politiqueLoi bioéthique : le Sénat adopte à dix voix près un texte vidé de sa substance

Par Timothée de Rauglaudre le 04/02/2020
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Le Sénat a adopté mardi, lors d'un vote serré, le projet de révision de la loi bioéthique. Si la mesure phare du texte, l'ouverture de la PMA à toutes les femmes, a été validée, ses modalités d'application ont été largement édulcorées.

C'est un palais du Luxembourg à majorité conservatrice qui vient d'adopter en première lecture, ce mardi 4 février, le projet de révision de la loi bioéthique. Un vote serré, puisque sur 341 suffrages exprimés - dont 326 dans l'hémicycle - , 153 sénateurs s'y sont montrés favorables, 143 défavorables et 40 se sont abstenus. Concluant la séance, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé qu'elle rétablirait l'article 4 du texte, sur la filiation des enfants nés par PMA, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale en octobre dernier, ainsi que l'article 3 sur l'accès des enfants nés par PMA à leurs origines.

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En amont du vote, les différents groupes, très divisés comme le montre le résultat final, se sont exprimés. "Le texte du Sénat a le mérite de ne pas avoir remis en cause la PMA, a relevé le sénateur Jacques Bigot pour le groupe socialiste et républicain. J’espère qu’on retrouvera dans la navette le remboursement." En effet, le texte, arrivé en commission spéciale au Sénat le 7 janvier, a été édulcoré sur des points centraux, notamment l'ouverture de la PMA à toutes les femmes.

"Concession aux anti-PMA"

Si le principe lui-même a été validé par les sénateurs, ceux-ci ont restreint son remboursement à 100 % par l'assurance-maladie aux couples répondant à un "critère médical (à savoir l’infertilité dont le caractère pathologique est médicalement constaté ou la non transmission d’une maladie grave, ou comme à la suite de la préservation de la fertilité pour motif pathologique)", sur proposition de la co-rapporteure Les Républicains Muriel Jourda. C'est-à-dire que, tel qu'adopté ce mardi, le texte exclut les femmes seules et les couples de femmes du remboursement de la PMA. "Nous n'avons rien cédé au militantisme et nous avons tout fondé sur la cohérence juridique", a pourtant estimé la sénatrice en séance, s'exprimant au nom du groupe LR, majoritaire au Sénat, qui s'est en grande partie opposé au texte.

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Dans l'hémicycle, c'était ensuite la reconnaissance de la filiation des enfants nés par PMA pour les couples de femmes qui avait été modifiée le 23 janvier par les sénateurs. Alors que le texte initial du gouvernement proposait une simple reconnaissance devant le notaire, la sénatrice de droite Sophie Primas a proposé un statu quo, la "mère d'intention" devant adopter son propre enfant. "Comment ne pas penser qu’il s’agit d’une concession aux anti-PMA, qui ont manifesté devant le Sénat et nous ont inondés de mails, prédisant la décadence de notre société ?" a dénoncé ce mardi la sénatrice Laurence Cohen pour le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste, qui a voté en faveur du texte. Le projet de loi doit désormais arriver en deuxième lecture à l'Assemblée nationale.

 

Crédit photo : Sénat