associationsDans les coulisses du film coup de poing de l'association Le Refuge

Par Tom Umbdenstock le 18/12/2019
Refuge

Le Refuge a invité TÊTU à assister au tournage de sa nouvelle campagne. Un tournage et un film fort, que vous pouvez découvrir en exclusivité à la fin de l'article. 

Un samedi matin dans la cour du lycée Bergson à Paris, Théo se fait passer à tabac par trois camarades de classe. Ils le frappent, lui tirent les cheveux, lui crachent au visage. Les insultes fusent : “Sale PD, t’aimes bien qu’on te violente ?... Sale victime… t’es ma pute”. Mais pour une fois, la scène qui se déroule est une fiction : elle est filmée par une équipe de tournage, et fera partie du nouveau clip de campagne de l’association Le Refuge.

L’organisation héberge des LGBTQI+ exclus de leur famille partout en France. Elle tient aussi une ligne d’écoute et de soutien aux jeunes qui souffrent d’homophobie familiale ou de mal être dû à leur orientation sexuelle. Dans un format hybride entre clip, publicité et fiction, la vidéo devra montrer la violence brutale, ordinaire, qu’ils et elles peuvent subir.

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"J'ai dû demander une pause pour m'aérer"

La caméra surplombe la scène, qu’elle filme de bas en haut. Elle montre Théo impuissant, rué de coups et qui se protège comme il peut. En contrechamps pour la scène suivante, le visage des trois agresseurs qui jouissent de leurs sévices est diffusée sur le moniteur. Chacun débite son lot d’insultes. Leurs cris résonnent dans la cour du lycée.  Le regard plein de haine fait face à la caméra qui deviendra l’oeil du spectateur.

“On va en refaire une”. Loïc Chauveau, le réalisateur, demande aux comédiens de rejouer la scène. Il incite les agresseurs à être plus violents, montrer leur rage, leur haine, leur folie. Difficile pour lui d’en demander autant. “Pour une scène plus tôt ce matin, j’ai dû demander 10 minutes de pause pour m’aérer”. Mais le but est bien que la scène soit fidèle à la réalité. La violence des mots, même fictive, frappe le jeune homme. “En tant qu’homo, déjà au moment du casting, ça a été difficile d’entendre toutes ces insultes”.

Même chez lui, il n'est plus le bienvenu

Entre deux scènes et de plus près, Paul Gomerieux, qui joue Théo, laisse apercevoir une plaie sur son visage. Heureusement, c’est du maquillage. Elève au cours Florent, il a été repéré grâce à son jeu dans le court métrage “PD” qui montre comment un jeune subit le regard homophobe. “Je suis hétéro, et sur le tournage du court métrage, j’ai pris conscience de ce que peuvent subir les jeunes homosexuels. Depuis, je suis vraiment dans la défense de cette cause”. C'est pourquoi il est heureux d’être présent sur le tournage et prendre quelques coups.

Pour le plan suivant, la caméra s’éloigne de la scène pour la filmer de plus loin, et montrer le point du vue du spectateur. Les trois agresseurs prennent la fuite et laissent Théo seul. L’après-midi, l’équipe doit filmer le retour du garçon chez lui. Dans la maison familiale, son père ne le réconfortera pas, bien au contraire. Sous le regard impuissant de sa mère, sa grand-mère et son frère, il se fait chasser de la maison. Dans cette maison lumineuse décorée par un sapin de Noël, il n’est plus le bienvenu.

Appel aux dons

Le clip doit montrer aussi que l’homophobie est une discrimination qu’on peut subir jusque chez soi, dans son foyer. Le réalisateur lui-même raconte : “Mes deux ex ont été foutus à la porte de chez eux”. La vidéo finale, visible en fin d'article, sera également l’occasion d’un appel aux dons pour l’association. Une version courte pourrait être diffusée gratuitement sur plusieurs chaînes de télévision et dans certains cinémas.

Nicolas Noguier, président de l’association, trouve le scénario "très représentatif de ce que peuvent subir les jeunes.” Pour sa diffusion, il “espère qu’il aura un impact sur le public, et les parents. Les parents c’est les personnes cibles à toucher pour nous. Je suis toujours touché de voir à quel point l’abandon est toujours aussi présent.”

Nouveau départ pour Le Refuge

Cette production fait partie d’un changement de statut pour l’association qui souhaite devenir une fondation. Ce statut permettra plus de transparence vis à vis des donateurs privés, et permettra de mieux pérenniser sa situation. Pas de changement à prévoir dans leurs objectifs et leurs fonctions au quotidien. Mais un nouveau logo, plus recentré et épuré a été conçu. Il doit mieux représenter le cocon que constituent les points d’accueil du Refuge.

Pour rompre leur isolement, l’organisation reçoit un peu plus de 5.000 appels de jeunes LGBTQI+ par an sur sa ligne d’écoute. Dans ses 19 délégations départementales, elle héberge plus de cent jeunes exclus de leurs foyers en raison de leur orientation sexuelle. Ceux qui ne trouvent pas une place au sein des appartements-relais peuvent bénéficier d’un accueil de jour dans leurs locaux. Pour que ces jeunes puissent se rapprocher un peu de la chaleur d’un foyer pour les fêtes de Noël.

 

Et maintenant, découvrez la vidéo : 

 

 

Crédit photo : Le Refuge