LGBTphobie"On ne veut pas avoir à se cacher" : un couple témoigne après une agression homophobe à Toulouse

Par Youen Tanguy le 11/12/2018
agression homophobe

Un couple d'hommes a été insulté et agressé à Toulouse, lundi 10 décembre, après s'être embrassé dans le métro. Ils ont accepté de témoigner auprès de TÊTU.

"C'est triste à dire, mais nous ne sommes pas surpris." Joshua* est résigné. Lundi 10 décembre, lui et son compagnon, Elliot*, ont été victimes d'une violente agression homophobe dans le métro toulousain.

Il est 14 heures lorsque les deux étudiants de 19 et 22 ans quittent leur domicile pour prendre le métro. "J'étais assis sur un strapontin avec Elliot en face de moi, raconte Joshua à TÊTU. C'est quand il m'a fait un smack (petit bisou sur la bouche, NDLR) qu'une fille et son copain ont commencé à nous regarder avec insistance."

Florilège d'insultes

Le couple sort de la rame à la station Jean Jaurès et prend les escalators. L'autre couple fait de même et emprunte les escalators juste à côté. "Ils nous regardaient encore, du coup Elliot les a fixés aussi." C'est à ce moment-là que le garçon en face s'énerve : "Qu'est-ce que tu regardes espèce de sale pédé ?", lance-t-il à Elliot.

Un florilège d'insultes s'en suit : "Baissez les yeux sales tapettes" ; "Tu la veux ? Je vais t'enculer, je vais te la mettre !".

"Il nous a attendu à la sortie des escalators et s'est collé de manière très intimidante à Elliot, en le menaçant de l'enculer et de le tabasser, se remémore Joshua qui tente alors de s'interposer entre les deux hommes. Il a continué à nous insulter et je lui ai dit d'arrêter sinon j'appelais la police."

A LIRE AUSSI : « A toi qui, parce que tu es lesbienne, trans’, bi ou gay, ne vivras jamais complètement en sécurité »

"Il m'a foncé dessus pour me frapper"

La situation s'envenime lorsque le couple tente d'éloigner leur agresseur qui assène un violent coup de poing au visage de Elliot. "Le coup était tellement fort qu'il est tombé au sol, confie Joshua. L'écarteur qu'il avait dans l'oreille en est sorti et ça s'est mis à énormément saigner."

L'agresseur s'acharne et continue à frapper Elliot et Joshua, dont le dernier qui tente de s'interposer, au sol. "Sales pédés" ; "petite salopes" ; "tu la veux, tu vas la prendre", leur lance-t-il. Plusieurs personnes s'interposent et parviennent à faire stopper les violences.

Le couple ne veut pas que cet acte reste impuni et prend une photo de l'homme. "Quand il a vu ça, il m'a foncé dessus pour me frapper, abonde Joshua. Je me suis mis devant Elliot en mode bouclier et j'ai reçu pas mal de coups dans le dos". Une personne de la sécurité intervient finalement et les met à l'abri pour leur prodiguer les premiers soins.

Un dépôt de plainte avec "des hauts et des bas"

Le couple se rend dans la foulée au commissariat central de Toulouse pour déposer plainte. "Il y a eu des hauts et de bas", glisse dans un petit rire ironique Joshua. "Comme je suis un mec trans', je me suis fait mégenrer de A à Z. J'ai dû m'outer pour que l'officier écrive qu'il s'agissait bien d'une agression à caractère homophobe."

A LIRE AUSSI : Les policiers sont-ils formés aux questions LGBT+ ? La galère du dépôt de plainte pour homophobie

Les deux hommes avaient pris rendez-vous avec un médecin légiste pour se voir éventuellement prescrire des jours d'ITT.

Contactés par TÊTU ce mardi matin, les deux victimes sont encore très choquées. "On est révoltés, ça me tue de voir autant d'homophobie", gronde Joshua. Et d'ajouter dans un souffle : "On n'était pas bien depuis quelques temps en voyant tous ces articles sur des agressions homophobes, on ne se sentait pas en sécurité".

Ils témoignent aujourd'hui pour que les choses bougent : "Je sais que c'est idyllique, mais on ne veut pas que ça recommence. On ne veut pas avoir à se cacher. Il faut que ça s'arrête !".

Joint par TÊTU, le parquet de Toulouse confirme que les deux hommes ont bien déposé plainte lundi 10 décembre et ajoute que les auteurs (de l'agression, NDLR) n'ont pas encore été identifiés. Une enquête préliminaire a également été ouverte.

A LIRE AUSSI : En 2018, l’homophobie court encore les rues, y compris à Paris, y compris à TÊTU

Un plan d'urgence

Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, les actes LGBTphobes ont augmenté de 15% entre janvier et septembre 2018 par rapport à la même période en 2017.

Le nombre d’appels sur la ligne d’écoute de SOS Homophobie a, quant à lui explosé : plus 37% en septembre 2018 par rapport à septembre 2017.

Face à cette recrudescence d'agressions, la secrétaire d'Etat chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et la lutte contre les discriminations avait annoncé, le 26 novembre dernier, un plan d'urgence contre l'homophobie. 

Article mis à jour le mardi 11 décembre à 17h37

*Les prénoms ont été changés

Crédit photo : Wikimedia Commons.