Le royaume d'outre-Quiévrain a couronné sa première reine des queens, en la personne de Drag Couenne. Un moment partagé entre potes ou inconnus, comme depuis huit semaines, dans de nombreuses soirées organisées, en France et en Belgique, autour de la projection des épisodes de Drag Race Belgique, saison 1. On est allé voir la finale dans l’une d’entre elles.
Paris, le jeudi 6 avril. Direction le XIXe arrondissement de la capitale et le bar À la folie où se tient, comme chaque jeudi soir depuis huit semaines, une viewing party de la première saison de Drag Race Belgique, c’est-à-dire une soirée organisée autour de la projection en public de l’épisode inédit de la semaine. Exceptionnellement à l’animation ce soir-là, la drag queen toulousaine Minima Gesté, qui remplace Amanda Tears, candidate de cette saison et initiatrice, avec le collectif Velvette, de ce rendez-vous hebdomadaire à Paris.
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Des soirées comme celles-ci, il n’en existe pas qu’à Paris. C’est également le cas à Lille ou à Lyon, et en Belgique à Bruxelles ou à Liège. Le signe que cette première saison belge de Drag Race était attendue, ou du moins que l’engouement surprise autour des soirées Drag Race France l’été dernier ne s'est pas éteint.
Drag Race, mais pas que
Performances drag, DJ set, questions-réponses avec des candidates de Drag Race Belgique invitées, anecdotes de celles-ci pendant le visionnage… Tout est bon à Paris et Lille pour prendre son mal en patience jusque 20h – l’heure à laquelle l’épisode est mis en ligne – et souvent pour faire durer le plaisir à l’issue de la projection. "On a voulu proposer quelque chose de plus immersif que de simplement regarder l’épisode comme on irait voir un match de foot dans un bar, nous explique Amanda Tears. C’était aussi un moyen de découvrir les artistes de l’émission sous un autre angle. J’ai ainsi pu montrer au public que je suis bien plus que ce qu’on a vu dans l’émission", ajoute la drag queen mouscronnoise, qui se souvient que c’est lors d’une viewing party à Bruxelles à l’occasion de la douzième saison américaine de Drag Race qu’elle a pu faire sa première scène drag.
À Liège, l’ambiance est sensiblement différente. Ce n’est pas un bar mais une association LGBT+, la Maison Arc-en-Ciel, qui propose les soirées de diffusion. "Dans un bar, on s’attend davantage à une ambiance de soirée. Ici, c’est un peu comme si, chaque jeudi, tout le monde se retrouvait dans un grand salon", rapporte Sébastien Hanesse, qui travaille pour l’association belge.
Liège, Lille, Paris
Dans l’ensemble, le public s’est montré au rendez-vous. A Liège, "on ne s’attendait pas à voir autant de monde, nous raconte Sébastien Hanesse. Dès le premier épisode, entre 60 et 70 personnes sont venues chaque jeudi, ce qui est beaucoup pour nous", précise-t-il.
Un intérêt, toutefois, à relativiser par rapport à l’engouement suscité l'an dernier par Drag Race France. À Paris, le bilan est ainsi plus mitigé. "Le public parisien a été un peu timide, je dirais", concède Amanda Tears, qui constate que les soirées Drag Race France proposées au même endroit ont eu "un succès plus populaire" que celles-ci, "plus de niche". Ce jeudi, nous sommes ainsi une petite trentaine à avoir fait le déplacement. À Lille en revanche, plus près de la frontière belge, House of Jambon Beurre n’est pas passée loin de reproduire le carton de l’été 2022 : environ 150 personnes ont assisté à leur viewing party chaque semaine, contre jusqu’à 200 pour Drag Race France. La soirée, accessible uniquement sur réservation, s’est une fois encore retrouvée régulièrement complète.
Queen rencontre public
La drag queen lilloise Crystal Chardonnay se réjouit de cette affluence. "J’aime bien dire que ‘Drag Race’, c’est un peu la coupe du monde des personnes queers. Et c’est vraiment l’effet que ça donne quand tout le monde hurle et tape sur les tables pour exprimer sa joie, développe l’une des membres de House of Jambon Beurre. C’est important d’offrir un espace pour nous, personnes queer,s pour pouvoir nous retrouver, partager nos expériences, vivre des grands moments de communauté ensemble."
Pour les drags, ces viewing parties représentent également une opportunité supplémentaire d’aller à la rencontre de leur public, voire de l’élargir. "On a vu, au fil des semaines, des gens venir nous découvrir et revenir chaque semaine. J’adore reconnaître ces personnes dans la foule, pouvoir échanger avec, et aussi construire une relation avec eux. C’est très touchant ce genre de soutien", confie Crystal Chardonnay.
Sébastien Hanesse tire le même constat pour son association. "Ces soirées ont permis d’attirer un nouveau public, des personnes qui n’auraient peut-être jamais franchi la porte de la Maison Arc-en-Ciel sans ça, ce qui est une bonne chose parce qu’on sait à quel point ça peut rester compliqué de se rendre dans une association LGBT", souligne-t-il.
Retour à Paris. Après une soirée riche en paillettes, en show, en rires et en applaudissements, la première saison de Drag Race Belgique touche à sa fin. On ne vous spoile pas le nom de la gagnante, d'aucuns attendent encore la diffusion télé du dimanche soir… L’heure de se rappeler une dernière fois, comme le dit si bien Rita Baga, que "l’union fait la force, et l’amour tout le reste".
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Crédit photo : Brittany Von Bottoks lors d’une viewing party à Lille / Joffrey Barsby