seniors LGBTLa fondation québecoise Émergence met à l'honneur les seniors LGBT

Par Jérémie Lacroix le 17/05/2016
Fondation Emergence seniors LGBT

Cette année, dans le cadre de la Journée internationale de lutte contre l'homophobie et la transphobie, la fondation canadienne Émergence a souhaité mettre en lumière la situation particulière des seniors LGBT.

La fondation Émergence est spécialisée sur la question des seniors LGBT. Cette année, dans le cadre de la Journée internationale de lutte contre l'homophobie et la transphobie (IDAHOT), la fondation a décidé de mettre à l'honneur et en lumière les seniors, trop souvent oubliés. TÊTU s'est entretenu avec le président d'Émergence, Claude Leblond, qui nous explique les enjeux de cette Journée, mais également de leur combat au quotidien, pour les seniors.
Présentez-nous rapidement la fondation Émergence, son histoire, ses missions.

La fondation Émergence est née en 2000 et a pour mission d’éduquer, d’informer et de sensibiliser la population aux réalités des personnes gaies, lesbiennes, bisexuelles et trans (LGBT). Pour ce faire, elle a mis sur pied la première journée au monde de lutte contre l’homophobie en 2003, à laquelle sera ajoutée la transphobie en 2015. Elle propose pour ces journées internationales des thématiques annuelles. Elle décerne, chaque année, le prix Laurent-McCutcheon de lutte contre l’homophobie et la transphobie (remis cette année au Premier ministre canadien, Justin Trudeau). Elle publie annuellement une campagne d’information et de sensibilisation ainsi qu’un sondage pan-canadien afin de sonder la perception et l’opinion des Canadiennes et Canadiens à l’égard des réalités LGBT.

 
Pourquoi avoir choisi de mettre à l'honneur les séniors lors de l'IDAHOT 2016 ?

La Fondation Émergence se préoccupe depuis plus de dix ans de la question du vieillir des personnes LGBT et de la peur, pour certaines d’entre elles, d’être obligées de retourner dans le placard. La nombreuse génération des Baby-Boomers (1946-1964) qui arrive à la retraite implique qu’il y a de plus en plus de personnes ainées LGBT ayant besoin de services sociaux et de la santé. Ainsi, la thématique du vieillir des personnes LGBT a été retenue pour 2016 afin de sensibiliser, le grand public et les intervenants du milieu de la santé et des services sociaux, à leurs réalités.

 
À quelles situations sont confrontés les séniors LGBT par rapport aux LGBT plus jeunes ? Quelle est la réalité des séniors LGBT ?

Les stigmatisations juridique, médicale, religieuse et sociale qu’ont vécues les personnes ainées LGBT ont peu de choses à voir avec la liberté dont jouissent les jeunes générations actuelles. Cependant, pour elles aussi, l’acceptation sociale demeure le défi actuel.
Plusieurs réalités des personnes ainées LGBT sont les mêmes que celles des personnes ainées hétérosexuelles : isolement, maltraitance financière et psychologique, fragilité physique, peur de perdre leur autonomie, soucis financiers, précarité, etc. On ajoute à ces réalités des conditions spécifiques aux personnes ainées LGBT : un plus grand isolement parce que la majorité n’a pas été mariée et n’a pas connu l’homoparentalité, la peur de ne pas être respecté, d’être stigmatisé, d’être rejeté par les autres ainés à cause de leur orientation sexuelle, de leur expression ou de leur identité de genre.
 

 Comment expliquez-vous cette différence ? Ces problématiques ?

Je rappelle qu’au Canada, l’homosexualité a été décriminalisées en 1969, que la religion catholique dominante en fait toujours une interdiction de pratique, que ce n’est qu’en 1975 que l’American Psychological Association (APA) a appelé pour le retrait de la stigmatisation de maladie mentale pour les orientations lesbiennes, gaies ou bisexuelles. De plus, ce n’est qu’en 1990 que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) l’a supprimé de la liste des maladies mentales de la classification internationale des maladies (DSM).
Les jeunes générations occidentales vivent dans une société dans laquelle l’homosexualité n’est plus criminalisée et n’est plus considérée comme une pathologie médicale. Cependant, l’acceptation sociale reste encore le grand défi des années à venir dans une société de plus en plus diversifiée et qui ne partage pas nécessairement les mêmes valeurs ni la même ouverture aux différences.

 
Quels sont, selon vous, les moyens de prévenir les situations difficiles que rencontrent les séniors LGBT ?

Plus d’informations et une plus grande sensibilisation de la population en général aux réalités des personnes ainées LGBT. La Fondation Émergence a aussi créé une Charte de la bien-traitance envers les personnes ainées LGBT, qui a été appuyée et adoptée par différents acteurs des milieux ainés. Cette Charte énonce des principes qui guident les intervenants pour assurer des climats exempts d’homophobie et de transphobie.

 
Parlez-nous du programme de soutien aux ainés "Pour que vieillir soit gai"

Après une consultation publique, le ministère québécois responsable des ainés a soutenu durant six années (2009-2015) la Fondation Émergence et son programme "Pour que vieillir soit gai", dont l’objectif principal était de sensibiliser les intervenants du milieu des ainés aux réalités des personnes ainées LGBT. Programme dont est issue la Charte de la bien-traitance envers les personnes ainées lesbiennes, gaies, bisexuelles et transidentitaires. Cette charte fait partie d’une trousse d’outils qui a été diffusée à travers le Québec. Des conférences, des ateliers et des kiosques d’information ont fait partie des moyens utilisés pour sensibiliser les intervenants du milieu des ainés aux réalités des personnes ainées LGBT.

 
Les séniors LGBT connaissent-ils des situations différentes selon le pays, notamment entre le Canada et la France ?

Comparativement aux États-Unis, c'est la question des coûts d’assurance maladie et des coûts pour se loger ainsi que l’appartenance à une minorité visible qui sont les principaux facteurs énoncés quand on s'interroge sur les difficultés des personnes ainées LGBT.
Le Canada et le Québec en particulier n’ont pas les mêmes préoccupations. Nous rappelons qu’au Québec, la majorité des soins de santé sont gratuits, que de nombreuses ressources d’aide au logement existent et qu’un supplément de revenus garanti est disponible, au niveau du gouvernement canadien, pour les personnes de 65 ans et plus.
Pour la France, les questions de différences de vécues entre les ainés LGBT et les jeunes générations sont très semblables à celles évoquées pour Le Québec, sauf pour les droits qu’induit le mariage, puisque depuis 2005, le mariage entre personnes de même sexe est légal au Canada. Il est aussi permis d’être des parents de même sexe pour l’adoption.

Fondation Emergence seniors LGBT
Claude Leblond, président de la fondation Émergence.

Pour plus d'informations sur les missions de la fondation Émergence : www.fondationemergence.org