zaïde, il interprète lui-même ces personnages maltraités. Sorti en début d’année, l’album est un succès – la production annonce fièrement plus de trois millions de streams – qui démontre la capacité de notre époque à enfin affronter tout un héritage culturel patriarcal. ...