Alors que les politiques de diversité et inclusion (DEI) en entreprise sont mises à mal aux États-Unis, l'université Paris Est-Créteil croit à la poursuite de leur développement en France, et lance une formation en ce sens à destination des entreprises, associations, administrations et collectivités.
"Ce diplôme revêt une dimension politique que je revendique." Spécialiste de l'histoire des revendications queers aux États-Unis, maître de conférence à l'Université Paris Est-Créteil (Upec), Antoine Servel lance à partir de septembre 2025 la première formation diplômante "égalité, diversité et inclusion". Cette formation sur les discriminations s'adresse avant tout aux responsables de ressources humaines, mais également aux représentants du personnel ou réseaux d'employés, qu'ils soient publics ou privés. À l'heure où ces politiques d'entreprises sont dans le viseur du pouvoir exécutif aux États-Unis, l'universitaire constate l'inverse en France : une appétence croissante des entreprises, administrations, associations à être sensibilisées aux sujets de diversité et inclusion (DEI).
À lire aussi : La diversité nous unit, l’inclusion nous renforce
"Il n'a jamais été aussi important de mettre en place des politiques de diversité et d'inclusion. Alors que la société est particulièrement tendue, ces pratiques permettent de mieux travailler ensemble en faisant baisser les discriminations pour que le plus de personnes se sente bien au bureau", argumente l'universitaire. Diplôme universitaire délivré en deux ans et accessible après une licence, la formation de 200 heures est dispensée en présentiel le week-end et en distanciel deux soirs de semaine afin de permettre la poursuite d'une activité professionnelle. "On a des blocs théoriques avec de l'histoire, de la sociologie, et d'autres pratiques avec du droit, de la gestion, de la communication...", détaille Antoine Servel. Par ailleurs, certains séminaires donnent la parole à des associations comme l'Ardhis, qui accompagne des réfugié·es LGBTQI+ ou le Flirt, un réseau de support transféministe. Le diplôme vise à former sur l'ensemble des discriminations et non seulement les LGBTphobies.
Première en France
C'est la première fois en France qu'un diplôme universitaire valide une formation sur ce sujets. Jusqu'ici, l'essentiel des progrès en termes de politiques de ressources humaines reposaient sur la bonne volonté de salariés qui peuvent se regrouper en collectifs et créer des réseaux dits "ERG" (pour "employee ressource group", en anglais). "Ces sujets sont très difficiles à aborder en entreprise, où ils font l'objet d'une méfiance car des personnes se sentent visées. D'où l'importance de donner les clés pour savoir développer son plaidoyer et en parler tranquillement", complète Antoine Servel.
Le chercheur constate qu'aux États-Unis, les entreprises ne suivent pas toutes le mouvement de recul en cours : "Certaines entreprises sont attachées à leur programme Diversité, Équité et Inclusion (DEI), ne serait-ce parce qu'il est source de performance de l'entreprise. Mais elles choisissent de faire des politiques plus discrètes et d'en changer le nom", observe-t-il. D'où, plus que jamais, la nécessité de les mener avec professionnalisme.
À lire aussi : Droits humains : Alice Nkom, l'avocate inlassable des homos au Cameroun
Crédit photo : Headway / Unsplash