Brunei a instauré, mercredi 3 avril, la peine de mort par lapidation pour punir l'homosexualité et l'adultère. Une nouvelle législation d'inspiration islamique qui suscite une vague d'indignation d'ONG, de personnalités et de gouvernements à travers le monde.
Colère et indignation. Mercredi 3 avril, le petit état de Brunei a officiellement fait entrer en vigueur la peine de mort pour punir l'homosexualité. L'État riche en hydrocarbures situé sur l'île de Borneo, dirigé d'une main de fer par le sultan Hassanal Bolkiah, devient ainsi le premier pays d'Asie du Sud-Est à appliquer au niveau national un code pénal suivant la charia la plus stricte, comme le fait l'Arabie saoudite.
Les nouvelles lois rendent les rapports sexuels entre les hommes passibles de la peine capitale par lapidation. Les relations entre femmes sont passibles d'un maximum de 10 ans de prison. Le code prévoit aussi l'amputation d'une main ou d'un pied pour les voleurs. Le viol est également passible de la peine de mort, tout comme l'insulte au prophète Mahomet.
"Peines cruelles et inhumaines"
L'entrée en vigueur de cette législation a semé la consternation dans le monde entier. Du côté des organisations internationales, l'ONU a dénoncé des "peines cruelles et inhumaines". Les stars George Clooney et Elton John ont propulsé le sujet en une de l'actualité internationale en lançant un appel au boycott de neuf hôtels de luxe liés au sultan de Brunei. Des élus de la ville de Los Angeles, qui abrite deux de ces hôtels, ont joint leur voix à cet appel.
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Phil Robertson, directeur adjoint de l'ONG Human Rights Watch, estime que le texte est "barbare dans son essence" et "impose des punitions archaïques pour des actes qui ne devraient même pas être considérés comme des crimes". Pour l'Union européenne, certains aspects de la législation relèvent "de la torture ou d'actes cruels, inhumains et dégradants". En France, le ministère des Affaires étrangères a appelé le sultan à "renoncer à ce projet et à maintenir son moratoire de fait des exécutions capitales depuis 1957", le 2 avril.
Fuir le pays
Un habitant gay de 33 ans s'est insurgé contre des dispositions "injustes, cruelles" qui ne doivent "pas être mises en oeuvre". "Cela enlève vraiment toute ma joie de vivre, ma liberté d'expression, cela me déprime tant", a-t-il dit à l'AFP sous couvert de l'anonymat.
Zulhelmi bin Mohamad, une femme transgenre de 19 ans qui a fui Brunei l'année dernière et demande l'asile au Canada, a jugé que la communauté LGBT du pays, qui vit déjà de manière "très cachée", allait souffrir encore davantage.
"Certains s'inquiètent beaucoup et aimeraient fuir le pays avant qu'on découvre qu'ils ne sont pas hétérosexuels", confie-t-elle à l'AFP.
Renforcer une image de leader islamique
Le sultan Bolkiah, qui dirige la monarchie depuis 1967, n'a pas mentionné officiellement l'entrée en vigueur des nouvelles lois dans un discours prononcé mercredi mais a appelé à un islam plus fort. "Je veux voir les enseignements de l'islam dans ce pays se renforcer", a-t-il déclaré dans un centre de conventions proche de la capitale, Bandar Seri Begawan. Le sultan, l'une des plus grandes fortunes au monde, avait annoncé dès 2013 l'application progressive de la charia.
Pour les analystes, le sultan Hassanal Bolkiah cherche à renforcer son image de leader islamique aux yeux des plus conservateurs à un moment où l'économie nationale, basée sur le pétrole, donne des signes de faiblesse.
(Avec AFP)
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