LGBTQI+La Cour suprême va se pencher sur les discriminations des LGBT+, et ce n'est pas une bonne nouvelle

Par Marion Chatelin le 23/04/2019
Cour suprême

La Cour suprême des États-Unis a accepté d'examiner les dispositifs de lutte contre les discriminations faites aux homosexuels et aux personnes trans' dans le travail. Mais la communauté LGBT+ a de quoi s'inquiéter. Explications.

La prise de risque est énorme. Le dossier, ultra-sensible. La Cour suprême américaine a annoncé lundi 22 avril, se saisir de la problématique des discriminations faites contre les  LGBT+. Au total, trois dossiers de licenciements contestés, concernant deux hommes homosexuels et une femme trans', seront examinés à l'automne. La décision serait rendue en 2020.

La question de fond que devra trancher la plus haute juridiction américaine, est simple : la loi fédérale de 1964, qui interdit les discriminations "sur la base du sexe", entre autres, s'applique-t-elle à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre ? Spoiler : la décision prise pourrait bien venir confirmer la politique menée par l'administration Trump depuis 2017. C'est à dire, faire reculer par tous les moyens les droits des homosexuels et des personnes trans'.

Une Cour conservatrice...

Le calcul est simple. À ce jour, sur les neuf juges, nommés à vie, qui composent la plus haute juridiction américaine, cinq sont des républicains conservateurs, contre quatre démocrates.

En juin 2018, le juge républicain, Anthony Kennedy, annonce sa démission. Il était considéré jusqu'alors comme le "pivot" de la Cour suprême, car conservateur d'un point de vue économique, mais plus libéral sur les questions sociétales - il avait notamment voté en faveur de la légalisation du mariage pour tou.te.s au niveau fédéral. Ce qui a permis à Donald Trump de nommer l'ultra-conservateur, et très controversé, Brett Kavanaugh à sa place.

À LIRE AUSSI : États-Unis : la nomination de Brett Kavanaugh à la Cour suprême inquiète les personnes LGBT+

Voilà pourquoi il faudrait "se garder de tout optimisme", analyse Corentin Sellin, historien spécialiste des États-Unis contacté par TÊTU. "Il ne faut pas se mentir, on a politiquement une Cour qui apparait plus à droite depuis l'arrivée de Kavanaugh et en particulier sur les questions sociétales comme les droits des LGBT+ ou l'avortement, dont on sait qu'elles sont très disputées par la droite évangélique religieuse." 

Donald Trump avait nommé quelques mois seulement après son investiture, le juge fédéral Neil Gorsuch à la Cour suprême. Cette nomination n'avait fait aucun tapage médiatique. "Il apparait pourtant comme le juge le plus conservateur qui n'a jamais siégé à la Cour suprême", commente Corentin Sellin. La précision est de taille.

Pour valider la politique de Trump

Entre la disparition des juges "pivot" et l'arrivée des ultra-conservateurs dans le temple du droit américain, cette nouvelle a de quoi effrayer la communauté LGBT+. Car l'impact de la décision pourrait être grand. "La Cour suprême est là pour trancher quand il n'y a pas de loi votée par le Congrès. On peut dire que dans ce cas précis elle a force de loi", abonde Corentin Sellin. Et de poursuivre :

"Trump a nommé ces juges en disant haut et fort qu'il veut une Cour suprême qui valide la politique menée. On se retrouve avec une cour 'new look', totalement réceptive à une vision ultra-conservatrice, voire réactionnaire, de la société avec comme unique but de renverser l'ordre jurisprudentiel précédent." 

En 2016, alors candidat à la présidence des États-Unis, Donald Trump avait annoncé sur Fox News, "envisager fortement" de nommer à la Cour suprême un juge "capable de renverser le mariage pour tous". Désormais, ce n'est plus un juge mais une majorité de juges qui sont capables de le faire.
Crédit photo : Ted Eytan / Flickr.