TRIBUNE. A l'occasion de la journée de la bisexualité, l'association de personnes bisexuelles et pansexuelles Bicause rappelle que les clichés sur les bi.e.s ont assez duré... et qu'il faut qu'ils cessent.
Qui n’a pas entendu au moins une fois « la bisexualité, ça n’existe pas » ? Qui n’a pas été accroché·e par un titre de journal sur cet effet de mode ? Qui n’a pas entendu, après l’attentat de Nice, que le meurtrier avait femme et fréquentait des hommes, bref qu’il était bi ?
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Les préjugés ont la peau dure, puisque sur la base d’un fait, d’un constat intime, d’un sondage, ils tirent une généralité applicable à toutes les personnes bi… Ils ont été alimentés par des décennies d’invisibilité, au cours desquels l’urgence était de faire avancer le droit aux relations entre personnes de même sexe, et tout est loin d’être gagné. D’où les retards pris : drapeau bi, 19 ans après l’arc-en-ciel ; journée internationale de la bisexualité (JIB) fêtée pour la première fois en France le 23 septembre 2009, 10 ans après son lancement…
Des préjugés qui durent
Ces préjugés rassemblent les trois mêmes caractéristiques :
- Ils partent de la méconnaissance des réalités des personnes bi : faute d’en rencontrer, d’échanger, d’aborder la complexité de chaque être humain, on tombe vite dans les caricatures. Peut-être aussi parce que, hétéro ou homo, il serait dérangeant de se projeter demain avec une attirance qu’on n’avait pas prévue, et qui brouille les certitudes…
- Ils se basent sur des inexactitudes ou les entretiennent : ce ne serait qu’une passade (mais chacun·e est susceptible d’évoluer durant sa vie, non ?), tout le monde est un peu bi (et donc personne ne l’est vraiment), ils sont instables, ne savent pas choisir - or on choisit de vivre ses attirances, ou non… c’est tout !
- Ils alimentent la division entre les personnes, des hiérarchies de valeur absurdes : cela existe aussi dans le milieu homo, gay ou lesbien ; de fait, le mouvement organisé LG(BT) a tardé à apporter son soutien aux spécificités bi – mais c’est de moins en moins vrai.
Des bis invisibles
Rejeté·e·s par la société hétéronormée dans ses aspects encore assez largement homophobes ou au mieux invisibilisé·e·s, longtemps marginalisé·e·s par le mouvement LGBT+, méconnu·e·s des institutions, les bi seraient, selon un sondage Marianne IFOP de 2014, 3% de la population adulte, presque autant que les lesbiennes et gays. Mais il est vrai que ce sont toutes les « minorités » dans la communauté LGBT+ qui peinent à voir leurs spécificités connues et relayées par tou·te·s : les trans, les pansexuel·le·s, les non binaires, les asexuel·le·s, les personnes intersexes…
À Bi’Cause, nous, qui avons fêté nos 22 ans (c’est peu au regard des associations « grandes anciennes » en France, des 50 ans de Stonewall et des 48 ans du FHAR1), sommes encore dramatiquement peu et peu connu·e·s dans la majorité des régions ; alors nous nous réjouissons chaque fois que nous pouvons agir en inter-associatif, pour inclure dans les actions les préoccupations des bi, pour démonter les manifestations de la biphobie et mieux les combattre, pour œuvrer ensemble à nos mobilisation communes. Il en va aussi de mieux-être des personnes bi…
Du mieux-être et de l’estime de soi. Parce que s’il est faux de dire que les bi sont « infidèles » et « véhiculent des tas de maladies », nous veillons depuis toujours, en revendiquant le droit d’exister, de parler et d’aimer, à prendre toute notre place dans la prévention contre le VIH et les IST. Et, quand des personnes bi sont concernées, à exposer le plus simplement possible les attirances polyamoureuses, comme d’autres, hétéro, ou homo, ou…
Rejoignez-nous !
Ce mieux-être, 5 associations dont Bi’Cause tentent d’y contribuer, en ayant lancé la première enquête sur la biphobie et la panphobie, et la réalisation du rapport est en cours. Puisse le site de Têtu accorder un bel accueil à sa prochaine parution ! Dans ce rapport, on verra que les phénomènes de rejet fleurissent sur les applications de rencontre y compris de la part de lesbiennes ou de gays, mais aussi les clichés sexistes hétéro « ah, t’es bie, chic, viens avec une copine, on se fera un plan à 3 ».
Enquête où, justement, les associations l’ayant initié et porté ont veillé scrupuleusement à inclure la pansexualité : entre une conception ouverte de la bisexualité (« être attiré·e par plus d’une identité de genre » - exit la binarité femmes et hommes :!), et la pansexualité (« être attiré·e par la personne, sans considération de son genre »), il y a une profonde convergence, et elle est largement portée par une frange de la jeunesse.
Les mêmes associations, et bien d’autres, dont certaines ont organisé les cortèges de la Marche des Fiertés le 29 juin à Paris, se sont retrouvés le dimanche 22 septembre, pour la 5e marche de la JIB, qui mêlait bi, pan, L et G, trans et non binaires, et plus – même les hétéro ami·e·s étaient les bienvenu·e·s ! D’autres événements sont prévus, à Paris et en région, alors… à vos écrans !
La visibilité fera reculer les préjugés.